Interview de Régis Arnoux : président de Catering International Services

Régis Arnoux

président de Catering International Services

Les Etats veulent un meilleur partage des fruits de leur sous-sol

Publié le 04 Juillet 2006

La flambée des cours des hydrocarbures est-elle durable ?
Oui, à moins d'un effondrement brutal de la demande chinoise ou indienne. Et encore, la baisse ne serait que provisoire. Même si le scénario très optimiste d'un Irak redevenu un pays sécurisé et équilibré, capable de produire de cinq à six millions de barils par jour se produisait.

On assiste à une reprise des investissements dans l'exploration-production et dans le raffinage. Ces efforts ne sont-ils pas tardifs ?
Non, cette reprise est poussée par la demande exponentielle de la Chine, de l'Inde, mais aussi de pays développés, comme les Etats-Unis, qui devraient voir leur dépendance aux importations de pétrole se hisser à 70 % de leur consommation. Ces efforts concernent aussi le gaz, y compris dans des zones géographiques ou cela n'avait pas de sens quand les cours étaient bas.

C'est par exemple le cas du Tchad, qui produit aujourd'hui 250 000 barils par jour, et devrait doubler sa production d'ici peu. Quand le baril était à 10 dollars, ce pays n'intéressait personne. Avec un cours moyen de 70 dollars, la situation est différente. Le phénomène touche également l'Algérie, où l'on assiste à une véritable explosion des investissements de recherche et de mise en production, ou le Brésil. Dans ce dernier pays, nous avons participé à la mise en valeur de gigantesques gisements off-shore aux côtés de compagnies étrangères, qui ont permis à ce pays d'atteindre l'autosuffisance en pétrole pour la première fois l'an dernier.

Le phénomène touche-t-il aussi les minerais et les métaux ?
Effectivement. Là encore, des gisements qui n'intéressaient personne lorsque les cours étaient bas acquièrent une importance cruciale. Ainsi, nous sommes présents dans l'exploitation d'une mine d'argent à ciel ouvert en Bolivie, qui se trouve à 4 500 mètres d'altitude. Au Pérou, nos équipes travaillent à 4 000 mètres d'altitude, dans un autre gisement d'argent à ciel ouvert. La rentabilité de ces investissements était impossible à atteindre il y a quelques années. Aujourd'hui, toutes les zones géographiques du monde sont dignes d'intérêt.

Ces investissements conduisent-ils les compagnies pétrolières ou gazières à nouer des partenariats pour partager les coûts ?
Nous avions l'habitude de compter 80 % d'entreprises occidentales dans nos clients. Elles n'en représentent plus que la moitié. Nous travaillons de plus en plus avec l'entreprise publique de chaque pays ou nous allons. Et les entreprises européennes ou américaines sont de plus en plus adossées à un partenaire local. Ces Etats, surtout en Amérique du Sud, n'acceptent plus d'être tondus par de grandes firmes étrangères. Ils demandent un meilleur partage des fruits de leur sous-sol. Et puis, ces mises en valeur impliquent des investissements si élevés, qu'ils imposent aussi aux gouvernements de faire appel aux ressources financières et au savoir-faire d'entreprises occidentales. C'est notamment le cas au Yémen, qui a ouvert ses portes aux investissements extérieurs pour la première fois cette année pour exploiter un gisement de gaz.

Justement vos relations avec ces compagnies nationales sont-elles les mêmes que celles que vous entretenez avec des sociétés occidentales ?
Elles leur ressemblent de plus en plus. Les compagnies pétrolières, gazières ou minières russes n'ont plus l'intention de se contenter de leur marché intérieur. Elles s'implantent dans les pays voisins. Ce qui a aussi pour conséquence une internationalisation plus grande de leur management. Cela nous pousse aussi à faire appel à davantage de cadres locaux à des niveaux de responsabilité plus élevés. La tendance ne se limite pas aux Russes. Lorsqu'une entreprise chinoise décroche un marché en Afrique, il n'est pas question pour elle de violer la législation locale en employant des chinois sous-payés. C'est ce que nous avons pu observer au Kazakhstan, lorsqu'un exploitant chinois a pris le relais d'une entreprise occidentale.

florian