Interview de Alain Picard : directeur général adjoint de Geodis

Alain Picard

directeur général adjoint de Geodis

Les flux internationaux sont en croissance de 8% sur l’année

Publié le 02 Mars 2007

Les chiffres que vous avez publiés sont ressortis supérieurs aux attentes du marché. Quel commentaire feriez-vous ?

Sur les chiffres que nous venons de publier, il y a deux éléments à retenir :

D’abord, en ce qui concerne le chiffre d’affaires en croissance de 5%, il faut retenir la croissance des flux internationaux, c’est-à-dire, tout ce qui se rapporte à l’import-export et tout ce qui passe à un moment ou à un autre une frontière comme la distribution des PC pour IBM sur tout le périmètre européen.

Ces flux internationaux sont en croissance de 8% sur l’année, avec une croissance sur les trois dernières années de 40%, ce qui est largement supérieur à la croissance du CA du groupe de 17% sur les trois dernières années.

L’internationalisation des flux est un élément clé de la croissance du CA du groupe que l’on peut d’ailleurs rattacher au déplacement des sites de production. On importe en effet de plus en plus de produits issus des pays d’Europe de l’Est et d’Asie.

Le second élément réside principalement dans le redressement des foyers de pertes, notamment en Italie et en Grande-Bretagne, ainsi que sur les bons résultats en France.

La hausse des prix du carburant a-t-elle pesé sur votre activité ?
Le carburant représente en réalité un chiffre assez faible, de l’ordre de 80 millions d’euros de CA, c’est-à-dire à peine 2% du CA total du groupe. Cette dépense correspond évidemment à un surcoût, mais elle est aujourd’hui entièrement compensée par ce que nous retenons aux clients, notamment grâce aux dispositions législatives qui ont été prises en début d’exercice 2006, permettant une indexation des prix du gazole auprès du client.

En résumé, la hausse des prix du carburant a effectivement pesé, mais elle a été complètement absorbée par le client. En termes de résultats ce n’est donc pas significatif.

Où en êtes vous de l’acquisition de TFM ? Quel coût pensez-vous devoir assumer pour son intégration ?
L’acquisition de TFM est rendue effective sur l’exercice 2007, puisque les conditions suspensives ont été levées en février. L’ensemble des coûts relatifs à cette acquisition serait de l’ordre de 30 à 35 millions d’euros et serait stabilisé en grande majorité à hauteur de 25 millions d’euros sur l’exercice 2007.

Ces coûts sont principalement des éléments de pertes de marge. La situation est la suivante : nous fonctionnons parfois dans certains pays avec des agents et non des filiales. Donc quand TFM a une filiale dans ce même pays, nous allons cesser de travailler avec l’agent et là, nous perdrons du CA et de la marge. Mais progressivement, ça va redémarrer.

Donc il y a cet aspect, ainsi que des coûts d’ajustement de structure et éventuellement quelques ajustements sur la partie des systèmes d’informations, parce que nous avons deux systèmes d’information : un chez TFM et un autre chez Geodis. Il faudra faire le choix de l’un ou l’autre, donc déprécier l’un des deux.

Quelles perspectives en attendez-vous ?
On attend des gains de près de 35 millions d’euros en année pleine, à l’horizon 2009. Cela correspond :
au développement du CA entre TFM et Geodis, car nous n’avons ni les mêmes zones de couvertures ni les mêmes clients,
au développement des liens sur les achats de sous-traitance : on consommera sur 1,6 milliards d’euros de CA, 1,3 milliards d’euros de coût de sous-traitance. On espère gagner jusqu’à 15 millions d’euros.
à la réduction de quelques coûts complémentaires tels que les frais de localisation de bureaux, la meilleure gestion de hub etc.

Au total, les gains représenteront 30 à 35 millions d’euros de synergie.

Par ailleurs, le gros avantage de TFM réside dans le fait qu’il dispose d’un réseau fermé, avec très peu d’agents et beaucoup de filiales. TFM est également très présent sur l’ensemble des continents, en Amérique du Nord et du Sud, en Asie et en Europe, notamment dans des pays où Geodis ne se trouve pas encore telle que la Scandinavie, la Suède et l’Allemagne.

TFM nous permet donc d’avoir vraiment une couverture mondiale, alors que nous étions jusqu’à présent plutôt concentrés en Europe et en Asie. Cela signifie que l’on sera capable de proposer à nos clients une bien meilleure couverture, plus directe grâce aux filiales de Geodis-Wilson (entité regroupant Geodis et TFM).

Quels objectifs visez-vous avec l’augmentation de capital que vous venez de réaliser, outre l’acquisition de TFM ?
L’augmentation de capital a été très liée à l’acquisition de Wilson (ex-TFM), et très liée également à la nécessité d’avoir des investissements continus sur les exercices de 2007 à 2008 dans le réseau de messageries en France, du fait de la forte augmentation des volumes que nous avons à traiter.

Sur les quinze dernières années, Geodis a ainsi connu une croissance de 30%, en grande partie due aux volumes, il est donc nécessaire de rénover le réseau d’agences. Cette augmentation de capital nous garantit en outre un bilan permettant d’absorber l’acquisition prochaine tout en continuant à développer les investissements sur le réseau d’agences.

Comment envisagez-vous l’évolution de votre activité pour l’exercice 2007 ? Quelles sont vos priorités pour cette année ?
Il s’agit tout d’abord de l’intégration de TFM dans le groupe, dans le réseau de « freight forwarding » [ndlr : entreprise mandatée par l'expéditeur ou le destinataire d'une marchandise devant subir plusieurs transports successifs. Sa mission est d'organiser la liaison entre les différents transporteurs et d'assurer ainsi la continuité du transport] qui est l’enjeu majeur de l’entreprise. La seconde priorité consistera à réorganiser le groupe en divisions par métiers et enfin, la dernière priorité sera de résoudre les problèmes de résultats que nous rencontrons en particulier en Espagne et en Italie, où nous souhaitons parvenir à l’équilibre d’exploitation très rapidement.

Vous avez fait le choix d’un croissance interne plus rentable en 2005 -2006, comptez-vous développer votre croissance externe en 2007 ?
Sur les opérations de croissance externe en 2007, il n’y en aura pas de la taille de TFM. Il pourra y avoir quelques opérations, mais ce n’est pas notre objectif dans l’immédiat.

Si cela devait être le cas, il s’agirait avant tout de compléter la couverture du réseau de messageries en France, qui est déjà bonne mais pas encore totale, de même qu’en Allemagne. Et puis, on continuera à observer avec attention les occasions dans le secteur du « freight forwarding », mais ce n’est pas un objectif, plutôt une question d’opportunités.

Un de vos secteurs d’activités (pilotage de la chaîne logistique, fret aérien et maritime, messagerie, express etc.), en bénéficiera-t-il prioritairement ?
Principalement, il s’agira vraisemblablement des secteurs de « freight forwarding » et de messageries qui bénéficieront des acquisitions, s’il y en a.

Envisagez-vous de nouveaux partenariats à l’image de ceux réalisés avec Phoenix, Rohde & Liesenfeld ou l’allemand IDS ?
A l’origine, ces partenariats avaient été signés pour pallier notre absence dans un certain nombre de pays. Etant donné que nous disposons désormais d’un réseau couvrant pratiquement la totalité du périmètre, il n’apparaît plus nécessaire de signer ce genre de partenariats, sauf dans la messagerie comme en Allemagne, mais plus pour le « freight forwarding ».

Le mot de la fin pour vos actionnaires ?
Le projet que nous venons de présenter me semble intéressant à la fois pour la société et les actionnaires. Se positionner dans une logique de 40% d’augmentation du CA, avec l’acquisition de TFM qui apporte 1,5 milliards d’euros de CA en plus, et le doublement des résultats opérationnels à hauteur de 200 millions d’euros à l’horizon 2009, représentent forcément des ambitions importantes.

D’une certaine manière, les actionnaires actuels de Geodis nous ont suivi, étant donnés les résultats probants de l’augmentation de capital.

Propos recueillis par N.S.

laetitia