Interview de Saad Benlamine : Co-gérant du fonds Amplégest Midcaps

Saad Benlamine

Co-gérant du fonds Amplégest Midcaps

La liquidité est une contrainte forte pour les fonds éligibles au PEA-PME

Publié le 06 Décembre 2013

Le gouvernement a annoncé la création d’un « PEA-PME » pour encourager l’investissement en actions dans les PME. En tant que gérant de petites et moyennes valeurs, qu’attendez-vous de ce nouveau produit ?

Nous pensons que le PEA-PME peut rencontrer un certain succès. L’idée de faciliter l’accès au financement des PME mais aussi de permettre à des épargnants de placer leur argent à long terme en bénéficiant d’exonérations fiscales est une bonne idée. Cela dit, le PEA-PME s’adresse surtout à de gros épargnants, en particulier ceux qui ont déjà « plafonné » leur PEA (ndlr : dont le montant de dépôt maximum s’élève à 132 000 euros et passerait à 150 000 euros au 1er janvier 2014). On compte aujourd’hui 60 000 PEA au plafond, sur un total de 5 millions. Pour ces personnes, il n’y a pas beaucoup de placements aussi intéressants que le PEA-PME à l’heure actuelle, tant en matière de rendement que de fiscalité.

Seulement 3% de l’argent détenu sur les PEA est aujourd’hui investi dans des PME. Pourquoi selon-vous ?

Les PME sont souvent considérées comme un investissement risqué, idée avec laquelle nous ne sommes pas forcément d’accord. Depuis le 1er janvier 2000, le segment mid&small de la bourse de Paris a gagné 93% alors que le CAC 40 a cédé 28% hors dividendes ! Les mid&small ont superformé le CAC 40 onze années sur quatorze, sauf en 2007, 2008 et 2011. Certes, la volatilité peut être plus importante pour cette classe d’actifs. Mais dans le cadre d’un placement à long terme comme le PEA, ce risque est beaucoup moins important.
Une autre explication peut être apportée par la faible profondeur de ce marché. Beaucoup d’entreprises se sont tenues à l’écart de la bourse ces dernières années en raison des faibles niveaux de valorisation, et par crainte de ne pas pouvoir lever les fonds dont elles avaient besoin. Le PEA-PME peut inciter les investisseurs à revenir sur cette classe d’actifs mais aussi favoriser un regain des introductions en bourse.

La faible liquidité des titres est-elle un frein à l’investissement dans les PME ?

Les mid&small cap représentent environ 60% du nombre total des sociétés cotées à Paris mais seulement 5% de la capitalisation boursière et moins de 2% des volumes. De nombreuses PME sont détenues par leurs fondateurs-dirigeants, ce qui implique souvent un flottant réduit. Pour un gérant de fonds, cela pose effectivement un problème de liquidité. C’est pourquoi beaucoup de fonds se sont positionnés sur des valeurs moyennes au dessus du milliard de capitalisation boursière. Le PEA-PME peut permettre d’améliorer la liquidité globale du segment et va inciter les gérants à s’intéresser à de plus petites valeurs. Mais la contrainte de liquidité restera forte, en particulier pour les fonds les plus importants.
Chez Amplégest, nous avons décidé de conserver notre fonds Midcaps, avec une part importante de valeurs dont la capitalisation boursière est comprise entre 150 millions et un milliard d’euros. Le PEA PME serait trop contraignant pour ce fonds dont les encours avoisinent 50M€. Il nous a donc paru plus pertinent de lancer un nouveau fonds éligible au PEA-PME, davantage orienté vers les petites valeurs.

Quelques exemples de valeurs et de secteurs à suivre ?

Il y a en France un tissu de PME et d’ETI industrielles très intéressant. C’est le cas aussi pour un pays comme l’Italie, même si ces entreprises manquent parfois de taille critique pour se développer à l'international. Nous avons par exemple investi dans Lisi, un équipementier français pour l’aéronautique. Dans le même secteur nous suivons Figeac-Aero, qui n’est pas encore coté mais qui bénéficie d’un flux de commande très important et pourrait faire appel au marché très prochainement pour financer son développement.
Les opportunités sont nombreuses également dans le secteur des services informatiques. Des sociétés comme Pharmagest ou IGE XAO, éditeurs de logiciels, affichent des profils très solides, avec des parts de marché élevées et une partie importante de chiffre d’affaires récurrent.
Dans le domaine Internet, nous apprécions également le groupe Aufeminin, propriétaire des sites Aufeminin.com, Marmiton.org ou encore MyLittleParis.com. Son positionnement premium, son potentiel de développement à l’international et sa faible valorisation en fait une de nos principales convictions.
En revanche nous nous tenons à l’écart d’un secteur comme les biotechnologies car nous avons du mal à appréhender leur profil de risque et donc à les valoriser.

Propos recueillis par François Schott