Interview de Marine Michel : Gérante actions chez Montségur Finance

Marine Michel

Gérante actions chez Montségur Finance

Nous sommes particulièrement positifs sur L'Oréal, qui constitue une ligne importante de notre fonds

Publié le 02 Mars 2012

Quel regard portez-vous sur l’environnement des marchés financiers ?
Notre sentiment sur les marchés actions est globalement positif depuis le début de l'année. Des éclaircies sont apparues notamment sur le plan de la crise de la dette dans la zone euro, qui semble en voie de résolution. Le plan d'austérité adopté par le gouvernement grec a fini par déclencher le second programme d’aide public accordé au pays, pour 130 milliards d’euros.
Dans les autres pays en difficultés, Irlande, Portugal, Italie, Espagne, les mesures sont mises en place progressivement. Comme cela a été confirmé par les bailleurs de fonds internationaux du Portugal il y a quelques jours, les programmes visant à réduire les déficits publics portent leurs fruits même si des défis demeurent.
Les efforts mis en œuvre par les gouvernements tendent à rassurer les investisseurs. Les taux souverains, d’ailleurs, reculent depuis le début de l'année conduisant à une charge de la dette moins lourde pour ces économies européennes périphériques.
Des problèmes restent cependant à régler. La Grèce rencontrera des obstacles dans l’exécution des réformes qui ont été votées. Le pays connait une récession qui tend pour l’instant à être aggravée par les plans d’austérité. Malgré une certaine détermination, le retour à la croissance prendra du temps.

L'assainissement dans la zone euro devrait donc se poursuivre...
Oui, mais il est en revanche difficile de donner un calendrier précis.
Il est également compliqué à ce stade de dire si l'aide qui a été apportée à la Grèce sera suffisante. Grâce à elle, le pays pourra déjà faire face à ses prochaines échéances de dette, notamment au remboursement de 14,5 milliards d’euros du 20 mars qui avait particulièrement inquiété ces dernières semaines. Mais nul ne peut dire jusqu'à quand.

Votre scénario central se veut-il sans écueil pour la zone euro dans les mois à venir ?

Dire qu'il sera sans écueil me paraît difficile car des incertitudes demeurent, mais si écueils il y a, ils ne devraient pas forcément déboucher sur des bouleversements qui changeraient radicalement la donne sur les marchés financiers. Nous sommes face à des décisions de nature politique dont la mise en application peut se heurter à des tensions sociales.

Comment voyez-vous les choses sur le plan macroéconomique?

Que nous entrions en récession de courte durée ou pas, il est très vraisemblable que la dynamique de croissance européenne ne sera pas forte. Les mesures d'austérité qui sont adoptées dans nos économies ne vont pas dans cette direction.
Plus que savoir quels seront les taux de croissance précis enregistrés pour 2012, il est surtout important d'avoir une idée des tendances dans les différentes zones géographiques mondiales. Dans ce contexte nous investissons sur des entreprises européennes qui s'efforcent d'aller chercher la croissance dans les pays et les segments d’activité où elle est la plus dynamique.

En quoi consiste votre stratégie d'investissement plus exactement ?
Montségur Finance gère cinq fonds, dont un fonds investi plus précisément dans les grandes valeurs de croissance. Ce fonds se positionne sur des champions internationaux, acteurs majeurs de leurs secteurs qui en raison de ce statut réalisent pour la plupart une partie significative de leurs chiffres d'affaires dans les zones en forte croissance. Actuellement, les entreprises détenues en portefeuille réalisent en moyenne moins de 55 % de leurs chiffres d’affaires en Europe. 10% de leurs ventes proviennent d’Amérique latine, près de 15% sont effectuées en Asie et 15% aux Etats-Unis.

Y a-t-il un seuil minimal en ce qui concerne la part du chiffre d’affaires réalisée dans les pays émergents ?

La répartition géographique du chiffre d’affaires est un critère que nous considérons parmi tant d’autres. Au-delà de la proportion des revenus tirée des marchés en forte croissance, nous nous penchons sur la capacité qu’ont les entreprises à accroître leur présence dans ces pays, par le biais du renforcement de leurs implantations locales ou d’opérations de croissance externe par exemple. Nous sélectionnons des sociétés capables de délivrer des taux de croissance à deux chiffres annuellement, ou du moins qui connaissent une dynamique de leurs activités remarquable au sein de leur secteur. Elles sont majoritairement positionnées sur des marchés porteurs garantissant des perspectives attractives et pérennes. Nous examinons également attentivement la capacité de l’entreprise à afficher une résistance de sa marge même en période de ralentissement économique. Cela passe souvent par une capacité à maintenir un certain « pricing power » vis-à-vis des clients.
Les fondamentaux de l’entreprise sont également primordiaux. Le niveau d’endettement et l’aptitude du groupe à faire face à ses échéances de dette en générant des résultats suffisants sont des paramètres que nous contrôlons.
Nous surveillons étroitement les révisions des estimations de bénéfices effectuées par les analystes. Lorsque les résultats attendus sont revus à la baisse de manière significative pour une valeur, cela constitue pour nous une alerte.

Combien de titre avez-vous en portefeuille ?

Montségur Perspectives est constitué d’une trentaine de lignes. Ce sont pour la plupart des sociétés européennes présentes à l’international et de grandes capitalisations, autour de 5 milliards d’euros en moyenne.

Le turnover est-il important ?
Non, le portefeuille est relativement stable dans la mesure où nous menons une stratégie d’investissement de conviction.

Pourriez-vous nous mentionner des titres que vous avez actuellement en portefeuille ?

Nous avions conservé des titres cycliques pour leur potentiel de rebond comme Aperam, Arcelormittal, ou encore des valeurs du secteur bancaire telles que Deutsche Bank. Après deux mois passés en tête de palmarès des indices, ces positions ont progressivement été soldées.
Nous avons sélectionnés des valeurs du luxe comme Christian Dior, société holding du groupe LVMH, qui réalise 25% de ses ventes en Amérique du nord et près de 30% en Asie. La performance du titre est de 30 % depuis le début de l’année. Nous sommes positionnés sur des sociétés telles que Michelin qui est en mesure de répercuter sans difficulté la hausse du coût des matières premières dans le prix de ses produits et qui a gagné 15% en deux mois. Nous sommes exposés à Inditex, société espagnole détentrice entre autres de la marque Zara, ou encore sur la société de cosmétiques L’Occitane dont le chiffre d’affaires, porté par la demande asiatique, a été multiplié par 10 ans 10 ans. Nous avons des parapétrolières, comme l’italien Saipem ou Technip qui multiplie les signatures de contrats et vient de publier des résultats record.
Vous êtes particulièrement positifs sur un titre comme L’Oréal ?
La valeur constitue une ligne importante du fonds même si nous l’avons allégée suite à la publication des résultats annuels. L’acteur occupe des positions mondiales inégalées dans le secteur. Il réalise près de 40 % de son chiffre d’affaires dans les pays émergents, qui représentent près de 80 % de sa croissance. Les dirigeants sont de qualité et se montrent optimistes pour les prochains semestres. La progression des bénéfices est attendue autour de 8% pour 2012. Le taux de croissance moyen des ventes sur les prochaines années sera supérieur à 5%.

Y a-t-il une dominante sectorielle qui ressort ?
Les sociétés de la construction, les grandes entreprises d’équipements industriels, les compagnies pétrolières et parapétrolières et les groupes du secteur de la consommation courante.

Avez-vous des titres non européens ?

Oui, par exemple Petrobras, le géant pétrolier brésilien.

Propos recueillis par Imen Hazgui