Interview de Ricardo  Santos  : Économiste au sein de la banque BNP Paribas

Ricardo Santos

Économiste au sein de la banque BNP Paribas

L'Espagne ne devrait pas formuler officiellement sa demande d'aide avant octobre

Publié le 08 Août 2012

Selon vous, une demande officielle d’une aide supplémentaire de la part de l’Espagne semble très difficile à éviter. Vous estimez qu’il y a eu un changement dans la manière de communiquer du premier ministre espagnol, Mariano Rajoy. Vendredi dernier, ce dernier semblait plus enclin à considérer une demande. Pourriez-vous nous expliquer ce qui vous a conduit à cette conclusion ?
Contrairement à la conférence tenue jeudi avec le premier ministre italien, Mariano Rajoy n’a pas écarté vendredi la possibilité de formuler une demande auprès du Fonds européen de stabilité financière. Il a indiqué qu’il agirait dans les meilleurs intérêts de l’Espagne et qu’aucune décision définitive n’avait été prise à ce stade. Plus tard, lors de la même conférence de presse, M Rajoy a précisé que cette demande dépendrait des détails du programme de rachats des titres de dette de la Banque central européenne, ce qui suppose au final que le gouvernement espagnol réfléchit sérieusement à cette option.
Plus important encore, le fait que seulement un jour après la conférence de presse de Mario Draghi, M Rajoy ait déjà exprimé des doutes sur la réticence manifestée jusque là à l’égard de la sollicitation de cette nouvelle aide extérieure montre encore une fois que le gouvernement espagnol a décidé d’ouvrir la porte à cette éventualité.

Selon M Rajoy, la donne n’est pas la même si la BCE accepte de se porter acquéreuse de titres de dette à 6 mois, à 3 ans ou à 5 ans. Qu’est-ce que cela vous évoque comme commentaires ?

Par ces propos, M Rajoy laisse entendre que le gouvernement espagnol évaluera, avant de solliciter une aide, de quelle manière les rachats de la BCE peuvent influencer les projets d’émissions obligataires du pays et quel montant il sera nécessaire de réclamer auprès du FESF/MES.

Avez-vous une idée du montant que pourrait demander l’Espagne ?
A ce stade, cela n’est pas clair. Cela dépendra des intentions du plan d’aide. Celui ci aura-t-il une cible en termes de montant ou en termes de duration.
Vous considérez que l’Espagne a encore du temps pour formuler une demande officielle d’aide…
Les besoins de liquidités du pays devraient se faire le plus ressentir en octobre. Le pays devra alors rembourser 20 milliards d’euros.

Cette aide pourrait alors être demandée soit après que la BCE ait donné les détails de son intervention ou si la situation financière venait à se dégrader fortement dans d’autres grandes régions espagnoles. Quelle hypothèse vous semble la plus plausible aujourd’hui ?
Je pense que les deux hypothèses ont autant de chances de se vérifier dans le même horizon de temps. Les détails de l’intervention de la Banque centrale européenne ne devraient pas être dévoilés avant mi-septembre ou même octobre.
Les besoins de refinancement des régions constituent déjà une préoccupation. Ces besoins devraient être encore plus critiques d’ici octobre. Ainsi, même si d’autres régions suivent le pas de Valence ou de Murcie, et se voient contraintes à taper dans les lignes de crédit du gouvernement, cela devrait s’observer uniquement après octobre. Il est important de mentionner que le mécanisme de financement des régions est pour le moment assuré, en ce que le gouvernement espagnol a décidé de puiser dans la loterie espagnole à hauteur de 6 milliards d’euros.

Propos recueillis par Imen Hazgui