Interview de Christian Jimenez : Président de Diamant Bleu Gestion

Christian Jimenez

Président de Diamant Bleu Gestion

Le Cac 40 pourrait atteindre 6000 points à la fin de l'année

Publié le 20 Avril 2015

Quel regard portez-vous sur le parcours des actions françaises depuis le début de l’année ?
Le parcours a été remarquablement haussier. Alors qu’à mercredi soir l’Eurostoxx enregistrait une performance de 21%, le Cac a bondi de 22%.

Avez-vous été surpris par l’ampleur de la hausse ?
Nous avons effectivement été quelque peu surpris. Nous étions très positifs sur les actions françaises, comme sur les actions européennes, en début d’année. Nous ne pensions cependant pas que la hausse serait si rapide. L’anticipation puis le déclenchement du programme de quantitative easing de la BCE ont clairement alimenté le mouvement.

Pensez-vous que le marché a exagéré ?
Je ne le pense pas. Entre le creux du 9 mars et le pic de l’automne 2009, les actions françaises avaient monté de plus de 60%. Le rallye de ce début d'année se veut dont très important mais pas exceptionnel.

De quelle manière jugez-vous la valorisation actuelle des actions françaises ?

Cette valorisation a été portée à un niveau qui reste raisonnable compte tenu de la perspective d'un affermissement de la reprise sur fond d’un euro déprécié, d’un prix du pétrole déprimé, de taux de refinancement extrêmement bas. Le marché n’est présentement ni sous payé, ni surpayé.

A quelle progression des bénéfices vous attendez-vous pour les sociétés
françaises, sachant que c’est une condition sine qua non pour valider le rebond ?
Une progression de 15% telle que l’admet le consensus me parait plausible.

De quelle manière analysez-vous les corrections de jeudi et de vendredi ?
Le rallye a été très fort. Il est normal que nous connaissions des temps de pause. Nous faisons face en l’occurrence à un de ces épisodes, du fait notamment du dossier grec. Mis à part les micro phénomènes ponctuels, la tendance devrait demeurer positive.

En cumulé, jusqu’où pourrait aller la correction ? Quel potentiel de hausse additionnelle envisagez-vous ?

Nous pourrions avoir un rallye sur l’ensemble de l’année qui avoisine les 40%. Le Cac 40 pourrait s’établir à 6000 points, contre 4273 points fin 2014.

Nous aurions donc une expansion des multiples ?

Il y aura probablement une expansion des multiples en effet sur fond du quantitative easing de la BCE, de la multiplication d’opérations de fusion-acquisition ou encore d’opérations de rachat d’actions.

Quels principaux risques identifiez-vous dans votre radar qui pourrait compromettre le scénario d’ensemble ?

Je pense que le cas grec devrait finir par bien se terminer. Toutefois la probabilité que la Grèce sorte de la zone euro est en train de se renforcer sérieusement, même si elle reste en dessous de 50%. Dans le cas où cette sortie viendrait à se concrétiser, même si nous pouvons légitimement penser que cela finira par rentrer dans l’ordre à échéance, des perturbations pourraient être observées sur les marchés.
En théorie, nous ne sommes pas à l’abri d’un risque d’erreur de communication de la Réserve fédérale américaine eu égard à son processus de normalisation de la politique monétaire. Dans la pratique, nous avons toute confiance dans l’équipe dirigeante de la Fed et sommes d’avis qu’elle sera suffisamment habile pour éviter cette erreur.

Au niveau français, des doutes sont palpables quant à la capacité du gouvernement français à mettre en œuvre les réformes requises pour assainir ses finances publiques. Pensez-vous que cela pourrait amener à un dérapage sur le segment des taux souverains français et affecter la Bourse française en conséquence ?
La menace existe bel et bien. Le gouvernement avait conscience de la nécessité d’implémenter des réformes. Il a commencé à le faire puis il semble qu’il ait été cassé dans son élan par l’environnement favorable dans lequel il s’inscrit. La politique actuelle de liquidité abondante peut être remise en cause à tout moment, poussant à la hausse l’euro et les taux. Le prix du baril peut également connaitre une nouvelle envolée si des risques géopolitiques venaient à s’accentuer ou à se matérialiser.

Croyez-vous que la France est protégée jusqu’au moins septembre 2016, autrement dit jusqu’à la fin du QE de la BCE ?

Je serais étonnée que le QE de la BCE soit déployé jusqu’en septembre 2016. Les premiers achats ont eu de telles retombées que nous pourrions voir l’activité s’accélérer et l’inflation remonter plus vite que prévu. Cela pourrait inciter la BCE à réduire la voilure de son programme, voire à l’arrêter avant la date butoir avancée. Le marché pourrait anticiper ce phénomène avant la fin de l’année 2015.
La vulnérabilité du segment des taux souverains français pourrait alors s’amplifier à ce moment là. Nous ne prévoyons pas de dérapage d’ici fin décembre dans ce compartiment mais des tensions pourraient commencer à apparaitre.
Actuellement nous sommes encore exposés aux taux de la France. Nous surveillons cependant nos positions comme du lait sur le feu en nous disant que dès que le marché se mettra à pricer une fin prématurée du QE de la BCE, il nous faudra nous couvrir pour réduire notre sensibilité.

Quelles sont vos principales thématiques d’investissement ?

Nous sommes clairement surpondérés sur les actions européennes, notamment sur les actions françaises.
Une première thématique que nous jouons est celle des dividendes. Nous plébiscitions en cela le secteur de l’assurance avec Axa, le secteur immobilier avec Unibail, le secteur de la santé avec Sanofi.
Une autre thématique sur laquelle nous sommes positionnés est celle des valeurs qui tirent avantage de la baisse de l’euro, avec Atos, Capgemini ou Dassault Système.
Une dernière thématique qui guide notre allocation, est celle des valeurs portées par le redémarrage du cycle du crédit. Nous avions jusqu’à récemment à la fois les actions de Renault et Peugeot. Nous les avons vendues à la suite de leur notable parcours boursier.

Propos recueillis par Imen Hazgui