Interview de Manuel Andersen : Directeur des relations investisseurs de Séché Environnement

Manuel Andersen

Directeur des relations investisseurs de Séché Environnement

La réglementation va créer de la valeur dans les métiers du traitement et du recyclage des déchets

Publié le 30 Novembre 2009

Séché Environnement est l’un des rares spécialistes français du traitement et du stockage des déchets. Comment s’organise votre activité?
Notre chiffre d’affaires se fait à hauteur de 30% avec les collectivités locales pour qui nous assurons la gestion des déchets ménagers. Nous travaillons également sur des marchés réglementés de dépollution. Une part importante (10%) de l’activité de Séché réside dans la dépollution des appareils électriques au PCB et autres produits que l’on a utilisés pendant des décennies avant de les interdire. Enfin nous traitons les déchets dangereux et non-dangereux des industriels.
A nos clients nous disons : nous avons toutes les autorisations pour traiter tous les types de déchets. Nous avons également les capacités de traitement. Au total, une vingtaine de sites en France, dont une quinzaine est consacrée au traitement des déchets dangereux.
C’est un marché où les barrières à l’entrée sont importantes, aussi bien au niveau des autorisations de traitement que des aspects logistiques. Il y a un grand écart à faire entre les déchets produits dans toutes les cours d’usines et les quelques grands centres de traitement d’opérateurs hautement qualifiés. Les déchets voyagent. La réglementation conduit à une concentration des opérateurs. En matière de déchets dangereux, il y a aujourd’hui trois grands acteurs : Séché Environnement, Veolia Environnement et Suez Environnement.

Sur les neuf premiers mois de l’année, vous avez réalisé un chiffre d’affaires de 270 millions d’euros, en baisse de 3,4% par rapport à la même période de l’exercice précédent.  Quelles sont vos prévisions sur l’ensemble de l’année ?
Il y a une certaine rémanence des volumes issus des collectivités. Sur ces déchets, nous avons vu peu de variations de volumes. Je dirais même que le pouvoir d’achat diminuant, les gens achètent une nourriture de plus en plus industrielle et packagée. Moins on remplit le frigidaire, plus on remplit la poubelle !
En revanche, il y a eu une baisse des volumes issus des industriels. Mais nous constatons aujourd’hui un phénomène de restockage, la production de déchets est plus régulière. Compte tenu du haut niveau d’activité enregistré au quatrième trimestre 2008, que nous ne rééditerons pas cette année, nous prévoyons un chiffre d’affaires 2009 de l’ordre de 365-370 millions d’euros, soit une baisse de -3,5% à -5% sur l’ensemble de l’année.

Cette baisse aura-t-elle un impact sur vos marges ?
  
La crise nous a amenés à modifier notre ‘mix’ de déchets traités. Cette adaptation aura un impact sur notre rentabilité d’environ 14 millions d’euros sur l’ensemble de l’année. Mais nos mesures d’économies et de productivité devraient nous rapporter 12 millions. Au final, nous visons une stabilité de la marge Ebitda ainsi que de la marge opérationnelle courante en 2009 et en 2010. (ndlr : en 2008, la marge Ebitda était de 26,4%, la marge opérationnelle courante de 17%).

Séché Environnement a annoncé en 2008 son intention de prendre le contrôle de Saur, spécialiste des métiers de l’eau et de la propreté, dont il détient déjà 33%. Où en êtes-vous de cette acquisition ?

Nous avons une option d’achat de 18% qui court jusqu’en mai 2012. Nous espérons exercer cette option le plus rapidement possible, mais la crise a asséché les financements pour ce genre d’opérations (ndlr : Saur représente un chiffre d’affaires d’environ 1,5 milliard d’euros).  La crise de liquidités bancaires dure toujours. Des banques comme HSBC, RBS, qui étaient importantes pour Séché, ne sont plus actives aujourd’hui en France. Nous nous heurtons à ce problème. Il faut souhaiter que l’on retrouve avant 2012 des conditions plus normales en termes de financement long terme. 
Nous ne sommes pas spécialement optimistes pour 2010 mais nous saurons nous montrer opportunistes. Si nous exercions l’option aujourd’hui, il nous faudrait lever environ 160 millions de dette supplémentaire. Si nous le faisons en 2012, ce sera de l’ordre de 180 millions.

Outre les métiers de l’eau, prévoyez-vous d’autres formes de diversification ?
Dans le cadre de notre rapprochement avec Saur, nous allons intégrer Coved, une filiale de Saur spécialisée dans le recyclage des métaux, papiers, cartons, plastiques. On aura alors l’outil pour adresser les marchés du recyclage.
Pour l’heure, Séché se développe dans les énergies renouvelables. Nous avons équipé l’ensemble de nos sites d’outils de valorisation énergétique des déchets organiques, et produisons ainsi du biogaz.

L’idée est de remonter la filière du traitement, dont nous sommes le dernier maillon, vers l’amont. Aujourd’hui nous sommes présents dans la valorisation énergétique. Demain ce sera sûrement la valorisation matière (ndlr : le recyclage).  Les industriels vont devoir recycler des parts de plus en plus importantes de déchets, tout en intégrant des matières recyclées dans leurs propres produits. Cela va créer une demande pérenne en produits recyclés.

Par ailleurs, la valeur ajoutée de nos métiers est générée par les opinions publiques en faveur de l’environnement et les réglementations qui en découlent. A l'avenir, ces réglementations vont créer de la valeur dans les métiers du traitement et du recyclage des déchets.

Propos recueillis par François Schott

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