Interview de Patrice Macar : PDG de Dreamnex

Patrice Macar

PDG de Dreamnex

Notre secteur a toujours été décorrélé de la conjoncture globale

Publié le 22 Septembre 2008

Alors que de nombreux secteurs succombent à la crise, le secteur du charme, notamment sur Internet où est positionné Dreamnex, s’en sort bien. Quel regard portez-vous sur votre secteur ?
Notre secteur a toujours été décorrélé de la conjoncture globale. La question se pose de savoir si notre activité repose sur un besoin fondamental…

En tout cas, nous avons une croissance continue. La seule période où nous avons légèrement senti les répercussions de la crise, c’est au début de l’année sur la partie boutique.

A ce moment, la croissance était un peu moins importante que celle que nous connaissons habituellement. Dreamnex n’était pas le seul groupe à connaître un moins bien. Le commerce de détail était alors globalement assez affecté en France.

Hors activité du groupe Enjoy, le chiffre d'affaires organique s'est élevé à 21,748 millions d'euros, en croissance 24,22%. Quels sont les métiers qui ont particulièrement contribué à ce résultat ?
Il y a une progression sur l’ensemble des métiers. Cela dit, le métier de la webcam (hors Enjoy) a vraiment bien fonctionné. Nous avons lancé le service en France fin février/début mars et sur les quatre premiers mois d’activité, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 1,3 million d’euros.

Le métier de la rencontre, contrairement à l’année dernière, est en forte croissance. Il est passé de 1,4 million d’euros à 4 millions (+186%) alors que nous avons eu un semestre assez mouvementé du fait de notre souci juridique avec Carpe Diem. Il faut néanmoins rappeler que le premier semestre de l’an passé était notre semestre de lancement.

Sur le métier de la webcam, comment se présente le trend mensuel ?
Il y a deux niveaux. Sur la France, où nous avons lancé le service avec un modèle de paiement innovant, celui d’un abonnement de 10 minutes payable par carte bancaire -modèle dont nous avons l’expérience-, le métier fonctionne très bien.

Jusqu’à présent Enjoy proposait ses services moyennant paiement à la minute par téléphone surtaxé.

Concernant maintenant les activités du groupe Enjoy sur les autres pays, nous allons avoir une croissance assez faible des ventes mais une augmentation assez forte de la rentabilité.

D’où va venir cette hausse de la rentabilité ?
Nous avons regardé quels étaient les achats publicitaires d’Enjoy et nous avons collé sur leurs achats notre outil de suivi, d’analyse, d’optimisation des campagnes. Nous nous sommes rendu compte, à la fin du premier semestre, que certains supports n’étaient pas rentables et nous les avons supprimés. La progression du chiffre d’affaires va un peu diminuer mais la rentabilité va s’accroître.

Quel est votre métier le plus rentable ?
La VOD, la webcam et la rencontre ont bien entendu une rentabilité supérieure à notre activité de e-commerce. Globalement, nous avons une marge opérationnelle de 24% sur les activités services alors qu’elle est de 10,8% sur la boutique, ce qui est néanmoins plus important que la moyenne de l’e-commerce.

Nous sommes sur des produits à forte rentabilité avec des marges brutes proches de 70%.

Dans le e-commerce, observez-vous une évolution du nombre de clients ?
Il y a une progression constante du chiffre d’affaires avec un nombre de commandes par client qui est stable, et donc, mécaniquement, avec une progression du nombre de clients.

On note d’ailleurs un rajeunissement de la clientèle sur les trois/quatre dernières années. La moyenne d’âge est d’aujourd’hui 30-35 ans contre 35-45 ans auparavant. Cela reflète la démocratisation des sex toys, beaucoup plus visibles dans les médias.

Le panier moyen est plus faible chez les 30-35 ans que chez les 35-45 ans. Ce sont les plus de 50 ans qui dépensent le plus et qui achètent en moyenne trois sex toys par an. 

Malgré vos trois acquisitions depuis votre introduction en bourse, votre trésorerie demeure confortable. Le niveau de trésorerie est-il, pour vous, un élément important quant au choix d’une cible ?
Non, pas du tout. Evidemment, c’est un indicateur de l’état de santé de la société, mais cette trésorerie, quand on rachète une cible, on la paye.

Ce qui est intéressant dans notre méthode d’acquisition jusqu’à présent, c’est que nous achetons un tiers en titres et surtout, nous étalons le paiement cash sur trois ans.

Et comme les sociétés que nous rachetons ont un gros cash flow, ce que nous devons payer tous les ans pour le rachat correspond environ à l’argent que génèrent les cibles.

Allez-vous faire d’autres acquisitions cette année ?
Vraisemblablement, non. Nous sommes toujours en recherche active et nous avons toujours une volonté de consolidation du marché, mais nous n’avons pas aujourd’hui dans les cartons une cible qui soit suffisamment intéressante.

Nous sommes assez sélectifs. Nous voulons une société complémentaire de nos marchés avec qui on s’entend bien et qui soit financièrement solide.

Et quand acquisition il y aura, ce sera sur quel métier ? Lequel privilégiez-vous actuellement ?
Nous regardons les quatre métiers, ils nous intéressent autant. Nous irons chercher, sur un ou plusieurs de ces métiers, une audience, un chiffre d’affaires dans un pays où nous sommes encore en développement, comme l’Espagne, l’Italie ou l’Angleterre.

Quant à l’Allemagne, nous n’arrivons pas pour l’instant à y entrer. Les cultures sont différentes, les moyens de paiement sont différents, c’est vraiment un marché difficile à pénétrer.

Un mot sur vos perspectives. Dreamnex prépare notamment la mise en production de sextoys à la marque SexyAvenue, suite à l’expérience positive sur sa gamme de lingerie. Qu’attendez-vous de cette mise en production ? A quand le lancement ? Combien cela va-t-il vous coûter ?
C’est un process un peu long : la fabrication en Chine, la livraison en bateau etc., mais nous devrions avoir des produits au milieu du second semestre.

Cela va nous permettre d’améliorer nos marges, de réduire en même temps les prix de vente moyens et puis de renforcer la marque.

Nous avons une expérience positive de la gamme de lingerie SexyAvenue.

En termes de coûts, nous améliorons nos prix d’achat. Par contre, la mise en production de sextoys va générer un peu plus de stocks. Aujourd’hui, nous avons deux mois de stocks en moyenne, ils se renouvellent très vite. Sur des produits que l’on va fabriquer, nous allons passer à six mois/un an, ce qui reste raisonnable sur des produits qui ont une expérience de vie très longue.

Le groupe travaille également au lancement du service de webcams sur téléphones mobiles, dont le développement est en phase de finalisation. Quels sont les frais associés à ce projet ?
Il n’y a pas vraiment de frais additionnels. Le service est totalement développé en interne. Il occupe nos équipes techniques depuis six mois. Le produit est maintenant en bêta test. Nous travaillons actuellement à la commercialisation dans les différents pays.

A quand le lancement ?
Avant la fin de l’année.

Votre titre de bourse ne perd que 6,5% depuis le début de l’année. C’est un bon point au regard de ce qui se passe depuis plusieurs mois sur le marché. Par contre, ceci explique peut-être cela, votre action n’est pas liquide, les volumes d’échanges sont très faibles. Comment pensez-vous rendre le titre plus liquide ? Plus de visibilité ? Plus de flottant ?
La société est encore assez jeune. En plus, nous ne sommes pas dans une période qui favorise la liquidité.

Aujourd’hui mon travail consiste à rencontrer un maximum de fonds (en Angleterre, à Vienne, etc.), et à les intéresser.

Il n’y a pas d’augmentation de flottant de prévu. 

Pour voir la vraie liquidité que nous avons atteinte aujourd’hui, il faut attendre que nous soyons revenus à des marchés plus normaux.

Propos recueillis par Marjorie Encelot