Interview de Pascal Bantegnie : directeur des relations investisseurs Alcatel

Pascal Bantegnie

directeur des relations investisseurs Alcatel

Nous attendons des synergies de coûts de l’ordre de 1,4Md€ sur 3 ans, soit 7 points de marge

Publié le 02 Août 2006



Alcatel affiche des revenus en hausse de 7,6% (3 384 millions d’euros) au second trimestre 2006, mais le groupe affiche également un recul de ses marges. A quoi imputez-vous ces résultats ?
Effectivement, Alcatel enregistre une bonne croissance au second trimestre, au-delà de celle du marché (5% en moyenne), et le groupe continue de gagner des parts de marché. Quant à la réduction des marges, elle est à relativiser. En valeur absolue, elle s’élève à 263 millions d’euros, à un niveau inchangé par rapport à l’an passé, et compte tenu d'un chiffre d'affaires en hausse de 7,6%, le taux est en repli à 7,8%, contre 8,4% en 2005. Par ailleurs, sur le marché mobile, Alcatel fait face à un environnement de plus en plus compétitif, et, contrairement à certains de ses concurrents, refuse tout positionnement agressif et préfère rester sélectif dans ses contrats. Et pour finir, il faut également prendre en compte que nous continuons d’investir dans les technologies pour s’assurer des positions clés dans le futur.

Dans la téléphonie fixe, les ventes d’Alcatel renouent avec la croissance (+11,4%, à 1 363 millions d’euros), notamment grâce à votre offre « triple play ». Quel est votre sentiment à cet égard ?
D’abord, je tiens à souligner que nos concurrents ont largement désinvesti dans le secteur de la téléphonie fixe et qu’Alcatel a été le premier à croire à l’offre triple play et détient une position de leader avec plus de 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel. Nous avons commencé à y investir dès 2001-2002. Mais plus généralement, Alcatel gagne des parts de marché dans tous les segments. Nous avons réalisé de très bonnes livraisons dans l’ADSL (6,7 millions de lignes) et renforcé notre position dans le secteur des routeurs IP (nouveaux contrats remportés aux Etats-Unis, au Danemark, en Espagne, au Venezuela, en Malaisie et en Thaïlande). Sur le segment de l’optique, Alcatel reste numéro un depuis cinq ans. D’ailleurs notre dernier contrat GPON (Gigabit Passive Optical Network) avec Verizon va nous permettre de nous renforcer aux Etats-Unis.

Votre politique de réduction des coûts continue à porter ses fruits et votre situation financière s’est nettement améliorée depuis 2002. Quels sont, aujourd’hui, les principaux vecteurs de réduction des dépenses  que le groupe privilégie ?
Pendant la crise, Alcatel a choisi de réduire ses effectifs et ses coûts de process, en particulier, ses coûts d’approvisionnement. Maintenant, nous essayons de diminuer nos dépenses de R&D en faisant le développement de produits matures dans des pays tels que la Chine, l’Inde ou certains pays de l’Est. Mais il y a toujours une grande part de l’activité R&D qui se traite en Europe ou aux Etats-Unis. Par exemple, en ce qui concerne les routeurs IP, il est inconcevable de ne pas être basé sur la Côte Ouest américaine. Pour l’autre vecteur de réductions des coûts, je dirais l’optimisation organisationnelle de notre groupe (coûts administratifs, notamment).

Au troisième trimestre, Alcatel table sur une stabilité de la marge opérationnelle de 7,5%, soit en dessous des prévisions à 8,8%. En glissement annuel, doit-on s’attendre à une marge inférieure à 9%, alors que les analystes rappellent qu’elle était de 9,1% en 2005 ?
En 2005, notre marge comprenait des cessions d’actifs et hors plus-value, elle s’établissait à un peu plus de 8%. Il faut comparer ce qui est  comparable. Quant à nos prévisions pour le troisième trimestre, elles reposent effectivement sur une stabilité de la marge opérationnelle, à 263 millions d’euros en valeur absolue. Etant donné que le projet de rapprochement avec Lucent devrait être finalisé au 4ème trimestre, nous ne commenterons plus les perspectives sur  le 4ème trimestre.

Que répondez-vous aux analystes qui estiment que le risque d'exécution de votre rapprochement avec Lucent est très important et le prix payé trop élevé au regard des résultats décevants de votre partenaire américain?
Nous avons une grande confiance que le projet de rapprochement aboutisse. D’autant que la fusion est rationnelle. Nous attendons des synergies de coûts de l’ordre de 1,4 milliard d’euros (dont 55% résultant de la baisse des effectifs) sur trois ans. Soit sept points de marge ou la somme des profits opérationnels des deux sociétés à ce jour. Et sans les chiffrer, nous attendons également des synergies de revenus étant donné que la nouvelle entité pourra atteindre de nouveaux clients jusque là inatteignable faute de la technologie suffisante. Il reste toutefois plusieurs étapes, à savoir les deux Assemblées générales du 7 septembre et une étape réglementaire.

Maintenant, concernant le prix par Alcatel pour Lucent, il est vrai que le ratio d’échange a été calculé sur une période de bourse précédant l’annonce du rapprochement, et les termes de l’accord ne prévoient pas la possibilité de le changer. Mais le prix prend également en compte les anticipations de résultats futurs de Lucent, et nous avons avec notre banque-conseil, Goldman Sachs, posé des hypothèses de calcul très prudentes.

Dans la défense, envisagez-vous de vous renforcer au capital de Thales à court-moyen terme ?
Clairement, nous allons devenir le deuxième actionnaire, derrière l’Etat, avec 21,6% du capital.

Dans les satellites, avez-vous engagé des pourparlers avec EADS en vue d’un mariage avec Astrium ?
Ce qui nous préoccupe c’est de finaliser notre partenariat avec Thales,. 

Un dernier mot pour vos actionnaires ?
On pense que le projet avec Lucent va créer de la valeur et impacter favorablement sur le résultat net. C’est donc positif pour nos actionnaires.

laetitia