Interview de Patrick Lemaire : Directeur général délégué de DL Software

Patrick Lemaire

Directeur général délégué de DL Software

Nous pouvons réaliser entre 10 et 15 millions d’euros d’acquisition

Publié le 18 Mars 2009

Quel commentaire vous inspire vos résultats ? Quels ont été les moteurs de croissance cette année ?
Le début de l’exercice 2008 a finalement été bon, parce que nous avons fait pas mal de croissance organique… Nous avions indiqué que notre premier semestre n’avait pas été terrible, nous étions alors autour de 3% de croissance de la marge brute, or nous terminons l’année à +5,8% en pro forma, ce qui signifie que nous avons plutôt une accélération de notre croissance organique sur le deuxième semestre (notamment dans le pôle santé).

Ce qui est important, c’est que cela se fait sur notre core business, c’est-à-dire sur les ventes de licences et sur les abonnements. C’est d’ailleurs la partie qui progresse le plus, si bien qu’aujourd’hui, la partie récurrente représente 42% de la marge brute, contre 40% il y a un an et 36% il y a deux ans.

Nous augmentons donc ce récurrent année après année, ce qui est très rassurant dans les conjonctures comme celles que nous connaissons.  

Ensuite, nous avons également fait un beau travail sur le BFR : compte tenu de la conjoncture, nous avons décidé d’accélérer sur cette partie-là, et nous avons donc encaissé rapidement notre cash avec un délai client que nous avons fait passer de 100 jours à 84. Du coup, à notre cash qui a fortement progressé [ce dernier a été multiplié par 1,7], on a rajouté un effet BFR positif, qui nous permet d’aboutir à un free cash-flow 2,3 fois supérieur à celui de 2007, à 4,9 millions d’euros.

D’autant que nous n’avons pas de charges d’exploitation, donc tout le cash généré nous permet soit de rembourser notre dette, soit de financer les nouvelles acquisitions.

L’année 2008 a donc été très positive, avec du récurrent qui devrait se prolonger en 2009, c’est pourquoi d’ailleurs nous restons sereins pour le nouvel exercice. Notre bilan est donc très solide, avec, dans le détail, un BFR négatif de l’ordre de 2 millions d’euros composé d’un million d’euros dû à l’effet périmètre -Biosystem avait un bon BFR qui s’est maintenu en 2008-, et d’un million de gains grâce à la réduction du délai de paiement des clients.

Au total, notre gearing atteint 14%, ce qui est faible et nous permet de conserver intacte notre capacité de financement de la croissance externe pour les années qui viennent.

Pourriez-vous nous présenter la société Armure dont vous venez d'annoncer l'acquisition (activité, CA etc.)...
Armure est une société en position de leader historique sur les logiciels de gestion de l’assurance qualité, dans le métier de la biologie médicale. Fort de 800 clients, ils sont positionnés sur les laboratoires privés, qui représentent notre cœur de marché, mais également sur les laboratoires publics, dans lesquels nous avons mis un pied depuis l’acquisition de Biosystem.

Ils ont la particularité d’être interfacés avec tous les systèmes de gestion, c’est donc également un bon poste d’observation de nos confrères…

Aujourd’hui, nous avons 40% de base installée commune, ce qui signifie que 60% ne le sont pas, cela signifie aussi que là où nous avions un laboratoire sur deux équipé d’une solution DL Santé, nous en avons maintenant 6 sur 10…

Par ailleurs, les métiers de l’assurance qualité vont devenir totalement stratégiques dans la biologie, dans la mesure où le rapport Ballereau, repris par la ministre de la Santé, insiste sur la nécessité de faire accréditer tous les biologistes. Cette accréditation devrait d’ailleurs devenir obligatoire d’ici six ans ; or nous sommes déjà positionnés idéalement pour faire la meilleure offre sur ce marché-là.
 
Armure est-elle également présente à l’international ?
Non, cette société est principalement présente en France mais il est vrai qu’il s’agit probablement d’un produit qui pourrait s’ouvrir facilement sur l’Europe, puisqu'il est peu lié aux dossiers administratifs, à la sécurité sociale ou aux spécificités administratives de chaque pays…

Que représente cette entreprise en termes de chiffres ?
Aujourd’hui, son chiffre d’affaires est de 700 000 euros environ, avec seulement deux commerciaux -alors que maintenant, ils vont pouvoir profiter à plein de l’effet groupe. Les deux premiers mois ont déjà marqué une accélération, c’est-à-dire que les commandes ont été doublées sur janvier et février.

C’est également lié au fait qu’avant le rapport Ballereau, il y avait une sorte d’attentisme, mais depuis la publication du rapport en septembre dernier, les commandes augmentent très régulièrement. Autrement dit, les biologistes ont plus de visibilité et sont donc prêts à investir…

Avez-vous déjà fixé des objectifs pour son développement ?
Nous avons effectivement fixé des objectifs à Armure, mais c’est encore un peu délicat à communiquer… Mais il s’agit de taux de croissance ambitieux !

Quel bilan tirez-vous de l’intégration de Ginkoia ?
Pour mémoire, Ginkoia représente 2 millions d’euros de chiffre d’affaires, 10% de rentabilité d’exploitation, 700 000 euros de cash, et se compose de 23 personnes… Son modèle est essentiellement fondé sur le locatif, c’est-à-dire qu’ils ne vendent rien, ce qui assure une croissance régulière et une pérennité de sa marge brute.

Nos reporting sont déjà en place depuis janvier 2009, ça tourne donc «comme si nous y étions» et ça se passe très bien avec la direction. Nous sommes en train de voir avec elle, fonction par fonction, comment renforcer l’organisation afin d’accélérer la croissance, qui est d’ailleurs déjà très soutenue : Armure connaît en effet une croissance à deux chiffres de sa marge brute –de fait, en termes de reporting sur les deux premiers mois de l’année, nous sommes plutôt en avance sur nos objectifs.

Pour l’heure, nous sommes donc en phase de découverte et d’observation du marché -on rencontre les confrères etc.- avant de poser un diagnostic d’ici la fin du semestre et ensuite, de lancer un plan d’action…

Suite à cette acquisition, quel est l’endettement de DL Software ? Envisagez-vous de poursuivre votre croissance externe en 2009 ? De quels moyens financiers disposeriez-vous pour cela ?
On ne s’interdit rien, mais il faut d’abord trouver les dossiers respectant bien nos critères d’acquisition : soit il y a une synergie industrielle, soit nous sommes sur un nouveau métier auquel cas on regardera la taille et la qualité du segment de marché visé, la qualité de l’éditeur qui doit être rentable, la profondeur de la base installée, la position de leader ou co-leader de la cible.

Nous continuons donc à regarder des dossiers et nous n’excluons pas de faire encore des acquisitions. Nous n’avons pas de limitation en termes de moyens : nous disposons actuellement de 4 à 5 millions d’euros de cash, nos capacités de tirage non utilisées sont de l’ordre de 6-7 millions d’euros pour un total de 8 millions d’euros…

En outre, à chaque fois que nous faisons l’acquisition d’une société rentable, cette dernière dispose elle-même de capacités d’endettement, donc de leviers, c’est pourquoi finalement, nous n’avons aucune inquiétude pour réaliser entre 10 et 15 millions d’euros d’acquisition.
 
Avez-vous des secteurs privilégiés pour réaliser ces acquisitions ?

Nous suivons beaucoup de secteurs, par exemple, nous évoquions par le passé l’immobilier (agences immobilières, syndics etc.) or maintenant, nous avons tendance à moins regarder ce secteur…

Globalement, toutes les professions règlementées nous intéressent et il existe encore beaucoup de métiers intéressants et qui résistent bien…

Quels sont vos objectifs chiffrés pour l’exercice 2009 ?
Pour l’instant, nous sommes dans un contexte qui n’est pas différent de celui que nous avons connu au début de l’année dernière, c’est-à-dire que nous ne sommes pas, encore, impactés par la crise.

Nous annonçons donc une croissance de 15% du résultat d’exploitation pour l’année qui vient.

Début janvier, vous indiquiez ne pas trop ressentir les effets de la récession. Pourquoi d’après vous ?
En premier lieu, parce que nous sommes positionnés sur des secteurs sains. Et puis, nous avons un métier vital pour nos clients, puisque le logiciel de gestion est un peu le cerveau de nos clients, ils en ont donc vraiment besoin aujourd’hui plus que jamais dans la mesure où ce sont des outils de productivité.

Nous sommes par ailleurs positionnés sur des secteurs avec des contrats cycliques, surtout dans la santé ; le tourisme et le camping sont plutôt des secteurs défensifs –notre saison commerciale y est très bonne pour l’instant, c’est même la meilleure que l’on ait faite pour le moment- ; en revanche dans le négoce de matériaux, c’est un peu difficile mais ça l’était déjà l’année dernière, et c’est surtout lié à la réorganisation lourde que nous avons faite et qui impacte forcément notre activité, cela étant, notre carnet de commandes reste proche de celui de l’an dernier, c’est-à-dire que les derniers mois n’ont pas enregistré de modification du comportement de nos clients…

Globalement, nous sommes au-dessus de l’année dernière, et nous avons un bon carnet de commandes.

Quelle sera votre politique de dividendes cette année ?
Compte tenu du fait que nous sommes plutôt sereins sur notre présent, nous avons décidé de fortement augmenter le dividende, de 50%. En gros, cela représente 20% du résultat net avant amortissement du goodwill ce qui est pour nous le véritable indicateur.

Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy