Interview de Emilie Da Silva : Co-gérante du fonds Nova Europe (Alto Invest)

Emilie Da Silva

Co-gérante du fonds Nova Europe (Alto Invest)

Il n'est pas plus risqué d'investir dans des valeurs européennes que dans des sociétés françaises

Publié le 19 Septembre 2014

Pouvez-vous nous présenter le fonds Nova Europe que vous gérez en compagnie d’Antoine Valdès, le président d’Alto Invest ?

Le fonds Nova Europe est un fonds de conviction sur les petites et moyennes capitalisations européennes, avec un critère de sélection qui est celui de l’innovation. L’idée n’est pas de sélectionner uniquement des sociétés technologiques mais de dénicher des approches innovantes, tous secteurs confondus, qui assurent à ces sociétés une croissance à moyen terme. Nous avons actuellement 27 valeurs en portefeuille principalement dans les secteurs de la santé, de l’IT, des logiciels, mais aussi de l’industrie. Nous ne souhaitons pas aller au-delà de 40 lignes car nous voulons pouvoir suivre chacune de ces valeurs, rencontrer leurs dirigeants… A part en France il y a assez peu de réunions d’investisseurs dédiés aux small cap. Lorsqu’on veut investir sur des boîtes allemandes ou italiennes il faut aller les voir directement sur place.

N’est-ce pas un pari risqué d’investir majoritairement dans des sociétés étrangères, qui plus est des petites et moyennes capitalisations ?

Il n’est pas plus risqué d’investir dans des valeurs européennes que dans des sociétés françaises. Même si la France a beaucoup de belles sociétés, il y a aussi des leaders à l’étranger ! Dans le cadre de la construction d’un portefeuille, la diversification géographique permet d’atténuer les risques. Au sein du fonds Nova Europe, nous sélectionnons des dossiers très internationaux qui réalisent une grosse part de leur chiffre d’affaires hors de leur pays d’origine. Nous veillons aussi à garder un certain équilibre en termes de capitalisations. Si le gros du portefeuille est constitué de moyennes capitalisations (entre 250 millions et 1 milliard d’euros), nous avons aussi des plus grosses sociétés dont le profil de croissance est plus faible et moins risqué.

Quelles sont, par pays, les valeurs les plus emblématiques du fonds ?

En Allemagne, je citerai la société Nemetschek, un éditeur de logiciels pour les architectes et l’industrie du bâtiment. C’est le leader sur ce marché avec une forte capacité d’innovation. La société a atteint les 100 millions de chiffre d’affaires au premier semestre avec une marge Ebitda de 25%, c’est donc une entreprise très rentable. D’ailleurs le titre a progressé de 66% depuis le début de l’année.

En Suède, nous sommes actionnaires de VitroLife, le numéro deux mondial des instruments et solutions pour la fécondation in vitro. Là-aussi, c’est un marché en croissance structurelle qui permet à la société de croître elle-même de 5 à 10% par an. Elle vient de publier son 41e trimestre consécutif de croissance et plus de 95% de son chiffre d’affaires est réalisé en-dehors de Suède. Alors, évidemment, elle est un peu chère : elle se paie quatre fois le chiffre d’affaires 2015, et 16 fois le résultat d’exploitation. Néanmoins nous considérons qu’il y a peu de risque de déception sur ce dossier.

Au Royaume-Uni, nous avons récemment investi dans RWS Group, le leader mondial de la traduction de brevets. Là-encore il s’agit d’un marché en forte croissance avec de fortes barrières à l’entrée. RWS a les compétences à la fois techniques et linguistiques pour traduire des brevets très complexes, en particulier dans le domaine de la santé et des biotechnologies. C’est un business model hyper-résilient, même en temps de ralentissement économique. La société affiche une marge opérationnelle de 20%.

En Italie, nous sommes actionnaires de la société IMA, qui fabrique des machines pour la production d’emballages spéciaux (sachets de thé, emballages pharmaceutiques, etc). Ce sont des machines uniques au monde, très innovantes, qui permettent à la société d’afficher une rentabilité supérieure à 10% ce qui pour un groupe industriel est très bien. Par ailleurs la société est faiblement endettée et sa valorisation reste raisonnable.

Propos recueillis par François Schott