Interview de Christophe Bonduelle : Président de Bonduelle

Christophe Bonduelle

Président de Bonduelle

En matière d'acquisition, il faut laisser de la place à l'opportunisme

Publié le 11 Mars 2011

Pouvez-vous commenter vos résultats du premier semestre 2010-2011 ?
Nous sommes globalement satisfaits de nos résultats semestriels par rapport à ce que nous attendions. La baisse du résultat net avait été annoncée, le chiffre d’affaires a progressé de 16,4%, à 884,6 millions d’euros, le résultat opérationnel courant a été meilleur que prévu, en baisse de 24% au lieu du repli de 30% que nous avions prévu. Il faut intégrer dans ces résultats semestriels des éléments exceptionnels non récurrents comme la fermeture de l’usine de Westmeerbeek en Belgique, capacités de production dont nous n’avons plus besoin. Il faut rappeler que le groupe a connu un trou d’air en 2010 du fait de la situation de surstocks en Europe et en Amérique du Nord qui a entraîné une baisse des prix. Nous avons joué de malchance avec une saison (campagne de récoltes) 2010 déplorable au niveau de la météo, ce qui a conduit à des coûts de production élevés.

La zone Europe semble présenter encore quelques difficultés en termes de reprise, avec une croissance de seulement 0,2% à taux de change constant (contre +5,1% pour la zone hors Europe) au premier semestre ?
Si l’on prend le marché européen, dans la branche Conserves depuis plusieurs années on assistait à une baisse des marchés qui s’est résorbée petit à petit depuis trois ans pour enfin s’arrêter. Dans les produits frais (légumes frais élaborés), la reprise se fait en France, en Italie, et en Allemagne. Concernant le surgelé, la moitié des ventes en Europe est réalisée auprès de la restauration hors foyer qui connaît à nouveau une croissance de son chiffre d’affaires. Les chiffres négatifs de la branche Surgelés s’expliquent notamment par une pénalisation liée au taux de change entre les Etats-Unis et le Canada, mais aussi par la poursuite prévue du transfert de volumes vers la joint-venture surgelé MDD Gelagri.

Comment ont évolué vos activités sur les marchés émergents lors de ce semestre ?
Sur les marchés émergents, Bonduelle a connu une croissance des ventes de 36% en Europe de l’Est et Balkans, de 51% au Brésil en chiffre d'affaires (+42% en volume), et une hausse très significative de son activité tant en volume qu’en valeur en Europe Orientale. En Russie, l’activité de Bonduelle a souffert pendant un an et demi, mais elle a repris cette année (+37,1%).

Avez-vous des objectifs chiffrés (part de chiffre d’affaires) pour les pays émergents à moyen terme ?
Il y a un an, la France représentait environ un tiers du chiffre d’affaires global, mais avec l’acquisition de France Champignon cette part est passée à 40%. A terme, la part de la France dans le chiffre d’affaires total pourrait passer à 25%. Actuellement, les pays de l’Union Européenne représentent les trois quarts du chiffre d’affaires global, tandis que la zone hors Europe correspond aux 25% restants. Mais, d’ici 3 à 5 ans, cette zone hors Europe pourrait représenter environ 35% du chiffre d’affaires total. Bonduelle a une vocation mondiale, et il faudra aller en Asie un jour, mais il ne faut pas courir trop de lièvres à la fois et cela pourrait se faire d’ici 3 à 5 ans. Cependant, ce développement dépendra aussi des opportunités d’expansion qui se présenteront. Concernant l’Asie, et en particulier la Chine, il vaut mieux laisser les autres essuyer les plâtres avant de se lancer. La Chine est un marché au potentiel important du fait de sa population mais aussi de la faiblesse relative de la surface de ses terres cultivables proportionnellement à sa population, alors que l’Inde a beaucoup de surface agricole.

Après le rachat de France Champignon en avril 2010, avez-vous d’autres cibles d’acquisitions en vue ?
Traditionnellement, Bonduelle a toujours maintenu une politique de relatif équilibre entre croissance interne et croissance externe. Nous comptons rester dans le domaine du légume. En matière d’acquisition, même s’il reste quelques opportunités en Europe, on a fait le plein. Ainsi, nous viserions plutôt la zone hors Europe. Il faut aussi laisser la place à l’opportunisme, ne pas être trop proactif. Je n’ai jamais confié de mandat acheteur à quiconque. En moyenne, nous avons trois ou quatre dossiers de possibles acquisitions à l’étude.

Comment se déroule ce début d’année 2011 pour Bonduelle ?
Nous avons relevé nos prévisions en matière de rentabilité opérationnelle courante, qui devrait être proche de 80 millions d’euros, et notre objectif de chiffre d’affaires annuel de 1,7 milliard d’euros à 1,720 milliard. Nous sommes sur un trend positif au début de 2011. En revanche, on passe d’un extrême à l’autre : d’une situation de surstock à du sous-stock du fait de la mauvaise campagne de récolte 2010 (inondations en Hongrie, incendies en Russie), et nous allons devoir faire moins de promotions. La situation devrait être tendue au printemps prochain, en particulier pour le maïs. En parallèle, il faut faire face à la forte hausse des prix des matières premières agricoles et de ceux des matériaux d’emballage.

Propos recueillis par Claire Lavarenne