Interview de Victor  Kittayaso : Gérant actions Immobilier chez Allianz Global Investors France

Victor Kittayaso

Gérant actions Immobilier chez Allianz Global Investors France

Nous attendons une performance annuelle sur les foncières françaises cotées de 10% à 15%

Publié le 05 Août 2014

Quel regard portez-vous sur le segment des foncières françaises cotées ?
Nous sommes confiants sur le segment à moyen terme. Le caractère défensif des foncières est avéré notamment au regard de la surperformance affichée par rapport à la cote. Les business model sont globalement très solides et donnent une visibilité sur la génération des cash flows futurs. Les taux d’occupation sont très élevés, de plus de 90% en moyenne, et les maturités des baux sont de 5 à 6 années. Des actions ont été menées pour améliorer la qualité des patrimoines.
Le rendement du dividende est par ailleurs très attractif, entre 4.5 et 5%. Ces caractéristiques valent aussi bien pour les foncières de bureaux que les foncières de commerce. Dans ce dernier segment malgré un environnement économique monotone, des nouvelles positives sont relevées sur le plan opérationnel. Les locataires de ces foncières génèrent plus de chiffre d’affaires que la moyenne nationale. Les loyers sont alors en hausse.

Diriez-vous qu’au niveau de la zone européenne, les foncières françaises seraient les mieux loties ?
C’est effectivement un des segments les mieux lotis. Nous sommes investis sur les foncières françaises depuis longtemps et nous les conservons dans une optique de moyen terme car les managements ont su délivrer un track record solide de gestion tant sur le plan locatif que sur le front de la qualité des actifs détenus en portefeuille.

Quels enseignements tirez-vous des résultats à l’issue du premier semestre 2014 ?
Ces résultats sont de bonne facture. Les foncières n’ont pas déçu eu égard à la récurrence de leurs revenus. Nous pouvons considérer la situation comme étant bonne à la fois au regard du taux d’occupation, de la capacité à augmenter les loyers pour les foncières de commerce et de la maturité des baux pour les foncières de bureaux.

Y a-t-il eu des surprises dans ces publications ?
Nous avons été quelque peu surpris par l’évolution de la valorisation des instruments de dette qui a été plus forte que prévu du fait de la forte diminution des taux et qui a impacté négativement les ANR.

Quels commentaires vous inspirent les valorisations du segment ?
Notre avis s’appuie sur l’analyse de la valorisation boursière en observant la prime ou la décote sur ANR et de la valorisation des patrimoines des foncières en rapprochant le rendement des patrimoines des foncières à celui de l’OAT 10 ans. Si l’on compare la situation actuelle à celle de 2007, nous nous apercevons qu’il n’y a pas d’excès.
Concernant la valorisation boursière, la prime de 40% en 2007 a disparu aujourd’hui puisque le secteur se traite proche des ANR, à quelques exceptions près. Du côté de la valorisation fondamentale, l’écart des rendements qui était inférieur à 50 points de base en 2007 est à présent bien supérieur à 300 points de base. Nous pensons donc que les valorisations actuelles sont confortables.

Les grandes foncières qui sont en surcote sont surtout des foncières de commerce qui réussissent à surperformer leur marché sur le plan opérationnel, en termes de chiffre d’affaires par locataire comparativement à la moyenne nationale et qui ont un patrimoine dont la qualité a été considérablement renforcée.

Quels sont les principaux risques liés à ce segment de marché ? La baisse des loyers dans l’immobilier de bureaux ?
Certes les loyers n’ont pas rebondi dans ce segment mais ce qui est important pour les investisseurs c’est la solidité de ces loyers au regard du taux d’occupation et de la maturité des baux.
De plus, Pour de nombreux dirigeants de sociétés évoluant dans ce segment nous serions en train d’atteindre le creux de la baisse sur le marché locatif.
Le taux de vacance est de 7,5%, quasiment le seuil d’équilibre. Si l’on regarde l’offre future qui va venir sur le marché, notamment en Ile de France, 60% est déjà prélouée. Ceci s’explique par un effet de rareté sur les immeubles neufs.
La demande exprimée se porte principalement sur les immeubles neufs (plus de 40% des surfaces prises à bail). Or la surface neuve dans l’offre actuelle ne représente qu’un mètre carré sur cinq, soit 20%. Il y a donc un appétit fort de la demande sur les immeubles en construction, notamment de la part des grandes entreprises, et ceci toujours pour des motifs de rationalisation et de baisse des coûts.

Une forte remontée des taux d’intérêt constitue-t-elle une menace sérieuse ?
Je ne le pense pas à ce stade. La BCE a pour objectif de conserver les taux d’intérêt bas le temps nécessaire. Cela devrait continuer à jouer en faveur de l’écart entre le rendement du patrimoine des foncières et le rendement de l’OAT dix ans.

Ne peut-on pas craindre qu’un repli additionnel de l’inflation alourdisse la charge de la dette des sociétés ?
Les foncières ont été très actives depuis deux ans en termes de refinancement. Elles ont profité du phénomène de désintermédiation bancaire et ont ainsi élargi leurs sources de financement, notamment au travers d’émissions obligataires. Nous avons encore eu dernièrement des opérations faites par Gecina, Unibail, Icade avec des taux d’intérêt très bas parfois en dessous de 2%. Les investisseurs crédit apprécient les cash flows récurrents des foncières. Des opportunités similaires pourront être saisies dans les mois à venir. De plus le coût de la dette est couvert à taux fixe sur des durées longues.

Quelle analyse faites-vous de la recomposition du paysage actionnarial dans le secteur ?
Les mouvements actionnariaux sont intéressants en ce qu’ils tendent à apporter de la stabilité à l’histoire, à la stratégie des sociétés.

Ces remous conduisent-ils à une manière différente de raisonner sur ces titres ?
Non. Nous regardons avant tout dans notre processus d’investissement les fondamentaux des sociétés, la qualité des actifs, le track record du management, la stratégie.
Nous ne basons pas notre hypothèse uniquement sur une éventuelle opération, ce d’autant plus que nous sommes investisseurs de long terme.

Quelle place occupent les foncières françaises dans votre allocation ?
Elles en constituent une pondération importante. La France représente 60% dans notre fonds zone euro et 35% dans notre fonds européen.

Quels ont été les derniers mouvements effectués ces six derniers mois ?
Nous avons été amenés à stabiliser nos positions.

Pourriez-vous avancer un potentiel de revalorisation sur les titres détenus ?
Entre 10% et 15% de moyenne annuel à moyen terme.

Propos recueillis par Imen Hazgui