Interview de Jean-François  Buet : Président de la FNAIM (Fédération Nationale de l'Immobilier)

Jean-François Buet

Président de la FNAIM (Fédération Nationale de l'Immobilier)

Livre blanc du MEDEF sur le logement : notre priorité est le rééquilibrage de la relation locataire-propriétaire avec la reconnaissance d'un statut spécifique au bailleur privé

Publié le 10 Mars 2015

Vous venez de présenter avec le MEDEF les grandes lignes d’un nouveau Livre Blanc sur le logement. Celui-ci a pour ambition de mettre l’accent sur la construction sans méconnaitre le potentiel du parc existant qui est selon vous sous estimé...
La politique du logement doit, en effet, intégrer les 34 millions de logements du parc existant dans sa vision : construire n’est pas la seule solution.
300 000 nouveaux logements seulement sont mis sur le marché chaque année, soit environ 1% du stock.
Si l’on ne s’occupe pas rapidement du logement existant, on risque de le paupériser. Or les Français ont fait du logement leur seconde préoccupation après l’emploi.

Aujourd’hui s’occuper les logements existants-les réhabiliter, les adapter aux besoins des personnes âgées et des personnes handicapées, les sécuriser-permettrait de réduire le nombre de logements vacants, et de répondre ainsi en partie, à moindre cout, à une préoccupation phare à laquelle est confrontée notre pays aujourd’hui.

Sur le stock existant a-t-on une idée du stock disponible aujourd’hui ?
Suivant la définition que l’on accorde au stock disponible, les estimations varient de 800 000 à 2 millions.

Dans le cadre du Livre blanc du MEDEF, la FNAIM focalise ses propositions particulièrement autour de trois axes majeurs : la rénovation du parc existant, le rééquilibrage des rapports locatifs et la stabilisation de dispositifs publics et incitatifs favorisant l’acquisition d’un logement. Si vous deviez hiérarchiser ces trois axes, lequel serait prioritaire ?
Très probablement le rééquilibrage de la relation locataire-propriétaire avec la reconnaissance d’un statut spécifique au bailleur privé.

Ce statut est réclamé de longue date par la FNAIM. Avez-vous l’espoir de voir cette mesure finalement adoptée ?

Oui. La reconnaissance de ce statut est une manière de répondre plus rapidement au besoin de logements de loyers intermédiaires. Quand un acquéreur trouve un terrain aujourd’hui, il se passe environ 4 ans à 6 ans avant que le logement soit livré. Si un opérateur de terrain fait le choix d’un logement ancien pour construire un immeuble de logements locatifs neufs ou bien pour remettre sur le marché d'un logement rénové, il s’écoule 5 à 6 mois avant que le logement soit disponible.
Par ailleurs cela coute relativement moins cher de rénover un bien existant que de construire un nouveau bien.
Enfin les logements existants sont souvent des logements anciens dans les centres villes, ce qui favorise une véritable mixité.

Au regard de ces trois axes, quelle vision avez-vous de la politique menée par le gouvernement ?
Nous pouvons pressentir une prise de conscience. Si ne sommes pas dans la reconnaissance formelle du statut de bailleur privé, on peut relever des actions allant dans le bon sens au niveau local. Anne Hidalgot vient par exemple de mettre en place une initiative sur le multiloc, visant à aider un bailleur qui consent un loyer minoré de 20%. Des responsables politiques, comme François Fillon, parlent de bail réel solidaire dans leur campagne. Le débat lancé depuis quatre ans semble s être affiné.

Voyez-vous des prémisses de réponse au niveau national ?

Pour la première fois en 68 ans, le premier ministre Manuel Valls s’est exprimé lors de notre Congrès en décembre. Celui-ci a clairement indiqué que le bail solidaire était une piste de réflexion sur laquelle le gouvernement allait travailler.

Pour avoir une meilleure réponse aux besoins de logements suivant les territoires, deux choses vous paraissent nécessaires à mettre en place…

En premier lieu, un Observatoire des loyers suivant les territoires pour déterminer les loyers intermédiaires et sociaux par zone géographique avec en contrepartie soit une réduction temporaire ou partielle de la taxe foncière, soit une subvention, soit une aide au financement… Nous aurions ainsi des outils différenciants suivant les territoires.

Êtes-vous présentement optimiste sur le fait qu’une des mesures que vous avez avancé dans le livre blanc puisse être adoptée cette année ?
Nous avons pu relever dans la loi ALUR une modification des votes pour les travaux de rénovation énergétique. Cela ne suffit pas. D’autres dispositions doivent être révisées. Ce qui a longtemps manqué dans notre pays c’est une véritable politique du logement liée à un aménagement du territoire tenant compte des grandes disparités qui prévalent.
Il y a lieu par ailleurs d’avoir une politique pérenne. Ainsi il nous parait fondamental de maintenir le taux de TVA à 5,5% sur les travaux de rénovation énergétique et le crédit d’impôt pour la transition énergétique pour ne pas remettre en question de manière soudaine le fruit de longues discussions.

Quel est votre sentiment à ce jour ? Etes vous plutôt attentiste, optimiste, inquiet ?

Je ne veux pas être trop optimiste. Nos gouvernements successifs promettent des choses. Cependant les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. De manière pragmatique j’attends de voir les avancées. La bonne direction semble être prise que ce soit à droite ou gauche concernant le bail solidaire ou encore la rénovation énergétique. Cela prend néanmoins du temps.

Propos recueillis par Imen Hazgui