Interview de Haiyan  Li Labbé : Directeur des projets Asie chez OFI AM

Haiyan Li Labbé

Directeur des projets Asie chez OFI AM

Nous sommes sur de très bons points d'entrée pour se positionner sur le marché actions chinois

Publié le 28 Mars 2011

Le marché chinois a enregistré une performance très décevante l’année dernière, -14%. De quelle manière l’expliquez-vous ?
Le marché a été tiré à la baisse par les financières qui représentent 32% de l’indice, banques, compagnies d’assurances et sociétés immobilières qui ont souffert d’une politique macroéconomique défavorable, notamment pour maitriser la hausse des prix du marché immobilier.

Quelle perspective d’évolution envisagez-vous ?
A moyen, long terme, nous sommes sur de très bons points d’entrée pour se positionner sur le marché chinois. La valorisation du marché est très attractive, aux alentours de 14 fois les bénéfices avec une estimation de croissance de bénéfice par action de 25% en 2011 pour les valeurs domestiques (A-Share), et 11 fois les bénéfices et 20% de croissance de bénéfices par action pour les valeurs chinoises cotées à Hong Kong (H-Share).

Sur 2011, je suis prudemment positive sur la première moitié de l’année et positive sur le second semestre. Le marché a progressé de 4% depuis le début de l’année. Le potentiel de progression serait de 10% supplémentaires.

Quels pourraient être les catalyseurs du marché ?
Un premier catalyseur pourrait résider dans les éventuels bons résultats des sociétés. Nous allons entrer dans une période intensive de résultats fin mars, début avril. Les perspectives bénéficiaires établies par le consensus ont déjà été intégrés dans les cours, mais nous nous attendons à des résultats encore meilleurs.
On raisonne ici valeur par valeur par rapport à notre watch list. 60% des sociétés ont annoncé des meilleurs résultats.
Un second catalyseur potentiel pourrait résider dans une baisse des prix des matières premières et de consécutivement dans une baisse de l’inflation.

Quel regard portez-vous sur les nouvelles introductions en bourse ?
Nous ne sommes pas très attirés par les introductions en bourses. Le temps donné aux investisseurs d’étudier une nouvelle société est très limité. Il y a beaucoup de spéculation pendant les premiers jours de trading.

Quelle est votre anticipation s’agissant du resserrement monétaire ?
On pense que le marché appréhende d’autres mouvements de resserrement monétaire.
Le marché est aujourd’hui prudent. Je vois très peu de downside à partir de là. A chaque réalisation de la hausse des taux ou du ratio de réserve, le marché devrait être un peu plus rassuré, et plus sensible à la moindre bonne nouvelle.

Quelle est votre vue sur le yuan ?

Depuis le mois de juin, le yuan s’est apprécié de 3,9% par rapport au dollar. Le consensus table sur 3-4% d’appréciation par an. L’économiste de Nomura qui est le plus agressif sur le marché attend 6% d’appréciation.

Quels vous semblent être les principaux risques à surveiller ?

La hausse des matières premières causée par l’instabilité politique en Libye et dans d’autres pays arabes constitue le risque le plus important pour le marché financier chinois. Nous ne savons pas combien de temps la hausse va durer.

Le gouvernement a annoncé un taux de croissance de 7% pour les 5 ans à venir. Ce n’est pas assez pour créer suffisamment d’emplois. Concernant les grandes lignes économiques prévues par le 12 plan quinquennal qui indique une transition économique profonde, la question se pose de savoir quel sera le degré de la force d’exécution du gouvernement chinois, notamment les gouvernements locaux, Des subventions très importantes dédiées aux secteurs comme le réseau de TGV, le secteur de la santé et le développement durable ont été annoncées, seront- elles bien utilisées et bien distribuées ?

Quid des répercussions des récents évènements survenus au Japon sur l’économie chinoise ?

En absolu, les exportations de la Chine envers le Japon ne devraient pas être impactées par le séisme. Au contraire, en tant que voisin proche, la Chine va exporter certainement plus de charbon, de ciment et d’aliments au Japon.

De quelle manière considérez-vous les problématiques liées à l’arrêt des subventions, à la spéculation sur le marché immobilier ou encore à l’inflation ?

L’arrêt des subventions va être lissé dans le temps. Des effets à court terme peuvent se faire ressentir. A long terme, l’engouement de la consommation persistera d’autant plus que l’on voit des augmentations de salaires de base importantes.

La Chine s’efforce de diminuer la spéculation sur le marché immobilier. C’est la première classe d’actifs d’investissement pour les chinois. Le contrôle est une bonne chose pour plus de régulation et de stabilité.

Une inflation modérée, stable n’est pas une mauvaise chose pour l’économie. Par rapport à beaucoup de pays émergents, l’inflation de la Chine n’est pas si élevée que cela.
Le gouvernement a une cible de 4%. Je crois au pragmatisme du gouvernement. Cette inflation devrait ainsi retomber pendant la 2e moitié de l’année.
On attend deux hausses supplémentaires du taux de 25 bp chacune et deux hausses du ratio des réserves qui passerait de 20 à 21. L’évolution se fera en fonction de la montée des prix des matières premières, donc de l’inflation.

La hausse des prix des céréales a été de 12% l’année dernière. Cette hausse n’est pas forcément une mauvaise chose. Elle a permis une redistribution des richesses aux paysans. Ces derniers auront plus de pouvoir d’achat pour consommer.

Propos recueillis par Imen Hazgui