Interview de Steven Saywell : Responsable de la stratégie devises au sein de BNP Paribas

Steven Saywell

Responsable de la stratégie devises au sein de BNP Paribas

Marché des devises : mes meilleurs choix seraient l'euro, le dollar australien et le dollar canadien

Publié le 27 Mai 2013

Quel regard portez-vous sur les principales tendances sur le marché des devises en ce moment ?
Nous pouvons distinguer deux grandes tendances sur le marché actuellement. Une première tendance est un affaiblissement du une contre le dollar et contre l’euro. Ce mouvement est très poussé par le très important assouplissement de la politique monétaire au Japon par le nouveau gouverneur de la Banque centrale. Cette dépréciation devrait se poursuivre.
Une autre tendance majeure sur le marché des devises est un renforcement généralisé du dollar. Nous sommes moins confiants sur la continuité du rallye.

Pour quelles raisons ?
La réévaluation du dollar est très largement motivée par de meilleures données macroéconomiques aux Etats-Unis, par des rendements obligataires plus élevés et par des anticipations d’une sortie prochaine de la part de la Réserve fédérale américaine de sa politique d’assouplissement quantitatif.
Néanmoins, nous sommes d’avis qu’il y a un risque non négligeable que le marché soit déçu. L’économie américaine pourrait décliner par rapport à son niveau actuel. Le taux obligataire pourrait fléchir et il est très improbable que la Fed mette un terme bientôt à son programme de rachat d’actifs.
En conséquence nous pensons que le dollar devrait s’affaiblir encore, particulièrement contre l’euro et la livre sterling. Nous avons un objectif de parité euro dollar de 1,35.

Pourquoi pensez-vous que l’économie américaine pourrait s’essouffler ?
Une importante partie de la croissance des Etats-Unis provient de la reconstruction suite à l’ouragan Sandy. Il devrait y avoir davantage de coupes budgétaires de part du gouvernement. La Fed a indiqué qu’elle voulait maintenir son quantitative easing pour une période de temps encore considérable. Cela signifie donc que la Banque centrale ne s’attend pas à une solide reprise économique.

Quel taux de croissance du PIB escomptez-vous?
Nous tablons sur une croissance de 1% au deuxième trimestre et d’environ 2% sur l’année.

A quel niveau voyer-vous évoluer la parité yen dollar ?
La parité yen dollar pourrait facilement s’orienter vers 105 d’ici la fin de l’année. Au-delà, la parité pourrait s’élever à 140.

Vous prévoyez un renforcement des devises liées aux matières premières ?
Tout à fait. Nous croyons que ces devises ont trop baissé, que ce soit le dollar australien, le dollar canadien, ou le dollar néo zélandais. Nous ne serions pas surpris de voir une reprise du cours de ces devises.

Ne considérez-vous pas que la Banque centrale d’Australie puisse limiter la force du dollar australien par son intervention ?

Le plus important pour le dollar australien est l’ampleur de la croissance chinoise et le comportement de la Fed. Si la croissance de la Chine est suffisamment forte, ce que nous escomptons, et que le marché réajuste sa vision sur le dollar américain, alors le dollar australien pourrait facilement rebondir.

Avez-vous une vue sur le won coréen ?
Le won coréen est intéressant. Les fondamentaux de la Corée sont très robustes mais le coût de production de la Corée est confrontée à la rude concurrence du coût de production du Japon. Nous pourrions ce faisant voir un affaiblissement du won en ligne avec le yen.

Quelle serait votre meilleure allocation dans un portefeuille exclusivement investi en devises ?
Mes meilleurs choix seraient l’euro, le dollar australien et le dollar canadien. Nous supposons un potentiel d’appréciation du dollar australien à 1,10 et du dollar canadien à 0,94.

Pourrions-nous ajouter à ce portefeuille des devises émergentes ?
Nous pourrions ajouter des devises asiatiques comme le peso philippin, et le dollar taïwanais au-delà du won coréen et le peso mexicain.

Quel sont les principaux risques que vous percevez pour le marché des devises à court terme ?
Les plus importants risques sont une détérioration importante de l’économie américaine et un déclin de l’économie japonaise.


Propos recueillis par Imen Hazgui