Interview de Jean-Christophe Brun : Directeur des affaires financières chez Auto Escape

Jean-Christophe Brun

Directeur des affaires financières chez Auto Escape

La conjoncture économique actuelle porte notre activité

Publié le 02 Septembre 2008

Un commentaire sur les résultats semestriels que vous avez publiés fin juillet ? Rappelons que vous avez enregistré une croissance soutenue et qu’il apparait une amélioration de votre rentabilité.. A quoi attribuez-vous ces résultats ?
En effet, malgré la hausse du prix du carburant nous avons réalisé une croissance de près de 30% sur le chiffre d’affaires au cours du 1er semestre, pour progresser de 5.8 M€ à 7.4 M€. A noter que les réservations du 3ème trimestre confirment la bonne orientation sur les 6 premiers mois de l’exercice. Parallèlement notre marge commerciale s’améliore et progresse à 25.1%.

Vous publiez cependant une perte nette de 0,33 millions d’euros contre une perte de 0,72 million d’euros sur ma même période, un an plus tôt. Comment expliquez-vous cela ?
Comme chaque année, depuis 8 ans, le résultat du premier semestre (période du 1er octobre au 31 mars) est en déficit, en raison de la saisonnalité de notre activité. Je rappelle que nous supportons environ 50% de nos charges fixes sur le premier semestre quand nous réalisons 30% de notre activité car l’activité touristique est très concentrée au printemps et à l’été. C’est donc l’inverse le second semestre, nous réalisons en moyenne 70% de notre chiffre d’affaires avec 50% de charges fixes. C’est le rythme de la plupart des acteurs dans le tourisme.

Le point très positif de ce premier semestre, c’est l’amélioration du niveau de perte par rapport à l’année dernière : nous étions à -459 000 euros en résultat d’exploitation au premier semestre 2006-07, tandis que cette année nous publions un résultat d’exploitation de -345 000 euros.

Le résultat net s’est également largement amélioré. L’année dernière nous avions beaucoup de charges exceptionnelles liées à l’introduction en Bourse.  Cette année, l’absence de telles charges allège le poids de la dette.

Réussirez-vous à effacer les pertes cycliques du premier semestre ? De quels leviers disposez-vous ?
On sera toujours négatif à la fin du premier semestre car c’est lié à notre activité saisonnière. Cependant, ce qu’il faut c’est l’être le moins possible afin de dégager le maximum de profit sur la deuxième période.

Le principal levier dont nous disposons est donc l’optimisation de notre niveau de coûts fixes de façon à abaisser le plus possible notre point mort. Toutefois, même avec une forte maîtrise des coûts fixes sur cette période, il est vraisemblable que nous serons toujours structurellement négatifs au 31 mars.

Vous avez donc dégagé une forte croissance de votre chiffre d’affaires (près de 30%), quels en ont été les moteurs principaux ?
Nous avons une dynamique très soutenue, autant en France qu’à l’international, et nous sommes très fiers de surperformer le marché.

Le chiffre d’affaires sur le premier semestre est en hausse de 29,8%. Cette performance se retrouve très nettement à l’international qui progresse de 94% et confirme sa montée en puissance avec une part d’activité qui représente désormais un peu plus de 8% du chiffre d’affaires du groupe, contre 5,4% l’année dernière.

Le déploiement de la société à l’international se poursuit donc et trouve une résonance tout à fait positive, en particulier dans les marchés que nous avons lancés il y a un peu plus de 18 mois comme l’Espagne et l’Italie qui affichent une croissance bien supérieure à celle de la France.

En cumulé, depuis le début de l’année, Espagne et Italie confondus enregistrent une croissance de 69% contre près de 26% en France sur la même période.

La hausse du panier moyen justifient également cette hausse du chiffre d’affaires, et ce dans un environnement hyper concurrentiel qui à plutôt tendance à tirer le marché vers le bas.

Notre politique de vente de produits accessoires, toujours très spécialisés autour du cœur d’activité de la location de voitures, apportent de la valeur ajoutée à notre offre de base et augmentent par conséquent la valeur de notre panier moyen.

Au sujet des partenariats avec Mappy et Promovacances, quels bilans faites vous ?
Il est vrai que les accords B to B to C ont constitué d’autres leviers de croissance de notre activité.

Je citerai également le partenariat avec Voyages Auchan, conclu au cours de la période précédente, marquant l’entrée d’Auto Escape au cœur de la Grande Distribution, nouveau canal de vente pour le Groupe.

La part du B to B to C est en constante augmentation au sein de la société. L’année dernière cette part représentait 4%. Ce résultat était, à l’époque, majoritairement dû aux partenariats avec les agences de voyage.

A l’heure actuelle, nous constatons que cette part représente près de 8% de notre chiffre d’affaires, et ce grâce à nos récents partenariats. Ainsi, la progression en valeur d’une année sur l’autre est proche des 100%.

Que ce soit avec Mappy, Promovacances ou Voyage Auchan, le chiffre d’affaires est traité soit par Internet, soit par téléphone. Les résultats sont cependant très différents d’un acteur à un autre.

Vous avez signé un accord récemment avec Rent-a-Car, de combien sera l’impact sur les résultats à venir ?
Il faut tout d’abord souligner que ce partenariat est novateur car c’est la première fois que nous concluons un accord de ce type avec un loueur traditionnel.

Un tel partenariat valide la position que nous avons toujours adopté vis-à-vis des loueurs, c'est-à-dire d’être à leurs côtés pour les aider à grossir sur leur corps de métier.

Dépourvu de réseau international, Rent-a-Car enregistrait pourtant sur son site Internet des demandes de locations à l’international qu’il ne pouvait satisfaire.

En se rapprochant d’Auto Escape, Rent-a-Car peut ainsi répondre à cette demand sans changer son management commercial et sans investir de ressources supplémentaires. Nous jouons le rôle d’un courtier qui redistribue les volumes à d’autres loueurs à l’international.

Le commencement de notre collaboration est tout à fait positif.

Envisagez-vous d’autres partenariats, comme par exemple un partenariat avec des compagnies de transport comme la SNCF / Air France ?
Il est clair que nous cherchons à développer d’autres partenariats en B to B to C et je crois que notre  offre combinée, Internet et gestion de la relation client par téléphone, est assez unique dans le secteur de la location de voitures et est de nature à séduire de plus en plus d’acteurs du loisir et du tourisme..

Vous abordez dans votre communiqué le projet non abouti de croissance externe au Royaume-Uni en grande partie responsable des 216 millions d’euro de charges financières, quelles en sont les raisons ? Est-ce qu’un projet de développement au Royaume-Uni est toujours à l’étude ?
Clairement, le projet dont il est fait état - qui a pesé dans les comptes du premier semestre - a été abandonné malgré l’état d’avancement du dossier, en raison de la découverte d’une information qui nous avait été jusqu’alors cachée et qui était de nature à remettre en cause le deal.

Cependant, le territoire britannique intéresse plus que jamais notre entreprise, nous restons donc très actifs dans la recherche d’un deal possible au Royaume-Uni.

En outre, je rappelle que la charge financière liée à cette transaction non aboutie est uniquement due à un effet de change lié à la dépréciation de la livre sterling, et n’est qu’une provision.

Votre carnet de réservation affiche au troisième trimestre une progression de 27,42%. Quelles sont les perspectives attendues au quatrième trimestre ?
Effectivement, nous avons un bon carnet de réservation pour le troisième trimestre. Nous sommes sur un trend depuis le début de l’année autour des 27%.

Pour ce qui est des perspectives du quatrième trimestre, c’est encore un peu tôt pour en parler, étant donné que le T4 est marqué par deux périodes chez Auto Escape. Dans un premier temps, c’est le mois de juillet qui représente le pic de notre activité sur l’année. D’ailleurs, un jour de juillet peut représenter un mois de très basse activité.

En outre, ce qui fait le succès de notre quatrième trimestre, c’est l’arrière saison, et à ce stade, malgré le comportement très aléatoire de notre clientèle à cette période, nous sommes très bien orientés.

Quel constat tirez-vous de l’évolution de votre marché ? Nous parlons beaucoup en ce moment d’un contrôle plus fort des dépenses des ménages lié à la conjoncture actuelle (baisse du pouvoir d’achat / pétrole cher), le ressentez-vous dans votre activité ?
Le marché est très concurrentiel, et très tendu sur les prix. Cependant, le développement des différents axes que nous avons précédemment cités - le B to B to C et le développement en parallèle de différentes offres - nous permet de rester très compétitifs.

A propos de la conjoncture économique, nous suivons de façon très attentive l’évolution du budget des ménages. A ce stade, les chiffres que nous annonçons ne nous permettent pas de sentir un fléchissement au sein de notre activité.

J’aurais même plutôt tendance à dire que la conjoncture économique actuelle porterait notre activité, et ce à cause de la hausse du carburant qui est sensible.

En effet, dans ce contexte, les ménages continuent à partir en vacances, alors certes ils changent un peu de mode de vacances, mais ils continuent de se déplacer. Ils favoriseront un transport moins coûteux, le train, prenant par la suite une location de voiture sur place.

Même s’il est difficile de chiffrer cet impact, envisagez-vous une année 2009, toujours positivement impactée par cette conjoncture économique?
Oui.

Quels sont les nouveaux marchés que vous envisagez ?  On rappelle que vous avez ouvert dernièrement un site Internet pour l’Autriche et le Portugal.
Dans les semaines à venir nous annoncerons l’ouverture d’autres marchés toujours frontaliers en Europe du Nord.

Avez-vous des projets de croissance externe ?
Non, mais s’il y avait une belle opportunité sur des marchés où nous avons déjà consolidé notre position, c'est-à-dire l’Espagne ou l’Italie, elle serait de nature à nous intéresser.

Au Royaume Uni, Nous restons aussi bien entendu à l’affût. C’est l’un des marchés phares du e-tourisme, loin devant la France et l’Allemagne.

Propos recueillis par Antoine Ragot