Interview de Jean Charles  Decaux :  Président du Directoire et Co-Directeur général de JCDecaux

Jean Charles Decaux

Président du Directoire et Co-Directeur général de JCDecaux

Au-delà de CBS, nous étudions à ce jour de nombreux autres dossiers en matière d'acquisition

Publié le 11 Mars 2013

Pourriez-vous commenter en quelques mots vos résultats de l’année 2012 ? Alors que le chiffre d’affaires est en hausse de 6,5%, le bénéfice net est en baisse de 23%. Comment l’expliquez-vous ?
La baisse du bénéfice net vient principalement de notre activité en Europe du sud. Elle a été compensée en partie par une bonne dynamique en Asie Pacifique. Il est à noter que malgré la contraction du bénéfice, nous sommes parvenus à maintenir une rentabilité forte dans les autres zones géographiques où nous sommes présents. La marge opérationnelle s’est ainsi accrue de 3,5%.

Le résultat net part du groupe a été impacté par une charge de dépréciation. Pour quelle raison ?

Le résultat net opérationnel avant dépréciation est en diminution de 2,7% à 316 millions d’euros. La base à la fin de l’année 2011 a été défavorable. L'impact total de la dépréciation sur le résultat net qui s’élève à 44,5 millions d’euros reflète essentiellement une perte de valeur dans l’activité de l’affichage en Europe du sud et en Ukraine.

Vous tablez sur un premier trimestre 2013 relativement compliqué en raison de « difficultés accrues en Europe ». Qu’entendez-vous par là ? Quid du reste de l’année ?
Le marché publicitaire européen connaît une conjoncture défavorable. Les incertitudes économiques sont persistantes. Le consensus table sur un recul du marché français de 2% à 3%. Celui-ci avait fléchi en 2012 de 2%.
JCDecaux a su surperformer, une année de plus, dans ce contexte de baisse. Nous n’avons pas pour habitude de donner des prévisions chiffrées pour l’ensemble de l’année. Ces estimations sont d’autant moins évidentes à donner que la visibilité reste réduite.

Vous souhaitez vous appuyer, afin de vous développer, sur le concept de « mobilier urbain publicitaire » et sur les marchés émergents ? En quoi cela consiste-t-il au juste ? Mis à part le Brésil, quels autre horizons envisagez-vous du coté des émergents ?
Nous entendons par « mobilier urbain publicitaire » tous les services visant à améliorer la vie des citoyens dans les villes que nous finançons par le biais des revenus publicitaires. Cela comprend les abris d’autobus, les vélos en libre service… Nous œuvrons au développement de ce « mobilier urbain » dans l’ensemble des grandes villes où nous sommes implantés. Pour ce qui est des pays émergents dans lesquels nous souhaitons renforcer notre activité, nous trouvons les pays d’Asie Pacifique, en particulier la Chine, des pays d’Europe centrale, du Golfe (Emirats arables unis, Qatar), et certains pays africains.

Les Etats-Unis pourraient aussi constituer un moteur pour cette année. Vous prévoyez d’installer 34 panneaux à Chicago. Quelles autres grandes villes sont dans les starting-blocks ?
Nous sommes déjà installés à Los Angeles, à Boston, à Chicago, à San Francisco. L’idée est d’intensifier notre présence dans ces grandes villes.

Le lancement d’autres nouveaux produits ou nouveaux services est il à attendre au cours des prochains mois ?
Nous travaillons dessus. Nous procéderons à des lancements au cours de cette année dans nos trois segments : le mobilier urbain, la communication dans les transports, l’affichage. Les annonces se feront plutôt au cours des troisième et quatrième trimestres.

Vous étudiez sérieusement un possible rachat de CBS Outdoor France. Vous êtes en concurrence avec Clear Channel sur le dossier. Plusieurs obstacles sont mis en avant eu égard à la capacité de JCDecaux à finaliser cette opération : la nécessaire rénovation du patrimoine, la mise en œuvre d’un plan social drastique, la situation de position dominante en France qui pourrait en découler...
Suite aux annonces de CBS, nous regardons attentivement le sujet en Europe, ce qui est normal pour une société comme la notre. Clear Channel n’est certainement pas le seul concurrent à examiner l’éventualité d’un rachat des actifs de CBS. Nous ne pouvons pas faire d’autres commentaires à ce sujet. Ceci étant, il y a lieu de préciser que nous étudions toujours de nombreux dossiers parallèlement.

Les autres dossiers qui sont sur la table, certains sont ils à un stade aussi avancé que le dossier CBS ?
Nous ne souhaitons pas commenter davantage, pour des raisons évidentes de confidentialité. Mais en ayant une activité mondiale, dans une optique de consolidation du secteur de la communication extérieure, il parait logique que nous nous intéressions de près ou de loin à tous les cas de figure qui pourraient se profiler à l’horizon. Ceci n’est pas nouveau. Nous le faisons systématiquement depuis toujours.

Envisageriez-vous de vous refinancer sur les marchés pour vous lancer dans ces éventuelles opérations d’acquisition ?
Nous n’avons pas de dette au sein de la société. Le niveau de free cash flow s’élève à 323 millions d’euros. Il est la conséquence d’une bonne maitrise de notre capex et de notre besoin en fonds de roulement. Nous venons d’émettre par ailleurs une émission obligataire inaugurale de 500 millions d’euros à maturité 5 ans à 2% de coupon. Nous avons largement les moyens de nos ambitions si demain nous voulions mobiliser des ressources financières.

Votre cours de bourse a été en baisse ce jeudi . Il semblerait que vos chiffres aient quelque peu déçu vos actionnaires. Que pourriez-vous leur dire pour les rassurer ?
Il parait aisément compréhensible que le fait d’avancer que l’activité en Europe est sous tension préoccupe les investisseurs.
Toutefois, JCDecaux est parvenu en une dizaine d’année à devenir le leader mondial de son secteur passant de 1,3 milliard de dollars à 3,3 milliards de dollars. Il réalise 30% du chiffre d’affaires dans les pays émergents. Ce chiffre devrait monter à 35%-40% d’ici 3 ans grâce à des produits et services de qualité à offrir aux collectivités locales, aux compagnies de transports, et aux aéroports dans le monde. Nous sommes aussi des managers actionnaires familiaux. Nous allouons nos ressources financières de manière très rigoureuse et vigilante. L’approche patrimoniale qui prime sur nos décisions d’investissement s’inscrit sur le moyen et long terme. La politique de dividende a été maintenue avec un Payout Ratio avant dépréciation autour de 47% avec 44 centimes par action versés aux actionnaires. C’est un bon mix entre les fonds que nous souhaitons utiliser pour financer les projets de croissance et les fonds que nous souhaitons redistribuer aux actionnaires. Nous sommes dans la tranche haute du SBF 120.

Propos recueillis par Imen Hazgui