Interview de Dominique Costantini : Président du directoire de Bioalliance Pharma

Dominique Costantini

Président du directoire de Bioalliance Pharma

L'ondansétron est le leader de son marché

Publié le 22 Mai 2008

Vous venez d’acquérir les droits de commercialisation de l’Europe de l’ondansétron OS (Oral Spray) de la société NovaDel Pharma Inc. (Amex : NVD). De quoi s’agit-il ? Pourriez-vous revenir brièvement sur les applications de ce produit ?
Le type de domaine dans lequel nous travaillons, et en particulier l’ondansétron OS, s’adresse à des gens qui ont des chimiothérapies ou des radiothérapies qui provoquent chez les patients des nausées et des vomissements.

L’ondansétron est un antiémétique, c’est-à-dire qu’il ralentit, évite et réduit ces phénomènes de nausées et de vomissements…

Que représente le marché potentiel de ce produit ? A combien chiffrez-vous la population de patients concernés ?
Il est difficile de vous donner un chiffre pour les patients concernés, étant donné que c’est à chaque cure de chimiothérapie qu’il peut se produire ces évènements-là.

En Europe, nous avons estimé qu’il y avait environ 1 million de prescriptions dans ce type de domaine, à la fois en ville et à l’hôpital, parce que ce sont des gens qui, par exemple, à chaque cure de chimiothérapie, peuvent se voir prescrire ce type de produit…

Et en termes de chiffre d’affaires ?
En Europe, je dirais que le chiffre d’affaires évalué par IMS est autour de 400 millions d’euros, et le produit lui-même, donc d’origine, représente plus de 50% de ce marché des antiémétiques.

Quels sont les principaux concurrents de l’ondansétron OS en Europe ?
Il y a d’abord les génériques, puisqu’il s’agit d’un produit qui est hors brevet, et qui existe essentiellement sous deux formes : en comprimés et par voies intraveineuses.

Il y a d’autres produits sur le marché, avec d’autres formules, et qui sont également des inhibiteurs sur différents récepteurs pour bloquer les nausées et les vomissements. A titre d’exemple, nous pouvons citer le granisétron dont le nom de marque est le Kytril, tandis que pour l’ondansétron, le nom de marque est le Zofran.

Ceci étant, c’est quand même le leader du marché. Après, il y a d’autres produits qui sont fournis en cas de nausées et de vomissements, qui sont des corticoïdes ou des produits un peu plus loin dans d’autres types de nausées comme le Primpéran… 

Quel est l’avantage comparatif de l’ondansétron par rapport à ces autres produits… (mode d’administration, prix, etc.) ?
Le produit que nous avons choisi possède un système de délivrance originale et breveté, puisqu’il appartient à Novadel, et il présente un énorme avantage pour nous, puisqu’il se situe dans une logique de simplification de la vie du patient.

C’est en effet un spray qui se met dans la bouche et qui est ainsi diffusé de façon générale, si bien qu’il évite au patient de boire ou d’avaler quelque chose alors que justement il a des nausées. C’est vraiment une approche très pratique…

Quant au prix, nous ignorons pour l'instant les résultats complets des essais qui nous permettront de le positionner, mais nous savons que le prix de ce type de produit à l’heure actuelle, par exemple pour l’ondansétron sous forme de comprimés à 4 mg, se situe autour de 3 euros.

Nous ne sommes pas dans une logique d’augmentation des coûts de la sécurité sociale, mais dans une logique de simplification de la vie du patient, et nous verrons en fonction des résultats du produit ce qu’il peut apporter de plus en termes d’avantages pour le malade.

Selon les termes de l'accord, BioAlliance Pharma verse à NovaDel 3 Millions de dollars à la signature du contrat puis NovaDel pourra recevoir jusqu'à 24 M$ en fonction d'étapes supplémentaires (5 M$ lors de l'enregistrement puis des paiements d'étape de 19 M$ liés aux ventes du produit), ainsi que des redevances sur le chiffre d'affaires net du produit. A combien vont se chiffrer les redevances ?
Nous ne l’avons pas encore diffusé, nous payons essentiellement le prix du «paiement à la signature», de 3 millions de dollars. Nous sommes dans le projet maintenant, nous avons accès à tout le dossier, et ensuite les coûts sont essentiellement au moment de l’Autorisation de mise sur le marché pour près de 5 millions de dollars.

C’est vrai que les royalties nous paraissent cohérentes puisqu’ils sont progressifs, en fonction du chiffre d’affaires, et nous permettent tout à fait d’avancer dans ce domaine… Ni Novadel, ni nous, n’avons souhaité les communiquer, nous sommes donc restés dans une logique cohérente d’exploitation. C’est-à-dire que nous nous sentons confortables avec ce qui a été prévu dans cette approche.  

Vous dites : Ce principe actif pourrait être le premier antiémétique disponible en Europe sous la forme d'une solution pour pulvérisation buccale, sous réserve du succès de ce développement et d'une approbation par les agences d'enregistrement. Sur quels points l'enregistrement pourrait poser problème ?
Dans ce type de développement, on part bien entendu d’une molécule connue, si bien que nous avons des facteurs de risque en moins. Toutefois, étant donné qu’il y a une nouvelle mise d’un système de délivrance, c’est-à-dire qu’il faut que le produit soit délivré de façon bien cohérente avec la façon de traiter (ni trop tôt, ni trop tard), or, dans cette approche-là, nous ne savons pas encore si nous serons bio-équivalents avec les formes comprimés existantes, donc le même type de comportement, ou si notre produit agira plus vite. Si tel est le cas, il faudra dès lors prouver que le produit n’entraîne pas d’intolérance parce qu’il est plus concentré à un moment donné, par exemple.

C’est pour cette raison qu’il y a aujourd’hui une incertitude en fonction de son profile final, mais qui sera avancée sur le stade de développement.

Quelles échéances quant au dépôt du dossier d'enregistrement ?
Nous avons donné la date de 2009-2010, justement pour prendre en compte ces aspects, c’est-à-dire, si le produit est bio-équivalent aux formes existantes alors nous pourront le déposer en l’état, mais s’il dispose d’une rapidité d’action ou d’un élément à creuser un peu plus, nous devrons faire un essai supplémentaire, d’où les deux dates, 2009 et 2010.

Quand estimez-vous que la commercialisation pourrait débuter ?
Entre le dépôt, le temps de l’AMM et le prix, il faut rajouter entre 12 et 18 mois minimum…

NovaDel restera le fabriquant et le fournisseur du produit. Combien va vous coûter l'achat de produits chaque année ?
L’achat de produits dans ce type de domaine, reste par définition toujours inférieur aux 10% nets des ventes. Ceci est inclus dans la façon dont nous avons négocié l’ensemble des royalties et l’achat de produits.
 
De quelle manière l'acquisition de cette licence va vous permettre d'optimiser votre force de vente ?
Il est évident aujourd’hui que nous avons organisé les forces de vente en France avec une filiale directe, et en Europe avec une joint-venture. Nous n’avons pas encore déterminé comment ce type de produit serait lancé complètement sur l’Europe, c’est-à-dire si on allait aboutir à la création d’une équipe dédiée sur cette zone, notre idée étant simplement que vers 2011, nous souhaiterions avoir notre propre force de vente présente en Europe avec plusieurs produits.

C’est ça que nous sommes en train de préparer, y compris dans la stratégie d’acquisition de ce produit.

Le Loramyc a obtenu en janvier l'autorisation d'être commercialisé au Royaume-Uni et au Danemark. Il devrait recevoir ce feu vert dans d'autres pays européens comme l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne et le Benelux. Où en êtes-vous dans l’obtention de ces autorisations ?
Nous sommes dans la fin de la ligne droite. Ce que nous avons de sûr, c’est effectivement l’Angleterre, mais également l’Allemagne et les pays du Nord, qui commencent à arriver…

Pour certains pays, comme l’Italie, c’est un peu particulier, parce que le prix et l’enregistrement sont drainés de concert, nous attendons donc des dates vers fin juin pour des dates de prix, en l’occurrence pour déposer en même temps notre dossier prix. Nous n’aurons pas l’AMM si nous ne déposons pas en même temps notre dossier prix… En fait, chaque pays a ses contraintes spécifiques, c’est pour ça qu’il y a un petit décalage…

Le point que nous aimerions faire d’ici à la fin juin, c’est effectivement de commencer à lancer le produit dans des pays où il est possible de le faire comme en Allemagne et en Angleterre.

Propos recueillis par Marjorie Encelot et Nicolas Sandanassamy