Interview de Hervé Denize : Directeur Général Délégué du groupe Nexity

Hervé Denize

Directeur Général Délégué du groupe Nexity

Nous ne sommes pas une banque. Nous ne sommes pas non plus une foncière, pourtant nous avons accumulé toutes les mauvaises nouvelles provenant de ces différents secteurs d’activité

Publié le 18 Février 2008

Vous venez de publier votre chiffre d’affaires annuel, quel commentaire vous inspirent ces résultats ?
La publication des résultats interviendra le 5 mars 2008. Pour le chiffre d’affaires réalisé par Nexity, je voudrais relever trois points.

D’abord, c’est une croissance du chiffre d’affaires à deux chiffres (+ 29%). Beaucoup d’entreprises aimeraient avoir cette progression.

Ensuite, la hausse de notre chiffre d’affaires témoigne de la solidité de Nexity dans un contexte qui s’est durci au deuxième semestre.

Enfin, sur les 29% de croissance, 12% proviennent des activités apportées par le Groupe Caisse d’Epargne. C’est une illustration concrète de l’intérêt de cette alliance et de son impact sur notre activité.

Au global, nous sommes assez loin de l’image que la crise américaine est en train d’installer, celle d’une crise mondiale de l’immobilier.

Comment voyez-vous évoluer le marché de l’immobilier sur l’exercice qui a débuté ? La crise du logement que connaît la France risque-t-elle de durée ?
Il faut être un peu précis lorsque l’on parle d’immobilier et bien distinguer le secteur du logement, de l’immobilier d’entreprise.

Sur le logement, on est en présence d’une crise qui est celle d’une insuffisance de l’offre au regard de la demande. Il manque plus de 500 000 logements en France compte tenu de l’essor géographique. Il faut aussi que cette offre s’adapte aux capacités de financement des ménages.

C’est ce que nous avons fait chez Nexity dès 2006, où nous avons pris des engagements forts en faveur de la primo-accession et de la mixité sociale. C’est cette orientation stratégique dont nous avons recueilli les fruits en 2007, avec une progression de la part des accédants dans le volume de nos réservations auprès des opérateurs sociaux.

Sur l’immobilier d’entreprise, nous venons de connaître une année record. En Ile-de-France nous bénéficions d’un taux de vacance particulièrement faible, le marché devrait rester attrayant pour les investisseurs.

Le rapport Attali a été rendu public et ménage une place importante à la question immobilière. Qu’en pensez-vous, peut-il résorber la crise du logement français selon vous ?
L’ambition du gouvernement est claire, il faut construire 500 000 logements en accession dont 120 000 logements sociaux. Au-delà du volontarisme qui anime tous les acteurs privés comme publics, il s’agit d’apporter des réponses concrètes pour permettre d’atteindre cet objectif.

Aujourd’hui, nous pensons que le système a atteint sa limite. Il va falloir réinventer un nouveau modèle de fonctionnement qui permette au flux d’offres d’être plus régulier voire plus important si l’on veut répondre à l’explosion de la demande à des conditions de prix acceptables. Il faut arrêter de considérer que les difficultés du logement se résoudront sur le court terme.

En matière de construction et d’habitat, le rapport Attali s’articule autour de quatre axes principaux : favoriser la mixité sociale, construire plus et mieux, libérer le mouvement et développer l’accès à la propriété des plus modestes.

Ces axes sont bons. Pour la mise en œuvre concrète de chaque «décision» il nous semble essentiel que le logement reste au centre du débat.

Quel bilan tirez-vous de votre partenariat avec le groupe Caisse d’Epargne ? Quelle part de votre chiffre d’affaires représentent les activités apportées par l’Ecureuil ? Quels sont vos projets en cours ?
Après moins de six mois, nous pouvons d’ores et déjà tirer un bilan positif de notre alliance avec le groupe Caisse d’Epargne. Un chiffre le résume  bien : sur 29% de croissance du chiffre d’affaires, 12% proviennent des apports du groupe Caisse d’Epargne.

Aujourd’hui, les organisations sont en place et nous avons rencontrés l’ensemble des caisses régionales, nous leurs avons présenté et expliqué notre démarche. Une alliance ne se décrète pas, mais elle se construit avec l’ensemble de l’entreprise. C’est ce mouvement qui est engagé.

Notre alliance avec les Caisses d’Epargne nous apporte une proximité avec le client sans équivalent. Très concrètement, sur le terrain, c’est 4 500 agences du réseau des Caisses d’Epargne auxquelles s’ajoute Iselection, dont nous avons acquis la majorité du capital, et l’ensemble des points de vente Century 21, Guy Hoquet et Arthur l’Optimist (plus de 2 000 agences immobilières).

Pour mieux accompagner nos clients tout au long de leur parcours résidentiel nous avons intégré Lamy aux côtés de Saggel. C’est un ensemble équivalent en terme de chiffre d’affaires à Foncia.

Quelles sont perspectives chiffrées pour le prochain exercice ? Quels sont vos objectifs ?
Pour 2008 sur l’activité logement, Nexity prévoit d’enregistrer une progression de ses parts de marché pour atteindre un niveau d’au moins 9% d’un marché de la promotion privée estimé entre 110 à
115 000 unités au niveau national.

Dans le tertiaire, les prévisions de marché pour 2008 demeurent favorables, après deux années 2006 et 2007 remarquables. Le groupe prévoit d’enregistrer en 2008 de nouvelles prises de commandes tertiaires à un niveau au moins égal à celui de 2007.

Concernant votre présence à l’international, vous avez évoqué lors d’une interview précédente, que vous souhaitiez réaliser des partenariats, notamment en République Tchèque. Où en êtes-vous sur ce dossier ? En avez-vous d’autres en préparation ?
Pour accélérer le développement de ses activités de promotion à l’international, nous renforçons notre organisation en plaçant l’ensemble des implantations sous le pilotage des dirigeants opérationnels des pôles Tertiaire et Logement en France.

Daniel Valoatto, Directeur général délégué du pôle Tertiaire, supervise dorénavant les activités de promotion tertiaire à l’international (Nexity-España, Nexity-Portugal, Nexity-Italia et l’activité tertiaire de Nexity-Belgium). Bruno Corinti, PDG de Nexity-Logement avec Jean-Pierre Mingeonnet, Directeur général délégué, assurent dès à présent le développement opérationnel des activités de promotion résidentielle en Italie, en Belgique et en République Tchèque.

Le titre Nexity a été particulièrement chahuté ces derniers temps, avec un plongeon spectaculaire sous la barre des 30 euros ; ce que l’on n’avait pas observé depuis 2005... Quel commentaire vous inspire cette évolution ?
Le nouveau modèle du groupe n’a pas été bien compris par le marché. Nexity aujourd’hui, c’est sept métiers différents. Nous ne sommes pas une banque. Nous ne sommes pas non plus une foncière, pourtant nous avons accumulé toutes les mauvaises nouvelles provenant de ces différents secteurs d’activité.

Mais nous ne sommes pas inquiets : sur la base du consensus des analystes financiers, l’action n’est valorisée que 5,4 fois ses bénéfices attendus pour 2007 et offre un rendement exceptionnel de 6,5%.

La valeur de l’entreprise n’a pas changé. Au 31 décembre 2007, Nexity a environ 2,1 milliards de fonds propres, un carnet de commandes de 3,4 milliards (+15,4 %), représentant plus de 19 mois d’activité.

Une chose est sure, nous n’entendons pas modifier notre stratégie en raison du comportement de la bourse. La raison finira par l’emporter. « Le cours actuel de Nexity ne nous paraît pas refléter la valeur de la société telle qu’elle ressort de ses fondamentaux, de ses prévisions de bénéfices et de son portefeuille d’actifs.

Le secteur de l'immobilier continue de subir la défiance des investisseurs, ne craignez-vous pas de connaître le même sort que l'espagnol Colonial dont le cours de bourse vient de fondre de 45% en 4 jours ?
A la différence des promoteurs espagnols, les sociétés françaises n’achètent pas de terrains tant que le permis de construire n’a pas été obtenu. Si pour une raison ou une autre, l’option d’achat n’est pas levée, le promoteur perd les 5% de caution versée au propriétaire du terrain. Nexity ne possède donc pas de portefeuille foncier.

Quant au stock de logements, nous nous fixons un niveau de pré-commercialisation de 30% de nos programmes avant de commencer le chantier. Ce taux est dans les faits largement dépassé puisqu’il s’établissait à 67% en fin d’année dernière. A la fin du mois de décembre, seuls 53 logements terminés n’étaient pas vendus. Rapporté à l’échelle d’une production de 10 919 unités en 2007, le risque est infinitésimal.

Au-delà de ces différences structurelles, je tiens à rappeler encore une fois que les fondamentaux du marché français sont sains et que Nexity se porte bien.

Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy