Interview de Dominique Rencurel : Directeur Général d'Orkos Capital, Vice Président de la Commission Venture de l'AFIC

Dominique Rencurel

Directeur Général d'Orkos Capital, Vice Président de la Commission Venture de l'AFIC

La communication sur l'immatériel va devenir primordiale dans le futur

Publié le 23 Août 2011

Le capital immatériel représente plus de 60% de la capitalisation boursière des sociétés européennes, pensez-vous que le management ait clairement identifié cette importance ?
Le capital immatériel représente parfois beaucoup plus que 60% de l’actif d’une société, notamment, dans les nouvelles technologies. Les dirigeants d’entreprise commencent à prendre conscience des enjeux de l’immatériel, mais de façon encore hétérogène. En effet, les grandes entreprises cotées en bourse, sensibles à l’évolution de leur cours, s’intéressent davantage à l’immatériel et à leur communication à ce sujet que de plus petites structures.

Quels sont les actifs immatériels les plus stratégiques pour une entreprise ?
On ne peut pas faire de généralisation, chaque entreprise est un cas particulier où certain actif immatériel peut être plus stratégique qu’un autre. En tant qu’investisseur en capital-risque, particulièrement sur des valeurs dans les secteurs des services et des technologies de la communication, je porte une attention particulière à la propriété intellectuelle des sociétés et à sa protection. En effet, le capital innovation, soit la capacité de l’entreprise à innover en mobilisant de manière optimale son capital humain et son organisation, ne vaut rien si l’organisation ne protège pas bien ses innovations. Bien entendu, le capital marque reste l’actif immatériel le plus reconnu et le mieux valorisable : c’est le premier aspect intangible des entreprises qui a été identifié. Cependant il ne faut pas oublier d’autres dimensions importantes, telles que l’humain ou le relationnel de l’entreprise.

Pensez-vous que les entreprises communiquent de manière efficace sur leur capital immatériel ? Les parties prenantes des entreprises prennent-elles suffisamment en compte cette information ?
Les entreprises ne savent pas communiquer sur ce sujet. Il y a un clair problème de mesure : alors que les enjeux de l’immatériel deviennent de plus en plus importants, il manque clairement aux entreprises des indicateurs et des moyens de communiquer à ce sujet. Les rapports annuels des grandes entreprises, bien qu’intégrant de plus en plus de considérations extra financières, restent peu lisibles. Il y a un réel besoin d’outils et de références pour améliorer cette communication qui pourrait d’autant mieux être intégrée dans la perception des investisseurs par exemple.

Comment développer de tels outils ? Pensez-vous que la création d’un référentiel international, et notamment l’élaboration d’un rapport unique serait une solution pour améliorer cette communication ?
La communication sur l’immatériel va devenir primordiale dans le futur. À l’heure présente, l’enjeu réside dans la conciliation entre les enjeux financiers et les enjeux plus qualitatifs. En ce sens la recherche académique pourra apporter des réponses puisque certains laboratoires s’intéressent à ces problématiques. Le principal problème consiste à quantifier des éléments qualitatifs.
L’édition de normes pourrait être une solution, mais elles doivent être le fruit d’une réflexion globale et concertée. Il est évident que les normes devraient se décliner par secteurs : on ne peut pas comparer les considérations de sécurité entre une entreprise dans le nucléaire et une entreprise d’un autre secteur. Un rapport unique relève d’un certain idéal, mais il présente des risques, notamment en termes de partialité de l’information à communiquer. Il faut donc une autorité juridique indépendante et légitime et surtout éviter une privatisation du sujet.

Interview réalisée dans le cadre de la Tribune Sciences Po de l’immatériel, dirigée par Marie-Ange Andrieux, Deloitte.

Biographie : Directeur Général et Co-fondateur en 2007 d’Orkos Capital, société de gestion de fonds de Private Equity spécialisée dans les domaines des technologies de l’information, des télécommunications, de l’internet et des médias.1998- 2007 : il crée le fonds d’investissement ETMF II LP, fonds indépendant de Private Equity dans le secteur des télécommunications et médias. En 1992 : il rejoint la BANEXI, banque d’affaires du groupe BNP Paribas, en tant que directeur fusions/acquisitions et investissements au sein du département «industries de la communication», auparavant, il anime une direction d’agence commerciale puis intègre l’inspection générale du groupe BNP où il pilote pendant 4 ans des missions d’audit en France et à l’étranger
Diplômé de l’université de Dauphine, il enseigne également en Master 2 à Dauphine et à la Sorbonne en Master 2 Finance dans le cadre de l’IAE. Vice Président de la Commission Venture de l’AFIC

-