Interview de Jean-Marc  Maringe : Gérant du fonds AXA WF Framlington Human Capital

Jean-Marc Maringe

Gérant du fonds AXA WF Framlington Human Capital

La bonne gestion du capital humain peut permettre une plus forte performance financière

Publié le 04 Janvier 2018

Pouvez-vous nous décrire brièvement sur quelle idée maitresse repose le fonds AXA WF Framlington Human Capital ? Quel fil conducteur régit la sélection des titres au sein de ce véhicule d’investissement ?
La thématique de ce fonds repose sur l’idée qu’une société qui mène une bonne politique pour gérer son capital humain est de nature à potentiellement générer une meilleure productivité et une plus forte performance financière. La qualité des conditions de travail, la gestion des carrières et des formations, et le développement de l’emploi sont autant de piliers fondamentaux qui tendent à diminuer le taux d’accidents au travail et le taux de rotation du personnel et à stimuler en conséquence la marge opérationnelle d’une entreprise.

Y a-t-il des études qui corroborent ce lien de cause à effet ?

Absolument. Plusieurs travaux d’universitaires, notamment dans le monde anglo-saxon (Saratoga Institute, Accenture, McKinsey…), ont mis en lumière ce lien. Nous avons réalisé de nombreuses simulations qui vérifient l’impact réel des décisions prises par la société dans le domaine de la gestion de son capital humain sur le profil de sa marge opérationnelle.
Qui plus est, le volet social des entreprises cotées étant depuis longtemps étroitement surveillé au sein de l’équipe de gestion d’AXA IM, nous avons été en mesure d’accumuler une masse importante de données empiriques qui atteste de la corrélation entre la bonne gestion du capital humain et le développement
prospère d’une entreprise sur un plan microéconomique et sur le terrain boursier.

Quelle est la profondeur de votre univers d’investissement ?

Nous évaluons notre univers d’investissement de départ à environ 550 titres. L’essentiel des sociétés auxquelles nous nous intéressons sont de moyenne capitalisation, de l’ordre de 7 milliards d’euros en moyenne.
Le scoring, c’est-à-dire la notation d’une société, de la gestion du capital humain nous conduit à réduire le segment dans lequel nous sommes susceptibles de puiser à 320 titres.
La prise en compte des facteurs financiers nous amène in fine à retenir environ 60 valeurs dans le portefeuille.

Qu’en est-il du taux de rotation du portefeuille ?

Le taux de rotation – qui mesure le volume des transactions effectuées par le gérant sur une année - se situe autour de 40%. Il s’explique pour moitié par des considérations de valorisation financière -le remplacement de titres ayant atteint leur objectif de cours-et pour moitié par un changement du scoring de la gestion du capital humain. Dans une moindre mesure, la taille de la capitalisation peut également avoir une certaine influence.

Quels sont selon vous les atouts phares de votre processus d’investissement ?

Notre grille d’analyse et la relation de proximité que nous avons avec les entreprises. Nous nous efforçons de mettre l’accent sur des sujets souvent mal appréhendés par le marché alors qu’ils sont clés dans la réalisation d’une réussite pour une entreprise.
Ainsi, nous veillons à percevoir la productivité dans une acception élargie. Par exemple, au-delà d’une simple diminution des effectifs, nous l’appréhendons en fonction des actions prises par la direction en vue d’encourager les salariés, à chaque étape de la chaine de production, à s’investir davantage dans leur activité.
Parmi les signaux qui nous renseigneront sur la tendance dans laquelle s’inscrit l’entreprise nous trouvons le turnover des salariés, le taux d’absentéisme, la capacité d’attirer les talents…

Le volume et la qualité des informations disponibles jouent-ils sur votre sélection de valeurs ?

Indéniablement. La communication des entreprises sur la gestion de leur capital humain est variable. Les entreprises françaises sont plutôt enclines à livrer des éléments sur ce thème. Il en est différemment des entreprises anglo-saxonnes.
C’est l’une des raisons phares pour lesquels le fonds a un biais sur les valeurs françaises.

La performance annualisée du fonds est plus importante sur cinq ans que sur dix ans. Doit-on en tirer un enseignement ?

Aucunement. Le fonds a été lancé à la fin de l’année 2007, autrement dit juste avant l’éclatement de la crise des subprimes en 2008. Comme la plupart de nos concurrents, nous avons été échaudés par les turbulences boursières qui ont rythmé cette crise.

La composition géographique du fonds montre une large dominance Européenne, alors que les Etats-Unis sont peu présents (2% de votre allocation)*. Pourquoi ?

Le fonds a clairement une dimension européenne. Nous n’avons pas vocation à sortir de cette zone d’investissement.

S’agissant de la répartition sectorielle du portefeuille, on dénote un positionnement sur quatre secteurs en particulier, l’industrie, les services financiers, les matériaux de base. En revanche, la technologie est relativement peu investie. Pour quelle raison ?

Les dominantes sectorielles sont étroitement liées à la configuration des marchés financiers. Face à l’amélioration de la conjoncture économique, il a été jugé opportun de s’orienter davantage vers des secteurs cycliques comme l’industrie et les matériaux de base.
Ainsi à une première analyse, basée sur l’évaluation d’une tendance structurelle de bonne gestion du capital humain, s’ajoute une seconde analyse axée sur une vision plus conjoncturelle.
A l’horizon d’un an, comment voyez-vous ce positionnement sectoriel évoluer ?
Pour l’heure nous sommes plutôt dans une démarche de prise de profits dans les secteurs cycliques. Nous réallouons nos plus-values sur des secteurs plus défensifs, c’est-à-dire moins sensibles aux soubresauts des marchés, comme la consommation de base ou la santé.

Cela augure-t-il un changement de style de votre part ?

Absolument pas.
Bien que nous n’ayons pas d’inquiétude particulière sur le devenir des marchés financiers en 2018, nous devons composer avec des valorisations qui dans certaines sphères apparaissent très tendues. Nous faisons attention de nous repositionner sur les titres qui présentent le meilleur couple rendement-risque.

Les premières lignes du portefeuille sont : MTU Aero Engines, Erste Group Bank, SEB, Natixis**. Quelques mots au sujet de ces valeurs ? Qu’est ce qui a motivé leur sélection ? Leur pondération ?
Si nous prenons une société comme Seb, le titre est connu par l’équipe de gestion d’AXA IM depuis longtemps. La société présente une grande diversité géographique et une vaste gamme de produits innovants qui lui confèrent de réels avantages compétitifs et des sources de revenus réguliers. De multiples mesures ont été prises qui démontre la conviction de la direction de miser sur le développement durable. Sur le plan social, des annonces ont ainsi été faites pour améliorer la formation du personnel et faire mieux correspondre l’offre et la demande d’emplois au sein du groupe et mieux exploiter des synergies de développement.

MTU Aero Engines est une société allemande intéressante. Spécialisée dans l’aéronautique, plus précisément dans la fabrication de moteurs avec une partie service et maintenance, l’entité a su adopter la bonne démarche pour tirer vers le haut l’ensemble de ses employés, quel que soit leur niveau au sein de la chaine de conception, avec une culture de la promotion interne très affutée.

Les encours s’élèvent à 512 millions d’euros à fin décembre 2017***. A votre avis, quelle est la capacité maximum de ce fonds ?

Le fonds peut aisément doubler sa taille sans que cela engendre un quelconque problème de liquidité.

Quels principaux risques identifiez-vous dans le pilotage de ce fonds ? Comment vous efforcez-vous de les appréhender ?

Le fonds étant investi en grande majorité dans des actions européennes, les risques sont principalement ceux identifiés sur les marchés boursiers européens.
Ceci étant, nous sommes d’avis que la prime donnée à la qualité des titres qui composent notre portefeuille nous permettrait le cas échéant de résister davantage à une correction des marchés si celle-ci devait avoir lieu.

*Source : Morningstar, situation au 31/12/2017.
** Source : AXA IM, situation à décembre 2017. Les sociétés citées sont données à titre illustratif uniquement et ne constituent ni une recommandation à l’achat ou à la vente ni de l’analyse financière.
****Source : AXA IM.

Le Fond AXA WF Framlington Human Capital est autorisé à la commercialisation en France. L’horizon d’investissement recommandé est de 8 ans.

Propos recueillis par Imen Hazgui