Interview de Jerôme Marsac : PDG de Cybergun

Jerôme Marsac

PDG de Cybergun

Cybergun a été trop ambitieux dans sa volonté de se développer dans le secteur des jeux vidéo et en paie le prix fort sur l'année écoulée

Publié le 16 Juillet 2012

Cybergun vient de publier des résultats 2011 en forte baisse, avec une perte nette de 22,6 millions d’euros, contre un bénéfice de 4 millions en 2010. Que s’est-il passé ?
L’essentiel de la perte vient d’une dépréciation sur goodwill liée à l’acquisition de la société I2G Microprose en avril 2011. Cybergun a été trop ambitieux dans sa volonté de se développer dans le secteur des jeux vidéo et paie le prix fort sur l’année écoulée en termes de rentabilité. Le catalogue de jeux d’I2G était orienté sur la plateforme Kinect de Microsoft. Il y a 18 mois, celle-ci était promise à un bel avenir. Force est de constater qu’elle n’a pas tenu ses promesses, dans un secteur des jeux vidéo lui-même malmené en 2011. C’est pourquoi nous avons pris la décision de déprécier une partie de nos actifs dans ce domaine.

Qu’en est-il de votre « cœur de métier », la vente de répliques d’armes sous licence et le tir de loisir ?
L’activité cœur de métier a profité de la poursuite d’une croissance très soutenue, en particulier au premier trimestre 2011. Mais les coûts d’achats en Asie étaient élevés et ne nous ont pas permis de réaliser des marges Ebitda comme celles que nous réalisions historiquement. L’autre déception réside dans notre activité jouets (pistolets à eau) qui a vu une baisse importante du volume d’affaires surtout sur la fin de l’année 2011. Au final, notre résultat opérationnel courant est en retrait significatif (2,5 millions d’euros contre 7,5 millions en 2010, ndlr).

Vous avez annoncé un recentrage sur votre cœur de métier ainsi qu’un désendettement du groupe. Est-ce à dire que vous abandonnez vos ambitions dans les jeux vidéo ?
Nous avons décidé de ne pas lancer de nouveaux investissements dans ce domaine et de nous concentrer, au cours des deux prochaines années, sur notre désendettement. Pour autant, les investissements déjà réalisés dans les jeux vidéo, avec par exemple le jeu en ligne War Inc, nous permettent d’envisager l’avenir sur notre cœur de métier de façon plus sereine. Ce jeu ‘free to play’ (gratuit) est un vecteur fort de communication auprès de nos clients car il met en valeur nos produits au sein même du jeu. Cela nous permet de toucher des jeunes consommateurs partout dans le monde.

Quels sont vos prévisions pour l’année en cours ?
Nous n’avons pas donné de guidance pour l’année en cours. L’année a démarré très modérément avec une baisse de l’activité dans nos différentes filiales mais nous avons la chance d’être un acteur mondial et diversifié. Les baisses de ventes que nous subissons en Espagne, par exemple, sont compensées par l’Amérique du Sud où nous livrons depuis quelques mois de nouveaux clients. Notre force de commercialisation est également très importante, avec plus de 10 000 revendeurs à travers le monde. Mais l’objectif prioritaire est le désendettement. Les premiers effets du programme de réduction des stocks mis en oeuvre depuis septembre 2011 ont permis de ramener le montant des inventaires à 29 millions d’euros, soit une amélioration de cinq millions d’euros en seulement 6 mois. L’objectif du Groupe est de réduire encore de 8 millions le niveau des stocks au cours de l’exercice 2012, et d’adapter ses charges.

Quel message souhaitez-vous adresser à vos actionnaires ?
Le groupe a multiplié sa taille par 10 en dix ans, et absorbé quasiment 40 millions d’euros d’investissements ces deux dernières années. La digestion de tout cela a été plus difficile que prévu en 2011 avec des coûts d’acquisitions qui sont passés en charges. Mais il existe des marges de manœuvres importantes dans le cadre de notre programme de désendettement, qui devrait commencer à porter ses fruits dès cette année. Aujourd’hui tout le monde relève ses manches. Moi le premier, en tant qu’actionnaire principal mais aussi les managers qui sont le deuxième actionnaire de l’entreprise.

Propos recueillis par François Schott