Interview de Michele Garufi : PDG de NicOx

Michele Garufi

PDG de NicOx

Nous sommes en position de force pour négocier avec d'éventuels partenaires

Publié le 04 Mars 2008

Un commentaire sur les résultats que vous avez publié ?
Nous avons fait état d’une perte en augmentation, mais qui est en fait relativement limitée puisque, malgré la forte progression des dépenses opérationnelles, nous avons également enregistré un bond de notre chiffre d’affaires.

Mais nous avons surtout une situation de trésorerie forte, à 172,8 millions d’euros, ce qui n’est pas le cas de beaucoup de sociétés de biotechnologie. Cette position nous permet de voir l’avenir avec optimisme, dans la mesure où nous n’aurons pas besoin de lever des fonds sur le marché financier pour continuer nos activités.

Nous allons donc nous focaliser sur le développement du naproxcinod -son lancement commercial en particulier.

A ce propos, nous déposerons notre demande de mise sur le marché (AMM) à la FDA (Food and Drug Administration) à la mi-2009. Ensuite, il faut en general  minimum 12 mois pour obtenir une réponse de la FDA

Enfin, précisons que sur l’année 2008, nous allons augmenter très significativement les investissements opérationnels pour NicOx, étant donné que cette période correspond à la fin de la phase III, donc la plus chère, ce qui devrait dès lors accroître les pertes sur la période.

Des pertes qui pourraient être en majeure partie compensées par la signature d’un accord de partenariat.

Quel est l’état actuel de votre portefeuille de médicaments susceptibles de passer en phase III prochainement ?
Logiquement, les produits susceptibles de passer en phase III sont ceux actuellement en phase II, c’est-à-dire le projet de traitement du glaucome en partenariat avec Pfizer (PF-03187207), et celui qui concerne la Bronco-Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO) avec Topigen Inc. (TPI 1020).

Tout dépendra des résultats de ces phases II, mais nous n’avons pour l’heure fourni aucune date pour ce passage en phase III...

Vous avez évoqué le possible lancement parallèlement à celui du naproxcinod, d’autres produits, ce qui permettrait de renforcer la rentabilité de votre force de vente… Comptez-vous réaliser ces acquisitions d’ici à la fin de l’année 2008, auquel cas, passerez-vous par une augmentation de capital pour cela ?
Il s’agit d’acquérir des droits sur des produits très avancés dans leur développement, afin de compléter la gamme de produits que NicOx entend commercialiser dans le futur.

Pour cela, nous pouvons faire des acquisitions de licences -de sociétés ou de produits-, et dans cette perspective, si nous avons des opportunités cette année, nous le ferons, sinon ce sera l’année prochaine, voire en 2010…

Nous allons donc évaluer tous les moyens financiers possibles pour obtenir ces autres produits qui ne seront pas issus de nos recherches.

Dans ce cas, il pourra y avoir émission de nouvelles actions pour l’acquisition d’une nouvelle société, ce qui correspond effectivement à une augmentation de capital, mais pas au sens classique pour lever des fonds en cash.

Ceci étant, nous y réfléchissons, mais il n’y pas encore de scénario écrit pour 2008…

Vous avez clairement indiqué chercher un partenariat pour la commercialisation du naproxcinod aux Etats-Unis, mais qu’en sera-t-il de l’Europe et du Japon ? Partirez-vous seul ?
Non, nous souhaitons également établir un partenariat en Europe et au Japon pour la commercialisation du naproxcinod.

Plus précisément, nous souhaitons conserver des droits de co-commercialisation en Europe comme aux Etats-Unis,.

Il est très difficile pour une société de biotechnologie de lancer seule un produit tel que le naproxcinod dans des marchés majeurs - Etats-Unis, Europe ou Japon - même pour une société comme NicOx qui a pour ambition de devenir une entreprise pharmaceutique. 

Pfizer a initié au Japon une étude clinique de phase II pour le PF-03187207, un médicament expérimental pour le traitement du glaucome développé dans le cadre de l'accord signé entre Pfizer et NicOx en 2004. Pour quand les résultats ? Et concernant le développement du PF-03187207 au Japon, où en êtes-vous ?
Nous n’avons aucune donnée concernant la date d’échéance pour la fin de cette étude au Japon, nous avons seulement annoncé que l’étude de phase II aux Etats-Unis devrait s’achever en avril 2008. Nous devrons alors décider avec Pfizer quand et comment nous diffuserons les résultats. Mais pour le Japon, nous ne pouvons pour l’instant pas donner de dates…

Toujours sur le composé PF-03187207, l'étude serait passée d'un recrutement prévisionnel de 150 patients à 216. Comment l’expliquez-vous ?
Il s’agit tout simplement d’une erreur de rédaction de Pfizer qui a écrit 150 au lieu de 216 patients.

Vous avez annoncé que Topigen Pharmaceuticals avait initié une étude de confirmation d'activité de phase 2 du TPI 1020 pour le traitement de la Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO). A-t-on une estimation du marché potentiel que représente ce traitement ?
Le marché potentiel pour les produits qui s’adressent à la Bronco-Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO) est considerable, le BPCO représente la 4ème cause de mortalité aux Etats-Unis. Par ailleurs, il s’agit d’une maladie pour laquelle il n’existe aujourd’hui que très peu de médicaments actifs.

Ceci étant, il faut également noter le fait que ce projet est moins avancé que les autres et cible des indications très difficiles comparé aux autres produits de notre portefeuille, si bien que son développement nécessite une plus grande prise de risque. Il faudra donc attendre la fin de cette étude de phase II pour envisager, dans le futur, ses probabilités de succès.

La phase II ayant débuté il y a seulement 3 mois, nous n’avons pas de date de fin d’étude à donner pour le moment.

NicOx a annoncé la prolongation de sa collaboration avec Pfizer pour appliquer sa technologie de libération d'oxyde nitrique à la recherche de nouveaux médicaments en ophtalmologie. Vous avez d’ailleurs indiqué avoir identifié et testé différentes classes de composés donneurs d'oxyde nitrique qui pourraient devenir des traitements pour des pathologies oculaires majeures. Pouvez-nous fournir quelques détails sur ces produits et leurs usages potentiels (pathologies oculaires majeures par exemple…) ?
Le PF-03187207 est un premier produit destiné au traitement du glaucome, issu de la classe spécifique des prostaglandines.

Or, comme vous l’avez constaté, notre partenariat avec Pfizer a été élargi à tous les domaines de l’ophtalmologie, avec différentes classes de médicaments pour le glaucome, et différentes classes thérapeutiques pour d’autres indications que celle du glaucome.

Nous sommes en train d’identifier avec Pfizer d’autres produits susceptibles d’aller en phase II. Nous espérons d’ailleurs avoir en 2008 d’autres candidats-médicaments dans cette collaboration.

Le parcours de votre titre vous satisfait-il ? Ne pose-t-il pas problème dans la perspective de la mise en œuvre d’accords de partenariats sur le naproxcinod ?
Malgré la chute des cours de bourse des sociétés de biotechnologie, NicOx reste la meilleure performance en 2007 du SRD, en tenant compte de la performance cumulée de 2006.

Aujourd’hui, notre parcours boursier ne dépend malheureusement pas uniquement de NicOx. Nous sommes en effet dans un environnement qui pousse les actionnaires à céder les titres qui leur paraissent à risque, et notre cours en souffre de même que ceux de toutes les autres sociétés de biotechnologie, dans la mesure où ce sont des valeurs qui sont considérées à risque.

Les partenaires ne regardent jamais le prix de l’action, mais la valeur du projet, il n’y a donc pas d’incidence sur notre recherche de partenariats. D’autant plus que nous détenons une position de trésorerie qui nous permet de ne pas être en situation de devoir lever des fonds supplémentaires. Nous sommes donc en position de force pour négocier avec d’éventuels partenaires…

Plusieurs molécules que NicOx avait commencé à développer en interne ont obtenu des résultats prometteurs en phases cliniques et ont par la suite été suspendues (NCX 701, NCX 4016, NCX 1015, HCT 1026, NCX 2216, NCX 950). Allez-vous reprendre leur développement, notamment pour ce qui concerne le NCX 4016 ?
Il s’agit de toute une série de produits assez difficiles dans leur développement, et que nous espérions à l’époque, avec Astra Zeneca, amener en phase III. Nous avons été contraints de revoir notre stratégie, et nous avons décidé de mettre tous nos efforts dans le développement du naproxcinod, dans la mesure où ce produit était bien plus prometteur et moins risqué que les autres.

Nous avons donc abandonné définitivement le développement de ces produits. En revanche, concernant le NCX 4016, c’est un peu différent. Pour ce produit, nous avons réalisé une étude stratégique et financière sur le portefeuille de la société, en ayant à l’esprit que la vie du brevet du NCX 4016 n’aurait sans doute pas d’extension, puisque c’est un vieux produit.

Ainsi, le risque de développement de ce médicament avec une vie de brevet courte, nous a convaincu qu’il était plus sage de l’interrompre. Ceci étant, nous avons d’autres projets de recherche dans des domaines similaires…

Le NO-Paracétamol pourrait-il aider à la rentabilisation de la force commerciale de Nicox ?
Il s’agit là encore d’un projet que nous avons suspendu parce qu’il ne faisait pas partie de nos priorités de développement. Il a obtenu des résultats de phase II, mais nous ne le développons plus, pour le moment…

Le naproxcinod 375 a 5% de plus d’effets secondaires gastro-intestinaux que le placebo. Pensez-vous que le naproxcinod 375 puisse devenir le seul AINS qui nécessite le moins fréquemment un protecteur gastrique ?
En réalité dans les résultats de l’étude de phase III que nous avons publié, nous avons démontré que ses effets secondaires gastro-intestinaux étaient très comparables à ceux du placebo.

Il est donc très bien toléré, tout en gardant une efficacité statistiquement significative. C’est un dosage très intéressant, peut être un peu moins puissant qu’un dosage double, mais avec un niveau de tolérance très élevé.
 
Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy (avec la participation des easynautes)