Interview de Didier  Michaud-Daniel : Directeur Général de Bureau Veritas

Didier Michaud-Daniel

Directeur Général de Bureau Veritas

Je suis optimiste sur l'avenir prometteur de Bureau Veritas

Publié le 29 Août 2014

Vous venez de publier vos résultats semestriels. Ces derniers se caractérisent par un résultat net en recul de 9,5% à 154 millions d'euros et un résultat opérationnel ajusté en repli de 1% à 310 millions d'euros. Comment l’expliquez-vous ?
Essentiellement par des effets de change défavorables de -6,5%, le ralentissement en Europe et la non reprise de l’activité métaux et minéraux.

Ces six premiers mois de l’année ont été rythmés par de nombreuses acquisitions réalisées en Amérique du Nord ces derniers mois dans plusieurs secteurs (inspection des bâtiments, industrie automobile, sécurité alimentaire et environnementale)...
Un de nos objectifs affiché dans notre plan stratégique est celui de nous développer et d’élargir notre offre de services en Amérique du nord.
C’est ce qui explique que nous ayons réalisé une très bonne performance en termes d’acquisitions notamment avec Maxxam au Canada, mais aussi avec DTI et QuikTrak.

Si vous continuez à afficher une certaine confiance s’agissant de la progression de son chiffre d'affaires pour cette année, vous avez été amené à réviser à la baisse votre perspective de croissance organique?
Effectivement. La hausse du chiffre d'affaires à changes et périmètre constants sera d’environ 3% cette année, après avoir ralenti à 1,8% au premier semestre.
La faiblesse de la croissance organique sur l’année, inférieure aux attentes du marché, est directement liée à la faiblesse de la croissance en Europe et notamment en France et dans les métaux et minéraux.

Les ambitions d’ici 2015 ont également été révisées à la baisse ?

Nous avions indiqué dans le plan stratégique que la croissance totale se situerait entre 9% et 12% par an entre 2012 et 2015. Cette croissance ne sera pas générée avec le même mix que celui prévu initialement. Il y aura davantage de croissance externe et moins de croissance organique.
S’agissant des marges, nous pourrions atteindre le niveau de 17,2% annoncé dans le plan mais, parce que nous tenons à investir afin de stimuler la croissance organique, nous avons donc abaissé cette cible à 17%.
Le résultat net ajusté par action devrait se situer entre 5% et 7% par an sur la période, en raison des effets de change et de l’augmentation du taux d’imposition.

Sur quelle évolution du taux de change avez-vous tablé pour établir votre prévision de résultat net par action ?
Il est très difficile d’anticiper l’évolution des taux de change. Notre prévision est basée sur une moyenne jusqu’à la fin de l’année, fondée sur des taux de change similaires à ceux de juillet, autrement dit plus favorables que ceux du début de l’année.
Si l’euro venait à davantage se déprécier l’année prochaine, nous serons en mesure de dépasser la fourchette indiquée en matière de résultat net par action.

En quoi la fiscalité vous impacte-t-elle ?
En 2011, le taux d’imposition de Bureau Veritas était de 27%. Il est désormais de 32%.

De nouvelles acquisitions sont à escompter pour soutenir son activité. Dans quelles zones géographiques ? Quels secteurs ?
Nous avons déjà réalisé 7 acquisitions cette année qui représentent 290 millions d’euros de chiffre d’affaires. Nous avons encore des acquisitions très intéressantes dans le pipeline à venir.
Notre ligne stratégique est axée sur les Amériques et l’Asie sur le plan géographique pour parvenir à un certain équilibre dans la répartition de notre activité par zone, avec environ un tiers chacune.
Sur le plan sectoriel, nous regardons des sociétés dans l’ensemble de nos activités actuelles et nous recherchons des services complémentaires par rapport à ceux que nous proposons aujourd’hui.

Hormis l’effet de change défavorable et la détérioration de la conjoncture économique, identifiez-vous d’autres risques pour votre activité aujourd’hui ?
Non. Notre activité est et restera très résiliente. Il n’y a pas beaucoup de sociétés qui sont en mesure d’afficher une croissance organique de l’ordre de 3% dans le contexte que nous vivons.

Ceci étant, quand la France représente un chiffre d’affaires de 700 millions d’euros dans un chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros et que celle-ci est en décroissance, il est difficile de pouvoir largement le compenser par ailleurs.

En outre le segment des métaux et minéraux qui n’a cessé de décliner tout au long de l’année pour atteindre un point bas en septembre amène à avoir une base de comparaison compliquée par rapport à l’année dernière.

Comprenez-vous la déception des investisseurs à la suite de la publication de vos derniers chiffres ?
Nous pouvons la comprendre. Alors qu’ils étaient dans l’attente d’une amélioration progressive de la croissance organique sur l’année, celle-ci fait défaut au deuxième trimestre.
Cette déception, et la sur-réaction qui s’en est suivie, sont de court terme.
A moyen et long terme, Bureau Veritas conservant le même modèle sera en mesure de reprendre de l’élan dès que la reprise économique sera au rendez-vous.
Je suis d’autant plus optimiste sur notre avenir prometteur qu’il y a de plus en plus d’opportunités : plus de standards et de normes adoptées dans le monde entier ; plus de demande de qualité, de sécurité, d’hygiène et d’environnement ; plus de besoin d’énergie et ; plus d’externalisation de la part des sociétés de leur testing, de leur inspection et de leur certification. L’ouverture du marché domestique chinois devrait également être porteuse.

A la suite de votre publication plusieurs brokers ont commenté vos chiffres, parmi lesquels ceux de Deutsche Bank. Pour ces derniers la valorisation de Bureau Veritas a 20 fois ses bénéfices futurs ne se justifie plus car votre levier financier et votre levier opérationnel se sont considérablement réduits. Qu’en pensez-vous ?

Nous avons un leverage ratio de 2,48 à fin juin. Nous devrions redescendre ensuite en raison d’effet de saisonnalité de cash flow.
La situation financière est tout à fait saine. Le net cash flow était de 176 millions sur le premier semestre.
Nous n’avons eu aucun problème à lever des fonds sous forme d’obligations pour assurer notre dernière acquisition d’envergure. Nous sommes à présent totalement couvert jusqu’en 2017.

Qu’en est de l’avenir de votre politique de distribution de dividende à vos actionnaires ?

Nous avons un ratio de distribution de 50%, contre 40% il y a deux ans. Il n’y a pas de variation à attendre de ce côté. La révision de nos objectifs de résultat net ajusté par action d’ici 2015 ne devrait aucunement interférer sur notre politique de distribution.

Un dernier mot pour vos actionnaires ?

Nous espérons avoir atteint notre point bas en termes de niveau d’activité et renouer à présent avec une reprise et nous avons beaucoup d’opportunités à moyen et long termes.

Propos recueillis par Imen Hazgui