Interview de Jean-Jacques  Gauthier : Directeur général adjoint du groupe Lafarge

Jean-Jacques Gauthier

Directeur général adjoint du groupe Lafarge

Nous espérons une progression de notre cours de bourse dès 2011

Publié le 21 Février 2011

Lafarge a réalisé en 2010 un résultat net, part du groupe en hausse de 12% à 827 millions d'euros. Le chiffre d'affaires en hausse de 2% à 16,2 milliards d'euros. Quels ont été les principaux moteurs de vos résultats 2010 ?
Cette année a été encore difficile pour le secteur de la construction, notamment dans les pays développés. Nous avons constaté au quatrième trimestre les premiers signaux d’un retour de la croissance avec une évolution positive des volumes de ciment, pour la première fois depuis fin 2008. C’est un signal positif, qui contribue à une accélération du retour à la profitabilité.

Par ailleurs, nous avons poursuivi l’année dernière avec vigueur et détermination notre programme de réduction des coûts. En 2010, nous avons délivré 220 millions d’euros d’économies de coûts et 50 millions euros d’économies ont été réalisées au cours du quatrième trimestre. Il s’agit là d’économies structurelles pérennes.

La répartition des actifs de Lafarge entre pays développés et pays émergents permet au Groupe, en outre, de bénéficier au mieux de la reprise.

Enfin, la mobilisation de l’ensemble des équipes du groupe a travers le monde, présent dans 78 pays, a permis une nouvelle fois une amélioration du besoin en fonds de roulement représentant plus de 350 millions d’euros de génération de cash, après un milliard en 2009.

Qu’en est-il de vos perspectives pour 2011 ?
Nous nous attendons à une augmentation des volumes de ciment de 3 à 6%. Les pays émergents notamment font preuve d’un grand dynamisme. Nous attendons 7 à 10% de croissance en Amérique latine, 5 à 8% de croissance en Asie, 4 à 7% de croissance en Afrique et au moyen Orient.
Cette augmentation des volumes devrait se faire dans un environnement où les prix devraient se tenir. Ceci devrait conduire à une progression de nos résultats.

Quels sont les principaux risques que vous entrevoyez pour 2011 ?

Nous avons pour 2011 vraisemblablement plus d’opportunités que de risques. Nous commençons à sortir de la crise la plus importante que nous connaissons depuis 60 ans. Le mix géographique qui caractérise notre groupe nous offre une diversification qui a vocation à tempérer ces risques potentiels au maximum.

Quelle évolution de vos activités est à envisager dans l’hexagone ?
La France est un pays important pour Lafarge. Après les baisses de l’industrie de la construction au cours des deux dernières années, nous devrions entrevoir une amélioration en 2011, qui restera cependant modeste ; les volumes de ciment restent inférieurs de 20% à ceux d’il y a quelques années. Dans ce contexte d’incertitudes, il faut rester prudent.

Vous avez annoncé ce matin votre projet de fusion avec la société Anglo American au Royaume-Uni ? Dans quelle logique s’inscrit cette opération capitalistique ?
Ce rapprochement de nos activités Ciment, Granulats & Béton et Enrobés bitumineux au Royaume-Uni avec celles de Tarmac va permettre de créer une des premières sociétés de matériaux de construction au Royaume-Uni. Les activités de Lafarge et d’Anglo American sont complémentaires. A fin 2010, ces deux entreprises ont réalisé, de façon combinée, un chiffre d’affaires de 1,8 milliards de livres et un Ebitda d’environ 210 millions de livres.
Cette entité devrait permettre d’améliorer les services rendus aux clients et d’offrir plus largement nos produits à valeur ajoutée. Par ailleurs, les synergies escomptées devraient s’élever à 60 millions de livres.

La fusion devrait être effective seulement en 2012 ?

En 2011, nous préparerons cette fusion. Elle sera effective après accord des autorités de la concurrence, ce qui devrait prendre plusieurs mois.

Lafarge est très implanté en Egypte. Quelles devraient être les répercussions des troubles que connait le pays sur votre activité ?

L’Egypte représente 4 % du chiffre d’affaires du Groupe. Pendant ces troubles, du fait d’une activité économique très réduite et de l’arrêt des commandes, notre production a été très fortement ralentie pendant sept jours. Aujourd’hui, les livraisons ont quasiment repris à leur niveau habituel.
Nous restons confiants quant à la solidité des fondamentaux des pays de la région Moyen-Orient.
Dans cette région, comme dans tous les pays émergents, le ciment est une matière première indispensable. Quand l’être humain a répondu à ses premiers besoins qui sont de boire et de manger, la seconde chose qu’il fait, c’est d’acheter du ciment pour construire une maison et améliorer sa qualité de vie et celle de sa famille. Nous sommes donc convaincus que ces pays continueront d’afficher une consommation importante du ciment à moyen et long terme.

Un dernier mot concernant votre cours de bourse. Une préoccupation de vos actionnaires concerne votre niveau de dette. Que leur diriez-vous pour les rassurer ?
La réduction de l’endettement est une priorité essentielle du groupe. En 2011, nous réduirons notre dette de deux milliards d’euros au moins en actionnant plusieurs leviers, dont de nouvelles économies, une amélioration du besoin en fonds de roulement, des désinvestissements, et une réduction de nos investissements.
Lafarge a complètement fait sienne une culture managériale des couts. A la fin de l’année 2011, nous aurons réalisé au total plus d’un milliard d’euros de réductions structurelles de coûts.
Nous voulons atteindre un ratio de cash flow sur dette nette au dessus de 20%, puis nous souhaitons rapidement remonter ce ratio à 28%, ce qui est notre objectif à terme.

Pensez-vous que votre cours de bourse reflète les fondamentaux de la société ?
Notre business model est extrêmement solide. La combinaison de la crise et de l’endettement ont pesé sur le cours. Nous espérons une progression de ce cours grâce à nos bons résultats et à nos perspectives positives.

Propos recueillis par Imen Hazgui