Interview de Fabrice Cousté : Directeur Général de CMC Markets France

Fabrice Cousté

Directeur Général de CMC Markets France

La TVA sociale est un peu un retour à une forme de protectionnisme, mais cela va dans le bon sens

Publié le 18 Janvier 2012

Qu'est-ce que la TVA sociale proposée aujourd'hui par le gouvernement ?
La TVA sociale consiste à faire basculer sur la TVA une partie des charges qui pèsent sur le travail, donc les cotisations patronales voire salariales, dans l'espoir de donner aux entreprises les moyens de soutenir l'emploi et renforcer leur compétitivité.

Cette mesure interviendrait dans un contexte où les perspectives de croissance sont faibles, sinon nulles, où l'emploi doit absolument être soutenu ainsi que la compétitivité.

Ainsi l'allègement des charges apparait nécessaire parce que nous savons que sur un coût de 100 pour la France et l'Allemagne, les Français payent 50 en charges contre 39 pour nos voisins Allemands...

Par ailleurs, d'après le rapport de janvier du Centre d’observation économique et de Recherche pour l’Expansion de l’économie et le Développement des Entreprises [Coe-Rexecode], la part des exportations françaises de marchandises a reculé de 5,7 à 3,3% entre 1990 et 2011. Cela signifie que le commerce international est une véritable compétition où il ne faut plus être trop angélique, car si au bout d'un moment on ne fait plus qu'importer des produits à bas coût et qu'on délocalise, les emplois disparaissent... Et puis il y a une forte asymétrie dans le commerce international: la Chine, et d'autres « partenaires commerciaux », continuent d'imposer des barrières à l'entrée de produits importés sur leur marché, en particulier les produits de luxe où nous sommes champions, alors que nous nous sommes laissés imposer des règles par l'OMC qui finalement nous font perdre en compétitivité.

C'est donc un peu un retour à une forme de protectionnisme, mais cela va dans le bon sens.

Mais avec cette TVA sociale, les prix risquent d'augmenter pour tout le monde...
En effet, cela semble assez inégalitaire dans la mesure où il n'y a pas de progressivité sur cet impôt, puisque tout le monde paye la TVA sur tous les produits. En revanche, nous savons que nous avons besoin de lever plus d'impôts, il nous faut donc trouver de nouvelles ressources et la TVA qu'elle soit sociale ou pas, sera de toute façon augmentée.

Dans la mesure où la base taxable en France est faible -50% des Français ne payent pas l'impôt sur le revenu- il nous faut augmenter un impôt doté d'une large assiette. Tous les pays l'ont fait, à l'instar de l'Allemagne qui a augmenté fortement ses taux de TVA en 2007 -de 16 à 19%- ou du Danemark qui, entre 1987 et 1992, avait augmenté le plafond de sa TVA de 22 à 25%, tout en ramenant les cotisations patronales de 50 à 30%. De déficitaire, l'Allemagne est ainsi devenu un pays en excédent et tout ça sans effet inflationniste notable, ce qui est toujours le danger en période de forte consommation où la tension sur les prix peut provoquer une augmentation à la fois de la TVA et des tarifs. Aujourd'hui, la croissance est plutôt ralentie, le moment est donc propice à une hausse de TVA parce qu'il n'y aura pas forcément de tension inflationniste. En France, on peut donc s'attendre à une hausse de TVA de 3 à 4 points.

NS