Interview de Marie-Ange Andrieux : Directeur des Partenariats Deloitte, Co-président de la Commission GPS Innovation et Immatériel

Marie-Ange Andrieux

Directeur des Partenariats Deloitte, Co-président de la Commission GPS Innovation et Immatériel

Quels leviers pour une croissance autre et durable ?

Publié le 21 Septembre 2010

Les besoins des consommateurs sont passés de l'"avoir plus" au "vivre mieux et autrement", évolution irréversible qui structure les enjeux d'une économie où la compétitivité, la croissance et l'emploi dépendent de la capacité des entreprises à délivrer une offre répondant à ces besoins immatériels (santé, sécurité, savoir-être et éthique, gains de temps, développement durable, confiance...) avec des actifs immatériels.


Les entreprises de services en sont convaincues. La Commission Innovation et Immatériel du GPS publie 35 propositions opérationnelles pour actionner ces leviers d'une croissance autre pour une performance durable : 20 bonnes pratiques pour dynamiser le capital immatériel des entreprises et 15 pistes pour une politique de l'immatériel.
Créer de la valeur long terme en construisant une relation co-créative avec les clients et les parties prenantes (4 propositions) pour structurer des liens de confiance avec l'écosystème de l'entreprise. Activer l'innovation au cœur du dispositif de compétitivité : capitaliser sur la créativité interne et celle des communautés externes, sous condition d'une amélioration des dispositifs du crédit d'impôt recherche et de la propriété intellectuelle (6 propositions). Optimiser le potentiel des systèmes d'information (8 propositions) : cartographier, mesurer et évoluer vers un reporting extra-financier de la valeur immatérielle pour enrichir la communication aux marchés. Le temps des entreprises est arrivé, celui où les consommateurs exigent des valeurs au-delà des marques. Notoriété, image et réputation deviennent des actifs stratégiques valorisables (5 propositions). Quand les valeurs font la valeur, le capital humain, s'il est aligné avec la stratégie (11propositions), est au cœur de cette dynamique des comportements professionnels optimisés par l'efficience collective.
Si l'économie de l'immatériel figure au cœur de la stratégie de l'Europe de la connaissance, le bilan est pour l'instant mitigé et l'Europe accuse un retard dans ses objectifs d'innovation. L'UE reste distancée par les Etats-Unis pour le nombre de brevets déposés ou les exportations de produits high tech. Les pays émergents, BRIC particulièrement, ont intégré ces enjeux et accélèrent leurs efforts dans l'immatériel : à titre illustratif, l'analyse comparée (Banque mondiale) de la répartition et de l'investissement en capital humain dans le monde est édifiante avec BRIC enregistrant 21,1%du capital humain mais 34,1?l'investissement, l'Europe se situant respectivement à des taux de 16%. Certains pays du Moyen-Orient misent sur l'immatériel en engageant une démarche pro-active pour s'y constituer un patrimoine national (achat de licences de marques publiques telle que le Louvre ou la Sorbonne) à la rescousse d'une richesse en matières premières non renouvelables désormais limitée.
Les enjeux macro-économiques sont considérables : en France, jusqu'à 1% de croissance
potentielle. Se mobiliser pour exploiter ces nouveaux gisements de richesse et d'emploi autour d'une politique cordonnée de l'immatériel devient une nécessité. D'où la 35e proposition : pourquoi pas un Secrétariat d'Etat à l'Economie de l'Immatériel et de la Connaissance ?


Article paru dans FranceMagazine n°27