Interview de Georges Liberman : PDG et fondateur de Xiring

Georges Liberman

PDG et fondateur de Xiring

«La banque va enfin devenir un marché domestique en France» (Xiring)

Publié le 21 Juillet 2009

Vous venez de publier un CA en hausse de 4,5% au second trimestre 2009, à 7,8 millions d’euros, ce qui porte le CA au premier semestre à 11,8 millions d’euros contre 12,9 millions d’euros à la même période un an plus tôt. Quel commentaire vous inspirent ces résultats ? A quoi attribuez-vous cette moindre performance par rapport à 2008 ?
Mon premier commentaire concerne l’appréciation que l’on peut avoir d’un trimestre pour la société Xiring, dans la mesure où notre activité n’est pas régulière mais ponctuée de grands contrats. Or l’observation du trimestre est, de ce fait, un exercice qui manque un peu d’intérêt : on peut le constater sur 2009, où nous avons eu un CA au premier trimestre à -25%, puis un CA au second trimestre à +4,5%...

La structure de notre business est actuellement construite comme ça et lorsque nous serons une très grosse société du CAC 40, ce ne sera plus le cas !

Cela étant, nous avions eu au premier trimestre de l’an dernier une performance plus élevée dans l’activité Santé, qui ne s’était pas reproduite à l’identique au premier trimestre 2009, en chute de 25%. Nous sommes donc au premier semestre à peu près au même niveau qu’en 2008, ce qui ne nous surprend pas puisque nous l’avions prévu en interne dans notre plan de marche.

Je suis donc plutôt satisfait de voir que l’on tient le rythme que l’on s’était fixé au premier semestre, sachant que nous sommes confrontés à un contexte où d’un côté, nos marchés sur le monde de la Santé ne subissent pas la crise -nous y sommes très performants d’où notre croissance forte sur ce marché-là de 73,1%-, et de l’autre côté, nous avons un marché de la Banque pour lequel nous n’attendions pas de miracles particuliers au premier semestre.

En effet, nous savions déjà au moment d’établir nos guidances pour 2009, que le premier semestre serait un semestre de récurrence de nos clients britanniques pour l’essentiel.

Vous aviez donné une guidance pour 2009 de 30 millions d’euros à plus ou moins 10%...
Nous l’avons effectivement fait en expliquant par ailleurs que le plus ou moins 10% était lié à ce qui allait se passer au second semestre, ainsi qu’au déploiement bancaire à cette même période.

Très schématiquement, nous nous étions dit que si le marché reprenait un peu de nerf, nous pouvions avoir deux gros déploiements au second semestre, si ce n’était pas le cas, on pouvait n’en avoir qu’un voire aucun, et nous serions donc dans le bas de la fourchette. Au total, nous visions donc 33 millions d’euros si nous avions deux grands déploiements bancaires, 30 millions s’il n’y en avait qu’un, et 27 millions s’il n’y en avait aucun de cette taille.

Nous avons progressé au premier semestre conformément à notre vision et à nos plans, et nous avons maintenant une vision du second semestre qui nous amène à constater que le secteur bancaire n’a pas repris une vraie dynamique sur les projets technologiques et qu’il y a des décalages qui sont en train de s’opérer.

Malgré ces décalages, nous constatons toutefois une reprise significative des projets. Autrement, il s’agit de décalages de marché, mais nous n’avons pas été confrontés à la perte d’un business, si bien que ce potentiel reste entier et nous allons l’adresser en 2010. Il faut en effet avoir en tête que le besoin de sécurité sur Internet n’a pas diminué, ce que montrent d’ailleurs certains chiffres de l’étude de l’Observatoire de la sécurité des cartes bancaires de la Banque de France : le commerce électronique représente ainsi 6% des transactions, et 51% de la fraude…

On peut donc penser que le commerce électronique va monter en charge, or on ne peut se permettre de faire croitre ce secteur de façon homothétique parce qu’il y a un vrai sujet sur la fraude.

Par ailleurs, le document de la Banque de France contient un certain nombre de recommandations sur l’utilisation de systèmes d’authentification forte, et on y voit très clairement les recommandations sur le fait qu’il est nécessaire que les banquiers obtiennent la preuve que la personne en train d’acheter sur Internet est bien la propriétaire de la carte bancaire.

Même si ce marché de la sécurisation n’est pas encore très concret au titre du second trimestre 2009, il reste que ce dernier se profile de plus en plus.

Quelle est la part récurrente de votre chiffre d’affaires ?
On peut quasiment dire aujourd’hui que sur le premier semestre, notre CA dans l’activité Banques est à 100% de la récurrence, et sur la partie Santé, on peut schématiquement dire que ce qui est en croissance fait partie des nouveaux business tandis que ce qui ne l’est pas, c’est de la récurrence, mais à plusieurs titres : le système le plus récurrent est celui sur lequel nous sommes opérateurs de mise à jour de cartes Vitale puisque cela repose sur des contrats de service de 3 ans, renouvelables automatiquement et prélevés directement auprès de 12 000 pharmacies en France ; ensuite, nous avons des récurrences du type extension de marché, continuation de marché, renouvellement de contrats etc.

Il y a donc bien une récurrence assez forte de notre chiffre d’affaires, ce qui nous permet de maintenir des résultats malgré la crise, notamment dans notre activité avec les banques…

Quelle est la structure de votre chiffre d’affaires en termes d’activités ?
On peut considérer, de manière caricaturale, que Xiring réalise la moitié de son CA dans la Banque et l’autre moitié dans la Santé, et que nous réalisons la moitié en France et l’autre moitié à l’international.

On peut par ailleurs préciser que la moitié du CA réalisé à l’international vient de nos activités avec les banques, et qu’en France, nous réalisons 50% du CA dans la Santé.

Comptez-vous maintenir cet équilibre en l’état ?
Non dans la mesure où la France, par exemple, démarre enfin dans le monde bancaire avec en particulier le groupe des Banques Populaires, et puis un certain nombre d’autres banques est en train de se mettre en ordre de marche afin d’intégrer ces technologies.

La banque va donc enfin devenir un marché domestique. Par ailleurs concernant la santé, nous avons fait en 2009 notre entrée sur le marché allemand à la fin du premier semestre, or il faut noter que ce marché est en train d’équiper 90 millions d’individus avec une carte de type Vitale, ce qui devrait en faire un marché plus significatif que la France.

Au total, la santé va donc s’internationaliser en dehors de la France, et la banque va se nationaliser en France. L’équilibre de 50/50 devrait donc évoluer…

Quels sont vos estimations en termes de marges d’exploitation sur le premier semestre et de chiffre d’affaires sur l’exercice 2009 ?
Nous avons été amenés à communiquer de façon différente de nos habitudes, puisque habituellement, nous communiquons sur le CA en juillet et sur le résultat en septembre.

Cette année, nous avons été amenés à donner des indications sur les résultats pour indiquer que notre résultat d’exploitation serait supérieur à 15%. Ceci est lié d’une part, à un mix produit un peu différent, et d’autre part, à la maîtrise des coûts.

Quels sont vos projets de développement sur le reste de l’exercice 2009 et à plus long terme ?
Jusqu’à ce jour, nous avons toujours fait de la croissance organique avec un rythme de multiplication par deux tous les deux ans, que l’on ne tiendra par forcément en 2009 du reste.

Nous avons par ailleurs beaucoup de développements en matière de technologies et d’offres produits, puisque l’on dépense plus de 13-14% de notre revenu en R&D…

Quelle sera votre politique de dividendes ?
Jusqu’à ce jour, nous avions une politique de non distribution de dividendes, puisque nous considérions que Xiring était plutôt une valeur de croissance qu’une valeur de rendement.

Or une logique de premier niveau, pas forcément boursière d’ailleurs, voudrait que, en multipliant le CA par deux tous les deux ans, on crée de la valeur pour l’actionnaire, sachant que sur 5 ans, nous avons augmenté de 2,5 points la profitabilité tous les ans. Autrement dit, nous sommes passés de 0 à 12,8 en 5 ans avec une progression régulière du résultat d’exploitation.

Cette création de valeur, on ne la voit pas aujourd’hui sur notre cours de bourse, mais elle existe. Notre politique aujourd’hui consiste donc à dire que nous préférons créer de la valeur en investissant pour préparer la croissance des deux prochaines années, plutôt que d’acheter de la valeur boursière en distribuant du dividende.

Il est vrai que cette création de valeur par la performance de l’entreprise a été quelque peu contrecarrée par la tendance de fonds des marchés boursiers, plutôt à la baisse, mais nous espérons que la baisse ne va pas durer…

Propos recueillis par N.S.