Interview de Thierry Congard : PDG de Proservia

Thierry Congard

PDG de Proservia

Notre performance sera liée à notre capacité à recruter de nouveaux talents, puisqu’il s’agit là du nerf de la guerre dans le secteur des SSII

Publié le 28 Avril 2008

Pourriez-vous nous présenter brièvement l’activité de Proservia ?
J’ai créé Proservia en 1994 avec un positionnement sur les infrastructures informatiques en proposant des prestations de conseil, d’infogérance, de téléservice, de supervision, de helpdesk et de formation. Ce métier représente 82% de notre activité.

Depuis le rachat de Simecom, en 2006, nous avons également une offre de développement et de R&D externalisée dans trois domaines très particuliers que sont le développement objet, le monde du décisionnel et du multimédia. Cette activité pèse pour 18% de notre chiffre d’affaires.

Vous venez de publier vos résultats 2007. Votre société de services spécialisée dans les infrastructures informatiques, a réalisé un chiffre d’affaires de 36,8 millions d’euros, en hausse de 37% par rapport à 2006. Quel commentaire vous inspire ces résultats ?
L’activité, en 2007, a effectivement été très bonne, soutenue par une importante croissance organique de +16%, soit nettement supérieure à celle du marché qui, selon le Syntec, était de l’ordre de +6% à +7%. Cette performance est notamment le fruit de notre offre groupée d’infogérance et de téléservices.

Nous avons également acquis la société Synexia, SSII basée en région parisienne, qui vient compléter notre offre par des prestations à forte valeur ajoutée qui font progresser notre taux journalier moyen (TJM).

Notre croissance globale de +37% constitue une belle performance qui s’inscrit dans la lignée de ce que nous avons réalisé au cours des dernières années. Depuis 2000, notre croissance annuelle moyenne est de +30%.

En l’espace de deux ans, depuis notre IPO, nous sommes passés de 350 collaborateurs à 700 aujourd’hui, nous avons donc doublé de taille. Nous avons aussi plus que doublé notre chiffre d’affaires, passant de 16,2 millions d’euros de CA en 2005 à 36,8 millions en 2007 et même 38 millions en pro forma avec Synexia intégré sur 12 mois.

Quels ont été les moteurs de la croissance ?
Les moteurs de croissance sont multiples. Nous bénéficions de la montée en puissance des dernières agences ouvertes mais aussi de la forte hausse du chiffre d’affaires des sites plus anciens. Ainsi, dans certaines régions, et en particulier la région Ouest, nous sommes devenus un acteur incontournable.

C’est également le succès de nos offres pluriannuelles qui combinent infogérance sur site et téléservices. Nous fidélisons des anciens clients et arrivons à en attirer de nouveaux. Nous avons aujourd’hui 66 clients qui se sont engagés sur des contrats de long terme, certains jusqu’à fin 2011.

Ce développement a été porté par une politique active de recrutement puisque nous avons intégré 134 nouveaux collaborateurs alors que nous avions un objectif de 100 embauches.

Votre marge opérationnelle reste élevée, à 11%...
Nous arrivons à maintenir un très haut niveau de marge opérationnelle, alors que nous avons, en très peu de temps, doublé nos effectifs et notre chiffre d’affaires et également acquis et intégrés 4 sociétés. Il faut savoir que, pour gagner en marge, il est nécessaire d’investir. Sur le moment, cela peut réduire légèrement la marge opérationnelle mais cela permet aussi de gagner en croissance sur les années à venir, en termes de chiffre d’affaires et également de marge.

Notez que cela fait maintenant 11 ans que nous dégageons une marge opérationnelle à 2 chiffres. Nous restons parmi les meilleurs élèves de la profession.

En 2007, vos fonds propres se sont établis à 15,2 millions d’euros pour une trésorerie nette de 2 millions d’euros, contre une dette nette de 1,6 million d’euros un an plus tôt. A quoi va vous servir cette cagnotte ?
Nous sommes passés d’une situation d’endettement de 1,6 million d’euros à une situation positive de 2 millions d’euros, en l’espace d’un an grâce à une très forte génération de trésorerie et à la réduction de notre besoin en fonds de roulement. Cette trésorerie va servir, dans un premier temps, par respect pour nos actionnaires, au versement d’un tiers de notre résultat sous forme de dividende. Nous allons proposer, lors de notre prochaine assemblée générale d’actionnaires, une distribution de 50 centimes d’euros par action, contre 35 centimes d’euros en 2006, soit une progression de +43% en un an.

Le cash restant va nous permettre d’étudier un certain nombre de dossiers de croissance externe. Nous avons actuellement deux ou trois dossiers en cours d’étude mais nous ne ferons des acquisitions que si les cibles respectent des critères strictes de rentabilité et/ou de valorisation. Les croissances externes que nous réalisons doivent créer de la valeur pour l’actionnaire.

Avez-vous des objectifs en termes de croissance organique pour l’exercice 2008 ?
Le Syntec (fédération qui représente près de 1 250 groupes et sociétés françaises spécialisées dans les professions de l'Ingénierie, des Services informatiques, des études et du conseil, de la formation professionnelle, ndlr.) a prévu une croissance du marché de l’ordre de +4% à +6% en 2008. Notre objectif est toujours de faire mieux que le marché.

Notre performance sera liée à notre capacité à recruter de nouveaux talents, puisqu’il s’agit là du nerf de la guerre dans le secteur des SSII où nous sommes proches du plein emploi. Nous avons des atouts non négligeables à faire valoir puisque nous avons mis en place des outils pour attirer (Contrat première chance) et fidéliser (plan de carrière prédéfini) nos collaborateurs. Ceci permet d’avoir un turn-over relativement faible, autour de 14%, contre 15% à 30% pour le reste du secteur.

Outre les outils de fidélisation précités, nous avons également investi dans des nouvelles technologies comme WizTiVi qui est très innovante et nous permet d’attirer des ingénieurs informatiques…

En février dernier, la filiale de Proservia, WizTiVi, a franchi une étape importante de son développement en créant la chaîne de télévision interactive de Dailymotion. Comment voyez-vous se poursuivre le développement de cette activité ?
WizTivi est une première mondiale. Nous sommes la seule entreprise à pouvoir porter du web sur la télévision dans un environnement multi-box (Neufbox, Freebox, etc.).

La première application que nous avons réalisée est destinée à Dailymotion pour qui nous avons créé une chaîne de télévision interactive. La commercialisation de notre offre a réellement débuté en février et nous espérons signer de nouveaux partenariats qui donneront lieu à des annonces dans les jours ou les semaines à venir…

Ceci étant, WizTivi nécessite encore, en termes de développement, d’importants investissements en R&D. Mais nous avons annoncé que, malgré ces charges additionnelles, Proservia devrait encore dégager une marge opérationnelle à 2 chiffres en 2008, pour la douzième année consécutive.

Votre cours de bourse vous satisfait-il ?
Il serait difficile de dire que nous sommes satisfaits. Il faut toutefois relativiser les choses. Nous nous sommes introduits en Bourse en juillet 2006 à 14,51 euros. Depuis, le titre a progressé de près de +15%. Or, depuis cette IPO, l’indice Alternext All Shares a perdu 10%, ce qui fait un différentiel de +25% en notre faveur.

Ceci étant, j’estime aujourd’hui que notre cours, compte tenu des niveaux de marge opérationnelle élevés que nous affichons, ne reflète pas du tout la valeur réelle de l’entreprise.

Je considère que nous sommes dans une situation excessive concernant l’ensemble des valeurs du marché, dans la mesure où beaucoup annoncent des résultats très performants pour 2007, ce qui ne se reflète pas dans les cours.

En toute objectivité, si vous comparer notre PER 2007, qui est de 10 fois contre près de 14 fois en moyenne pour les SSII cotées, nous ne sommes pas bien valorisés d’autant que nous avons une des meilleures marges opérationnelles du secteur.

Le mot de la fin pour vos actionnaires.
Mes engagements vis-à-vis de nos actionnaires sont clairs et n’ont pas changé depuis l’introduction en Bourse de Proservia. Je souhaite maintenir, année après année, une marge opérationnelle à deux chiffres et distribuer au moins 30% du bénéfice réalisé sur l’exercice sous forme de dividende.

Je remercie tous ceux qui nous ont fait confiance et n’ont pas quitté Proservia malgré un contexte boursier particulièrement difficile.

Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy