Interview de Thierry  Gautier  : Gérant au sein de GSD Gestion

Thierry Gautier

Gérant au sein de GSD Gestion

Parmi nos principales convictions dans les valeurs pétrolières : Antrim, Longford Energy, Western Zagros, Penn Virginia

Publié le 15 Avril 2011

Quel regard portez-vous sur le rallye du prix du pétrole depuis le début de l’année ?
Ce rallye qui s’explique par les soulèvements populaires au Moyen Orient et en Afrique et par l’incident nucléaire survenu au Japon récemment a été trop fort. Le prix du baril est monté un peu plus vite que ce que nous avions escompté. En tant que gérant d’actions, cette envolée du prix du baril ne constitue pas une bonne nouvelle. Les valeurs pétrolières ont besoin d’un environnement stable pour travailler de manière optimale. Une forte volatilité n’est jamais une bonne nouvelle.
Nous avons récemment eu une correction, due à différentes annonces selon lesquelles la croissance économique ralentirait, mais cette correction a été très temporaire.

Justement, un certain nombre de rapports de l’AIE, de la Coface ou encore de l’OPEP ont avancé des impacts déjà enregistrés ou à venir de la hausse du prix du pétrole sur la demande et la croissance mondiale. Certains observateurs comme Jacques Attali sont allés jusqu’à parler de troisième choc pétrolier. Qu’en pensez-vous ?
Nous avons atteint un seuil de douleur pour les économies. Christine Lagarde a récemment revu à la baisse ses prévisions de croissance pour l’hexagone en tablant sur un prix du baril à 100 dollars et a mis en garde sur le fait qu’il ne faudrait pas que le prix du baril monte beaucoup plus auquel cas la facture énergétique serait défavorable et la marge de manœuvre fortement réduite. Encore une fois, une montée trop rapide des prix du brut est une mauvaise chose, tant pour les sociétés pétrolières qui évoluent dans un environnement instable, que pour la croissance économique et les finances des états importateurs.

Comment voyez-vous le prix du baril évoluer au cours de ces prochains mois ?
Nous tablons sur une normalisation de la situation au Moyen-Orient qui pour le moment reste une poudrière. Il ne serait pas surprenant que nous terminions l’année avec un baril entre 100 a 110 dollars et notre vue sur le long terme est haussière.

Certains tablent sur un embrasement de l’Arabie Saoudite…
Ce n’est pas ce que l’on souhaite et ce n’est pas notre scénario central. Alors que la Libye représente près d’1 .5 million de barils par jour et a déjà causé quelques déséquilibres, l’Arabie Saoudite en représente 8 ! Mais l'Arabie Saudite n'est pas comparable a la Lybie; ils partagent beaucoup plus la richesse des revenues petroliers avec des mesures exceptionnelles en cas de troubles. Donc le risque d'embrasement est limité.

De quelle manière ce fort rallye du prix du pétrole a-t-il influencé votre gestion ?
Notre exposition au prix du baril a changé. Jusqu’à présente notre vue haussière sur le prix du baril nous avait conduit à utiliser quelques trackers dans notre portefeuille. Aujourd’hui nous avons allégé ce type d’exposition avec un biais haussier sur le prix du baril.

Quelles sont vos principales convictions dans un tel environnement ?

Dans un cadre actuel assez volatile nous n'avons pas de convictions fortes sur des societes specifiques, priviligeant une gestion prudente et diversifiee. Nous pouvons néanmoins mentionner Antrim. C’est une petite capitalisation qui fait 200 millions de dollars. La société a une importante position en mer du nord, une production en Argentine, de bonnes bases de réserves, de bons projets en cours de développement. Leur activité d’exploration intensive réduit le risque du portefeuille global. Un partenariat stratégique a été conclu avec Premier Oil. La société connait donc de la croissance interne et serait candidate pour un rachat. L’action vaut 1 dollar canadien et peut évoluer jusqu’à 1,5 dollar.

D’autres valeurs que nous aimons sont Longford Energy et Western Zagros. Ces sociétés ont la particularité d’avoir des programmes d'appreciation au Kurdistan. Il y a un risque politique, mais dans le cas où la zone reste stable, le potentiel d’appréciation de ces titres peut être significatif ; un doublement de ces valeurs est possible .

Vous regardez les dossiers qui ont un biais sur le gaz avec un peu plus d’attention ?
Nous pensons que face aux récents évènements, les sociétés de gaz pourraient être amenées à palier le déficit énergétique causé par les inquiétudes entourant le Japon et plus généralement la filière et les programmes nucléaires. Nous tablons sur une remontée du prix du gaz.
Dans cette logique, une de nos principales convictions restent Noble pour leur Gaz en Mediterannee et Penn Virginia aux Etats Unis, une mid cap américaine qui est sur l’onshore. Pour cette dernière, le cours de bourse divisé par ses réserves en huile et en gaz est faible comparé à ses pairs. Le titre vaut 15 dollars américains et pourrait évoluer jusqu’à 20-25 dollars. Une demande en gaz accrue pourrait aussi revaloriser Heritage Oil qui a fait la plus grosse decouverte en 30 ans au Kurdistan tout pres du projet de pipe Nabucco. Nous avons également renforcé cette valeur dans notre portefeuille.

Détenez-vous les majors pétrolières ?

Oui, essentiellement comme le socle de notre portefeuille dans la mesure où il n’y a pas trop de valeur ajoutée à attendre de ces valeurs par rapport à l’indice. Notre exposition a ces valeurs reste aux alentours de 20%.

De combien de lignes se compose votre portefeuille ?

Nous avons 45 valeurs à l’heure actuelle.

Propos recueillis par Imen Hazgui