Interview de Anvaraly Jiva : PDG de Linedata Services

Anvaraly Jiva

PDG de Linedata Services

Nous avons des dossiers sérieux à l’étude et notre objectif est vraiment de faire de la croissance externe en 2008.

Publié le 17 Mars 2008

Pourriez-vous nous rappeler brièvement quel est le métier de Linedata ?
Linedata Services est un éditeur de logiciels spécialisé dans le monde financier, et en particulier dans l’Asset Management, l’épargne, l’assurance, les crédits et financements.

Comment se compose votre clientèle ?
C’est très simple, puisqu’il s’agit de l’ensemble des institutions financières (banques, sociétés de gestion financière, compagnies d’assurance, caisses de retraites, etc.). Ensuite, nous avons également pour client les filiales dédiées à la finance de grands groupes industriels, ainsi le groupe Peugeot-PSA dispose de filiales spécialisées dans le crédit et le financement qui sont nos clients…

Enfin, nous avons aussi de très grands groupes qui sont nos clients à travers les augmentations de capital réservées à leurs salariés puisque nous avons développé, à côté de notre offre épargne salariale à l’intention des sociétés de gestion spécialisées, une offre actionnariat salarié donc dédiée directement aux grands groupes côtés en bourse.

Vous venez de publier vos résultats annuels faisant état d’un résultat net en progression de 10,8% sur 2007, à 13,3 millions d'euros, et d’une marge nette de 8,1%. Quel commentaire vous inspirent ces chiffres ?
Nous sommes très satisfaits de ces chiffres de l’exercice 2007. D’abord parce que nous avons enregistré une croissance organique de 11%, soit 14,6% à données comparables, et puis en termes d’Ebitda, nous avons fait mieux qu’escompter au mois d’août, c’est-à-dire, par rapport à l’année dernière et sur le même niveau de résultat.

Nous avons ainsi dégagé 31,3 millions d’euros d’Ebitda, soit 19% de notre chiffre d’affaire, ce qui nous satisfait pleinement, d’autant que sur cette année nous avons également généré un cash flow important, ce qui est très sein pour l’entreprise.

Quels ont été les leviers de cette croissance ?
En 2007, plusieurs leviers ont été à l’œuvre, en premier lieu en Europe du Sud, notamment en France, nous avons signé de très beaux contrats de référence dans l’Assurance et les crédits.

Et puis aux Etats-Unis et en Europe du Nord, nous avons fait une très belle année en termes d’Asset Management, autour des produits LongView, ICON et Beauchamp. Pour résumer, l’ensemble de nos produits, de nos offres et de nos régions, a contribué à cette croissance.

Vous avez enregistré de fortes progressions de votre chiffre d’affaires dans les zones géographiques où vous êtes présents (Amérique du Nord, Europe du Sud et du Nord, Asie). Pourriez-vous nous fournir quelques détails sur les zones les plus dynamiques ?
Toutes les zones se sont révélées très dynamiques. Ceci étant, si vous prenez l’Europe du Nord, l’activité du début d’exercice a été tirée par les Hedges Funds en début d’année, et la fin de l’exercice a profité du reste, c’est-à-dire LongView et ICON, donc des produits de back office, de middle office et surtout front office à destination des fonds traditionnels

En Amérique du Nord, l’année a été régulière en termes de croissance, grâce en particulier à notre offre ASP qui est désormais largement plébiscitée avec 13 nouveaux contrats en 2007.

En Europe du Sud, aussi bien les crédits que l’assurance ont été très porteurs. Toutefois, il faut rappeler qu’il y a eu cette année un chiffre d’affaire exceptionnel en ce qui concerne le projet NOEE. Il s’agit en l’occurrence d’une nouvelle plateforme technologique pour les acteurs de l’Epargne Salariale en France. Cette plateforme est actuellement mise en place auprès de nos principaux clients.

Comptez-vous accélérer votre développement dans ces zones, et particulièrement en Asie ?
Nous avons démarré nos activités en Asie, il y a maintenant deux ans, avec l’arrivée de Beauchamp dans notre périmètre. Nous disposions alors d’un petit bureau de 15 personnes, et nous avons immédiatement décidé de doubler les effectifs, si bien qu’aujourd’hui nous avons une équipe composée de plus de 30 salariés.

Nous avons désormais l’ambition de doubler ou tripler à nouveau ces effectifs pour la zone Asie et atteindre très vite les 100 personnes ; la meilleure preuve de cette volonté étant que nous sommes en train d’embaucher un directeur général d’envergure pour cette zone, et qui devrait  bientôt entrer en fonction.

L’Asie est donc vraiment une zone où nous souhaitons nous développer, parce que le secteur est porteur, et que nous disposons déjà des produits répondant aux besoins du marché. D’ailleurs, avec les produits actuels, nous avons déjà une trentaine de clients aussi bien au Japon, à Singapour, qu’en Chine ou en Inde…

Il ne nous reste donc plus qu’à augmenter notre force de vente et avancer !

Que représente cette force de vente, en Asie et dans le reste de vos zones d’activités ?
En Asie, notre force de vente est encore faible -5 personnes-, en revanche, globalement, Linedata a dû faire un effort particulier et ce, depuis 2004, où nous avons commencé à accroître nos forces d’avant et après vente, ainsi que les forces d’accompagnement complémentaires comme la communication commerciale, le marketing, etc. Aujourd’hui, Linedata a atteint un certain niveau, puisque nous y avons investi jusqu’à 10% de notre chiffre d’affaires, et que nous allons continuer de le faire.

Envisagez-vous de faire de la croissance externe en 2008 ? De quelle marge financière disposeriez-vous le cas échéant ?
Nous le souhaitons ardemment dans la mesure où notre dernière croissance externe date de fin 2005, et que 2007 a été une année de consolidation avec la mise en place de notre plan de réduction de coûts.

Aujourd’hui, toute la plateforme Linedata est prête à reprendre le flambeau en termes de croissance externe. Nous avons des dossiers sérieux à l’étude et notre objectif est vraiment de faire de la croissance externe en 2008. Néanmoins, nous n’achèterons pas des sociétés trop chères. La conjoncture étant favorable, nous espérons pouvoir réaliser des acquisitions dès cette année, mais vous saurez qu’à la fin de l’exercice, si nous n’en avons pas fait, c’est que le prix des dossiers étudiés était trop élevé.

A l’heure actuelle, notre gearing est à 30%, notre taux d’endettement est de l’ordre d’une fois l’Ebitda, et nous pouvons aller jusqu’à deux ou trois fois. Nous pouvons donc emprunter entre 50 et 60 millions d’euros. Par ailleurs, la société que nous achèterons contribuera également à l’Ebitda, ce qui nous donne une capacité d’endettement supplémentaire…

Il y a donc deux méthodes, dont celle de l’endettement classique pour faire de la croissance externe classique telle que Linedata l’a fait depuis 10 ans, mais nous ne nous interdisons pas de faire autrement si une belle opportunité se présente… Nous allons tout regarder parce que cela fait partie de notre modèle -croissance organique + croissance externe-, pour devenir leader mondial.

Justement, ce plan d'actions visant à réduire les coûts directs, qu’en est-il aujourd’hui, et comptez-vous le poursuivre ?
Notre objectif est d’améliorer en permanence nos résultats...

Au premier semestre 2007, nous étions en retard, de deux points, en termes de résultats par rapport à l’exercice 2006. Cette situation nous a servi d’aiguillon, même si nous savions que ce n’était pas anormal puisque ce retard était dû à nos investissements, mais c’était l’occasion pour nous de lancer une démarche exhaustive pour revoir l’ensemble de nos coûts et voir comment nous pouvions réduire nos coûts directs, pour continuer d’investir dans la R&D, le commerce, la vente et le management. Ce travail a démarré au mois d’août 2007, se poursuit actuellement et continuera au moins pour les 3 prochaines années. L’objectif étant de gagner un point de marge par an.

Les difficultés rencontrées par les établissements financiers dans le contexte actuel de ralentissement économique ont-elles impacté votre activité ?
  La conjoncture générale n’a pas joué sur notre chiffre d’affaires 2007, et aucun projet n’a été retardé. Il n’y a donc pas eu d’impact, du moins au premier degré, car peut-être aurions-nous fait davantage si le contexte économique était autre, mais ce manque a gagné est difficile à estimer. 

Ceci dit, pour 2008, nous demeurons plus prudent. Nous considérons en effet que lorsque la conjoncture générale est à la morosité ou à l’incertitude, il se peut que des actes de vente soient retardés par des clients, ou que l’implémentation des projets le soit aussi.

Si cela était le cas, Linedata pourrait en être impacté, ce qui explique notre prudence en termes de prévisions de croissance 2008. 

Quelles sont vos perspectives et/ou objectifs pour 2008 ?
Nous n’avons pas chiffré la croissance, mais si vous regardez les trois dernières années, nous avons dégagé 7% en 2005, 7% en 2006 et 11% en 2007. Nous avons bien entendu très envie de continuer à à ce niveau, mais nous ne nous donnons pas un objectif ponctuel mais une ambition, celle d’une croissance à deux chiffres pendant plusieurs années. Quant à 2008, nous sommes convaincus que nous allons continuer à réaliser de la croissance, même modérée, mais nous restons prudents parce que nous ignorons quelle sera la conjoncture dans  les prochains mois

En revanche, en termes d’Ebitda, donc de résultat d’exploitation, notre objectif est clairement de gagner un point de marge par rapport à 2007, c’est-à-dire d’atteindre au moins 20% d’Ebitda, quel que soit le chiffre d’affaires que nous ferons en 2008.

Quel est l’état de votre carnet de commande pour l’exercice 2008 ?
C’est une belle année 2008 qui s’annonce puisque notre carnet de commandes est de l’ordre de 100 millions d’euros au 1er janvier 2008. Quand on vient de faire 165 millions d’euros de chiffre d’affaires, et que l’on sait qu’il y a 100 millions d’euros de commandes déjà assurés pour l’année qui vient, il est clair que l’exercice débute bien.


Pourquoi vous êtes vous renforcés au capital de Linedata en janvier dernier ? Est-ce en rapport avec l’évolution plutôt chaotique de votre titre…
J’avais déjà annoncé il y a longtemps que mes managers et moi-même souhaitions nous renforcer au capital de Linedata, parce que nous sommes très soucieux du contrôle de notre société.

Nous avons aujourd’hui un pacte d’actionnaires avec la famille Peugeot et la Caisse des Dépôts, et ensemble, nous avons un transfert qui dépasse 55% des droits de vote. Nous gardons donc le contrôle de l’entreprise.

Or, à travers l’acquisition de titres que nous venons de réaliser, nous dépassons les 34% de droits de vote, si bien que désormais, nous disposons d’une minorité de blocage. Il s’agit donc d’un contrôle un peu plus renforcé de la société par les managers et moi-même.

D’ailleurs, notre objectif est d’atteindre le rang de leader mondial dans les cinq années à venir. Forcément, la capitalisation boursière d’une société qui devient leader mondial ne peut pas être la même que celle que nous connaissons aujourd’hui.

Or, nous voudrions être sûrs de tenir les rênes de cette société et de la conduire jusqu’au leadership exactement selon nos plans, plutôt que simplement, de se tenir à l’abri d’une OPA hostile… C’est la raison pour laquelle je me suis renforcé, et c’est pourquoi je continuerai de chercher toutes les solutions pour que les managers qui m’accompagnent puissent continuer à renforcer leur participation au capital et devenir des actionnaires importants de la société.

Linedata est d’ailleurs la première société en France en termes d’actionnariat salarié.

Le mot de la fin pour vos actionnaires.
Je souhaite tout d’abord les remercier de leur confiance et les inviter à continuer à nous accompagner dans ce contexte d’incertitudes où le cours de bourse a tendance à baisser. Nous avons confiance en Linedata, d’ailleurs je vous affirme cela en ma qualité d’actionnaire principal du groupe. Quant à ceux qui ne le sont pas encore, je les invite à venir nous rejoindre car nous avons pour ambition de conduire Linedata très loin, et d’une manière visible.

Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy