Interview de Jean-Michel Aulas : Président directeur général d'OL Groupe

Jean-Michel Aulas

Président directeur général d'OL Groupe

La puissance économique concours à la puissance sportive

Publié le 26 Septembre 2008

Votre chiffre d’affaires au titre de l’année 2007/2008 est de 211,4 millions d’euros, soit légèrement en retrait comparativement à 2006/2007 où il était de 214,1 millions d’euros. Pour autant le résultat net progresse de 7,9%, à 20,1 millions d’euros, contre 18,5 millions en 2006/2007. Globalement quel commentaire vous inspire les résultats financiers de cette année ?
Nous sommes très heureux, car les résultats financiers ont largement dépassés ceux de l’exercice dernier, et sont -en valeur relative- supérieurs non seulement à nos concurrents français qu’à certains de nos concurrents européens.

J’évoquerais simplement que nous avons fait probablement une erreur stratégique en ne lançant qu’un seul maillot sur le plan merchandising alors que nous aurions dû lancer de nouveaux maillots très différents des précédents pour relancer les ventes.

Pour autant, le résultat net progresse de 7,9%, à 20,1 millions d'euros. 

En outre, nos équipes masculine et féminine ont remporté cinq trophées.

Nous parlons d’une année record sur tous les plans, ce qui nous comble complètement et souligne le niveau de performance de l’Olympique Lyonnais.

Malgré la «probable erreur stratégique», le produit des activités hors trading [hors contrats de joueurs, ndlr] progresse de 10,8%. Quel ont été les leviers de cette croissance ?
Je préciserais avant tout que c’était un choix qui appartenait aux équipes marketing de faire que peu de changements au niveau des maillots et ce par rapport aux supporters et à certaines traditions.

Le fait d’avoir su se remettre en cause cette année et de changer la configuration avec un maillot jaune et un maillot bleu clair, ce qui n’est pas traditionnel pour l’Olympique Lyonnais (OL), cela a permis de créer une évolution très importante de notre activité.

Cette année, nous enregistrons +20% sur notre activité merchandising de maillots, et ce uniquement sur les deux premiers mois...

Ceci prouve que lorsque l’on sait prendre les bonnes décisions, les résultats suivent avec rapidité.

A propos des leviers de croissance, nous observons que tous les indicateurs sont au vert, et j’ajouterais que même l’activité trading de joueur se porte bien car elle est dans la moyenne des trois dernières années, devenant ainsi une activité récurrente pour le groupe.

Parallèlement, nous avons beaucoup développé l’activité sponsoring avec 34 millions de contrats brut, les activités de diversification de la marque avec également presque 30 millions d’euros ce qui très supérieur à tous les autres clubs français.

Egalement, et malgré la capacité fixe de notre stade, nous avons réussi à faire progresser notre activité billetterie.

Les indicateurs financiers, et en particulier la gestion des ressources, sont très importants et situent l’Olympique Lyonnais dans le haut du panier non seulement français mais également européen.

Quelles sont vos guidances pour 2008/2009, mais également quel sont les résultats financiers escomptés via la mise en service prévu en 2012 du nouveau stade?
Je pense qu’il est très difficile de faire des prévisions dans cette activité. Ce que nous pouvons évoquer, c’est le fait que nous allons continuer à progresser sensiblement dans notre activité hors trading de joueurs.

Il faudra attendre la mise en service du nouveau stade pour avoir une évolution très importante. Nous pouvons imaginer que les ressources liées au nouveau stade seront, à termes, entre 30 et 100 millions d’euros annuel. 

À propos de l’activité trading de joueur, c’est autant une gestion financière que sportive, car les choix financiers impactent inévitablement les résultats sportifs du club.

À l’heure d’aujourd’hui, cela dépendra des objectifs que le conseil d’administration se fixera et des décisions que nous prendrons le moment venu.

Je tiens à rappeler que les résultats de cette activité trading sont très opportunistes, et notamment au moment où les propositions peuvent intervenir. La sensibilité du résultat est plus importante que dans d’autres activités.

Certain clubs, comme par exemple Manchester United, ont développé des services et des activités annexes tel que l’assurance, la banque, un service de carte de crédit, … Envisagez-vous également une diversification de votre activité ?
La caractéristique de Manchester United, comme d’autres clubs, c’est d’avoir boosté la progression des ventes.

L’Olympique Lyonnais le fait aussi, surtout au regard d’un produit d’activité supérieur à 200 millions d’euros.

Malgré le fait que nous nous situons au double des clubs français, il vrai que nous sommes nettement en dessous d’autres clubs européens comme Manchester United.

Cependant, il est clair que nous faisons partie des clubs qui imaginent que la puissance économique concours à la puissance sportive.

Demain, les clubs les plus forts économiquement, comme l’ai déjà devenu sur le plan national l’Olympique Lyonnais, seront les plus forts sur le plan sportif. Nous avons donc bien l’intention de continuer notre stratégie de développement des ressources.

Vous avez fait un investissement de 60 millions d’euros, depuis janvier de cette année, pour vous doter de nouveaux joueurs internationaux (Delgado, Boumsong, Ederson, Lloris, Makoun et Mensah), qu’est ce qui a orienté votre choix ?
La stratégie de l’Olympique Lyonnais est d’une part de former de grands et jeunes joueurs mais également d’acheter aussi des joueurs de talent, en général avant qu’ils soient au plus haut niveau.

Ce sont des jeunes joueurs qui ont une possibilité de progression et donc de valorisation. Nous avons acheté des joueurs en devenir qui ont tous moins de 23/24 ans, sauf cas particulier. La stratégie que nous entendons poursuivre et d’en faire les grandes vedettes du championnat européen de demain.

Nous préférons fabriquer et développer nos propres joueurs ce qui est le cas de Karim Benzema qui est devenu l’un des meilleurs joueurs européen. De plus, sur le plan de son image, il est déjà très en avance par rapport à d’autres très grands joueurs.

Il y a une image à la Lyonnaise. Nous le voyons d’ailleurs car l’équipe de France utilise les compétences de l’Olympique Lyonnais de manière principale.

Votre titre en bourse perd près de 24% depuis janvier, quelle perception avez-vous de votre titre ?
Vous savez, la macroéconomie des titres  ne nous appartient malheureusement pas. Je note simplement que durant l’exercice 2007/2008, le titre a progressé de plus de 5% alors que pour les autres en moyenne -et notamment le secteur des médias, secteur auquel nous sommes assimilés- baissaient de 25 à 30%.

Il y a un potentiel énorme car si l’on enlève la trésorerie net du groupe, nous avons une valorisation qui s’élève à 2,2 fois l’EBE (excédent brut d’exploitation). En outre, nous avons des plus-values latentes extrêmement importantes dans le groupe, au niveau des joueurs en particulier.

Donc, en termes d’évolution, tout est permis, mais ceci sous réserve d’une évolution normalisée des cours de bourse et de l’activité financière.

Nous sommes dans une tornade financière qui a épargné l’OL bizarrement et contrairement à d’autres.

Tandis que nous aurions pu imaginer que le secteur d’activité allait nous maltraiter, nous ne l’avons pas été, ou du moins, moins que les autres.

C’est l'une de nos grandes satisfactions que d’avoir su, même dans un secteur d’activité  comme dans le football professionnel, être moins sensibles aux fluctuations de la bourse que les autres.

Propos recueillis par Antoine Ragot