Interview de Olivier Blanchard  : Chef économiste au Fonds monétaire international

Olivier Blanchard

Chef économiste au Fonds monétaire international

Si on est réaliste, et si on ne s'attend pas à des miracles, on sera plutôt satisfait du prochain G20

Publié le 11 Janvier 2011

De quelle manière appréhendez-vous le prochain sommet du G20 qui doit se tenir à Nice cette année, et qui sera présidé par notre Président Nicolas Sarkozy ?
Il me semble que les sujets principaux qui ont été choisis sont de bons sujets. La question du système monétaire international est comme un serpent de mer, on y retourne une fois tous les cinq ou dix ans. Manifestement cette question fondamentale a été reposée par la crise financière. Les interrogations sous-jacentes sont cruciales. Faut-il se diriger vers un monde multipolaire, un monde bipolaire, ou bien un monde où tout est centré sur le dollar ? Faut-il avoir plusieurs monnaies de réserve ? Si nous faisons des progrès sur ces questions, ce sera un véritable pas en avant.

N’est-il pas trop tard pour agir ?
Ces questions semblaient davantage cruciales à résoudre rapidement lorsque tous les pays étaient confrontés à des difficultés aigues et qu’ils avaient intérêt à agir en commun dans le même sens. Nous sommes à présent dans un environnement plus complexe. Nous sommes tous d’avis qu’il est important de réformer le système. Mais ce que veulent les uns et les autres n’est pas forcément compatible.

Etes-vous confiant quant à l’issue de ce sommet ?
Je pense que nous avons pas mal appris de la crise. Il est nécessaire de tirer les leçons des trois dernières années que nous avons vécues. Les solutions ne sont pas simples. On sait qu’un système basé uniquement sur le flottement des monnaies ne fonctionne pas, et qu’un système basé uniquement sur une fixation des monnaies ne fonctionne pas non plus. Il y a par ailleurs toute une série de points à éclaircir a propos de la provision de la liquidité globale.
L’effort de la France de vouloir une réflexion globale sur ces problématiques est bienvenu. Nul ne peut dire à l’avance avec précision de quelle manière ce sommet se déroulera et quelles seront les décisions qui seront prises.

Pensez-vous que nous parviendrons à des résultats ?
Je pense que nous parviendrons à des résultats même si la gouvernance s’avère ne pas être totalement mondiale, que les processus semblent un peu acrimonieux.

A mon sens, les derniers sommets du G20, même s’ils ont eu moins de succès que le sommet de Pittsburg ou que le sommet de Londres ont été utiles. Ils ont obligé à faire un travail de recherche, de présentation sur les sujets comme le contrôle des capitaux, l’utilisation des réserves que nous n’aurions certainement pas faits avec la même profondeur.

Même si nous n’avons pas de grandes décisions concrètes et seulement des changements de position, le travail d’analyse effectué est déjà énorme. A cet égard, le sommet de Nice présentera également son utilité.
Si on est réaliste, et si on ne s’attend pas à des miracles, on sera plutôt satisfait de ce sommet.

Vous avez participé hier à une table ronde organisée par le CEPII sous la présidence de Masahiro Kawai, doyen et directeur général de l’Institut de la Banque Asiatique de Développement intitulé le G20, un agenda en marche. Que retenez-vous de ce panel ?

Nous avons senti les différences de vue. Mais, j’ai entendu une espèce d’assentiment général. La présentation de He Fan, directeur adjoint de l’Institute of World Economics & Politics (IWEP) et de la Chinese Academy of Social Sciences (CASS) en Chine sur les déséquilibres mondiaux a montré tout l’intérêt de faire un travail de quantification sur l’importance de tel ou tel point.

Allez vous participer à d’autres panels de ce genre pour préparer le prochain sommet ?
Je n’aurai pas vraiment l’occasion de participer à d’autres panels de ce type là. Mais le FMI est pleinement est impliqué dans le processus pour donner son expertise.

Propos recueillis par Imen Hazgui