Interview de Eric Guilpart : Directeur de la communication de la Compagnie des Alpes

Eric Guilpart

Directeur de la communication de la Compagnie des Alpes

Cessions : les propositions faites ne nous satisfont pas

Publié le 04 Juin 2009

Malgré la crise, et ce notamment par son impact sur la clientèle étrangère, et malgré les championnats du monde de ski de Val d’Isère, paradoxalement handicapant, vous affichez sur l’ensemble de la saison skiable des recettes record. Quels éléments ont surtout contribué à ce record ?
Nous avons bénéficié de bonnes conditions d’exploitation : il a fait beau, il y a eu de la neige, les domaines ont été ouverts dans leur totalité. Mais bien évidemment, ça ne suffit pas. C’est la qualité des sites que nous exploitons ainsi que le niveau de services que nous offrons à nos clients qui sont les éléments déterminants dans le choix des clients de venir dans nos stations. Auxquels il faut ajouter bien sûr notre savoir-faire, notamment dans la politique de prix.

Nous récoltons ici les fruits de la politique industrielle que nous menons depuis 20 ans, faite d’investissements importants et réguliers. Nous mesurons quotidiennement la qualité de nos services au travers d’enquêtes satisfaction clients, et nous savons exactement où nous devons investir. Nous pouvons ainsi nous assurer que le client accepte de payer pour avoir une meilleure qualité.

Comment expliquez-vous que «ceux qui sont venus ont consommé plus et à des prix plus élevés» ?
C’est une tendance de long terme. Nous sommes dans des stations de «destination». Dans la plupart de nos sites, nous recevons des vacanciers qui restent en général une semaine et notre politique est de faire en sorte que ces vacanciers consomment le plus possible : nous avons par exemple une politique du prix du six jours par rapport au prix du un jour qui incite les personnes à prendre du six jours.

Nos clients prennent de plus en plus des forfaits longs non seulement parce que cela leur revient moins cher mais aussi parce que, grâce à nos investissements, nous sommes en mesure de garantir une grande qualité de ski, notamment par nos installations de neige de culture.

De plus, pour cet hiver, nous pu réouvrir le domaine «Paradiski», qui relie Les Arcs et La Plagne. Ce grand domaine est tarifé plus cher puisqu’il offre plus de ski et il est choisi par une part importante de la clientèle de ces deux stations.

Vous affichez un très bon mois d’avril. Combien a-t-il représenté dans le chiffre d’affaires ?
Dans nos stations d’altitude, c’est un mois important. Cette année, nous avons réalisé 15% de notre activité en avril et début mai.

Si les recettes sont record, qu’en est-il des résultats sur l’ensemble de la saison de ski ? Des marges ?
Ils seront dévoilés en décembre dans les comptes annuels. Mais il faut rappeler deux points importants :

Premièrement, dans notre métier des domaines skiables, nous avons aussi une petite activité de vente de terrains. Elle est réduite (10 millions d’euros l’an dernier, soit 3% du chiffre d’affaires des domaines skiables) mais assez rémunératrice (7,7 millions d’excédent brut d’exploitation l’an dernier). Cette année, au premier semestre, nous n’avons pas vendu de terrain. Nous en vendrons peut-être au deuxième semestre, mais certainement pas au niveau de l’an dernier, compte tenu de la conjoncture immobilière. Donc la base de comparaison est pénalisante.

En second lieu, l’exploitation de domaines skiables est une activité avec des coûts fixes élevés. Ces coûts augmentent année après année, je pense en particulier aux amortissements. Nos charges fixes dérivent de 2 à 3% par an, ce qui fait que si nous affichons un chiffre d’affaires en hausse de 1,7%,  le niveau de marges s’en ressentira vraisemblablement un petit peu.

Si vous êtes «satisfaits» des domaines skiables, vous vous dites «encouragés» par les parcs de loisirs. Quels sont ces signaux encourageants ?
Nous avons fait un tiers de l’exercice et nous affichons déjà une progression en volume d’un peu plus de 1% et de la dépense par visiteur de 3%. En période de crise économique, nous estimons cette performance encourageante.

Comment expliquez-vous qu’en période de crise la dépense par visiteur augmente ?
En période de crise, la dépense de loisirs est plus impulsive. Nous constatons dans le comportement des clients une augmentation des achats de dernière minute. Et lorsque l’on achète à la dernière minute, on paye plus cher.

De plus, nous avons adopté cette année une politique de promotion moins agressive que l’an dernier : nos clients payent donc un peu plus, sans que cela ait eu, jusqu’à présent, des incidences fortes sur notre fréquentation.

Où en êtes-vous de votre plan d’économies de 5 millions d’euros sur les charges d’exploitation ? Quels types de dépenses souhaitez-vous particulièrement réduire ?
Quelques précisions : nous avons identifié 5 millions d’euros d’économies de charges possibles sur cet exercice, par rapport à notre budget, que nous déclencherons si nécessaire. Il s’agit pour l’essentiel de décalages des dépenses les moins urgentes.

Les dépenses concernées concernent surtout les achats, les frais d’études, le marketing, ainsi qu’une meilleure gestion des personnels saisonniers.

Vous envisagez des cessions… Vous ne me direz pas lesquelles mais en interne je suppose que vous avez déjà des idées des actifs visés… Avez-vous déjà été approchés ?
Nous avons effectivement étudié les cessions en interne et il y a même des propositions qui ont été faites, mais elles ne nous satisfont pas. Elles sont très en dessous de nos attentes. Nous n’avons pas le couteau sous la gorge, nous préférons donc attendre.

Attendez-vous la fin de la crise pour vendre et en tirer ainsi un meilleur prix ?
C’est une solution mais pas nécessairement la meilleure. Nous pourrions également les regrouper ou négocier des cessions étalées dans le temps ou trouver des accords globaux de partenariats pour plusieurs sites. Nous sommes vraiment ouverts à toutes les solutions.

Sans forcément me donner de guidances, je suppose que vous avez en interne des scénarios plus ou moins optimistes…
Dans nos anticipations de résultats, nous avons effectivement des scénarios de base et des scénarios dégradés.

Je ne peux effectivement pas en dire plus mais la Compagnie des Alpes est une des valeurs moyennes les plus suivies par les analystes de qualité et j’invite vos lecteurs à les lire ou à consulter le consensus. Leurs prévisions ne nous choquent pas, mais évidemment beaucoup dépendra de l’activité des parcs en juillet/août.

Propos recueillis par Marjorie Encelot