Interview de Eric Bleines : Responsable du pôle Actions de CCR AM

Eric Bleines

Responsable du pôle Actions de CCR AM

Une de mes principales convictions, la société Eurotunnel

Publié le 01 Avril 2011

Une valeur que vous appréciez particulièrement est Eurotunnel, pourquoi ?
Eurotunnel est un groupe qui a vécu des périodes très difficiles en raison d’une structure bilantielle déséquilibrée. Plus récemment la mauvaise conjoncture économique, et l’incendie qui s’est déclenché l’année dernière à l’intérieur du tunnel n’ont pas aidé le titre.

Cette période chahutée est maintenant révolue nous semble-t-il. Le changement managérial a apporté de la sérénité dans cette entreprise grâce à une importante restructuration bilantielle et opérationnelle et grâce à un bénéfice par action de la société qui devrait passer d’un niveau négatif de 10 centimes en 2010 à un niveau positif ) partir de 2011.

Quels sont les sources de croissance des bénéfices ?
Ces sources sont multiples et diverses. La première source d’amélioration des bénéfices réside dans la sensible baisse de la charge de la dette financière. L’endettement d’Eurotunnel dette est passé de 9,1 milliards d’euros avant 2007 à 3,4 milliards d’euros aujourd’hui.

Ensuite, le redressement des Navettes Camions (qui s’étaient engagés auprès des ferries afin de disposer de capacités de transport suffisantes pendant la durée des travaux du Tunnel) devrait également constituer un moteur non négligeable. Des effets positifs peuvent également provenir du développement du trafic Eurostar avec l’ouverture de nouvelles lignes à grande vitesse (Amsterdam et Cologne) ainsi que du développement du marché du Fret Ferroviaire au niveau européen, sur la base d’un réseau à grande vitesse et de l’ouverture à la concurrence du transport international de passagers.

Quid de la rentabilité ?
Des investissements initiaux ont été effectués. Aujourd’hui, ils devraient restés limités aux opérations de maintenance en ce qui concerne le tunnel (pour une enveloppe de 40-50 M€).

De ce fait, toute l’activité générée supplémentaire à travers les flux du tunnel devrait être très rentable à l’avenir. Actuellement, la hausse sensible du prix du pétrole permet à Eurotunnel de certainement améliorer ses marges puisque les ferries sont en train de monter leurs prix.

Quels sont les risques que vous entrevoyez sur cette valeur ?
Nous sommes face à une concession dans un tunnel. Le risque est que la concession soit endommagée et que l’on ne puisse plus l’exploiter.
Un autre risque est d’ordre économique en rapport avec la conjoncture.
Par ailleurs le fonctionnement de la concession est dépendant de l’approvisionnement électrique. Il faut donc dans une certaine mesure que l’électricité reste compétitive par rapport au fuel.

Quelle est la prime de risque à l’heure actuelle ?
Relativement importante. Nous avions acheté le titre sur un niveau de rentabilité sur capitaux employés de 12,5%. Le marché valorise en moyenne aujourd’hui les autres types de concessions (autoroutes) à 8,5%. On a donc une prime de risque de 50%, ce qui me semble élevé.

Quel potentiel de progression escomptez-vous ?
Le titre pourrait fortement s’apprécier. Outre les éléments concernant son chiffre d’affaires et ses marges, je retiendrai la structure capitalistique de l’entreprise. Goldman Sachs détient 17% du capital. La société n’est donc pas contrôlée.

Du fait des pertes des années précédentes, la société bénéficie de 2,4 milliards d’euros de report en France, et de 4,2 milliards de report déficitaire au Royaume-Uni. Elle peut donc faire l’objet d’intérêt spéculatif important de la part d’opérateurs réalisant d’importants bénéfices sur ces pays et recherchant une optimisation fiscale.

Le cours pourrait aller jusqu’à 8,5 euros d’ici 12 mois. Nous sommes à 7,43 euros.

De quelle manière a évolué votre exposition sur la valeur et depuis quand ?

Nous ne sommes pas exposés sur la valeur depuis longtemps. Nous attendions les résultats de l’année publiés en février. Actuellement, le titre représente notre deuxième position en portefeuille avec une pondération de 4,5%.

Propos recueillis par Imen Hazgui