Interview de Bernard Gilly : Directeur général de GenSight

Bernard Gilly

Directeur général de GenSight

Nous visons une cotation complémentaire au Nasdaq vers le 2e ou le 3e trimestre 2018

Publié le 25 Juillet 2017

GenSight développe des thérapies géniques destinées à rendre de l'acuité visuelle à des patients devenus aveugles. Un an après votre introduction en bourse, où en êtes-vous de votre développement clinique ?
Notre produit le plus avancé, GS010, est une thérapie génique pour le traitement de la neuropathie optique héréditaire de Leber (NOHL), une maladie rare qui conduit à une perte irréversible de la vue chez les adolescents et les jeunes adultes. Nous avons publié fin juin les résultats d'un premier essai clinique de phase IIb chez l'homme : deux ans après une seule injection dans un seul œil chez des patients qui étaient devenus aveugles, nous observons un accroissement significatif de l'acuité visuelle.
Ces résultats positifs nous permettent de poursuivre avec confiance les deux essais de phase III en cours, sur un plus grand nombre de patients, en Europe et aux Etats-Unis (37 au total). Les résultats de ces essais sont attendus vers la fin du deuxième trimestre 2018, ce qui devrait nous permettre de déposer une demande d'autorisation de mise sur le marché fin 2018 ou tout début 2019. Afin de préparer cette entrée en phase commerciale, nous avons levé fin juin 22,5 millions d'euros auprès d'investisseurs spécialisés. Ces fonds sont destinés à structurer notre organisation commerciale et à financer un certain nombre de dépenses de pré-commercialisation (marketing, prise de contact et négociations avec les organismes payeurs et les centres de soins).

Comment allez-vous défricher ce marché ?
La NOHL touche environ 1500 patients par an aux Etats-Unis et en Europe. Elle reste méconnue de la communauté médicale et souvent mal diagnostiquée. Nous avons un travail à faire pour qu'elle soit mieux connue et surtout pour que les ophtalmologues sachent qu'il existe un traitement. D'autant que nos essais montrent que plus on traite le patient tôt, plus le traitement est efficace. Cependant, nous n'aurons pas à mettre en place une infrastructure très lourde, étant donné le faible nombre de patients et de centres capables de les traiter.

Quel sera le coût du traitement ?

Nous estimons le coût pour les systèmes de santé entre 500 000 et 1 million d'euros par traitement. Il faut rapprocher cela du coût médical direct d'un patient aveugle, souvent jeune, qui est d'environ 60 000 euros par an. Le coût de notre traitement peut d'ailleurs être étalé dans le temps et conditionné à son efficacité sur une période donnée. C'est l'objet des discussions que nous mènerons avec les organismes payeurs.

Quel est l'état d'avancement de votre 2e produit, GS030, contre les rétinopathies pigmentaires ?
 
Le GS030 est une thérapie optogénétique très innovante qui consiste à transférer une protéine photosensible dans les cellules ganglionnaires, puis à activer cette protéine à l’aide d’un dispositif de stimulation sous la forme de lunettes (en collaboration avec une autre société cotée, Pixium Vision, ndlr). Chaque cellule ganglionnaire transfectée agit agit ainsi comme un photorécepteur.
Classé « médicament de thérapie innovante « en Europe , et « médicament orphelin » par la FDA, le traitement a donné des résultats prometteurs en phase préclinique (sur l'animal, ndlr). Nous prévoyons de démarrer les essais sur des patients atteints de rétinopathies pigmentaires fin 2017. S'il montre son efficacité, ce produit pourrait ouvrir de nouvelles perspectives dans le traitement d'autres maladies comme la dégénérescence maculaire liée à l'âge.

L'arrivée d'investisseurs nord-américains à votre capital, via cette augmentation de capital de 22,5 millions d'euros réalisée fin juin, préfigure-t-elle une cotation au Nasdaq ?
C'est notre objectif. L'augmentation de capital visait, notamment, à faire entrer de nouveaux investisseurs capables de nous accompagner vers une introduction sur le marché américain. Il s'agirait d'une cotation complémentaire à celle d'Euronext. Elle pourrait intervenir au deuxième ou troisième trimestre de l'année prochaine, car nous voulons attendre la publication des résultats de nos études de phase III. Avec ces résultats et la présence dès aujourd'hui d'investisseurs spécialisés à notre capital, nous pensons que ce projet peut créer beaucoup de valeur.

Propos recueillis par François Schott