Interview de Alexandre 
 Hezez : Gérant actions au sein de la société de gestion Convictions AM

Alexandre Hezez

Gérant actions au sein de la société de gestion Convictions AM

Scandale des saisies immobilières aux Etats-Unis : nous n'assisterons pas à une nouvelle crise extrême, à l'instar de celle de 2008

Publié le 08 Février 2011

Quel regard portez-vous sur le scandale des saisies immobilières aux Etats-Unis ?
Je ne pense pas que l’on ait assisté à des pratiques frauduleuses, mais davantage à des défaillances du système.
Ce qui arrive montre le pragmatisme quasi cynique des banques américaines (et des entreprise américaine en générale) pendant la crise.
La crainte de perte abyssale a conduit les banques à accélérer les saisies immobilières. A l’instar des entreprises, les banques ont surréagi sans se soucier des répercussions sociales pour se protéger avant tout. On a assisté à un sauve qui peut.
En cela l’abondance des saisies immobilières est à mettre en parallèle avec les licenciements massifs auxquels ont procédés les entreprises non financières. Je rappelle que le nombre de chômeurs à augmenter de plus de 8 millions dont prés de 5 millions devenus des chômeurs de longues durée ( + de 27 semaines).

Pensez-vous que ce scandale aura des répercussions sur les banques ?
Oui. Mais c’est en fait une bonne nouvelle. Les banques vont devoir payer leurs erreurs passées parce qu’elles le peuvent. Elles ont renoué avec la rentabilité. Les marges nettes sont en forte augmentation. Elles présentent un moindre risque pour l’économie américaine.

Va-t-on vers une nouvelle crise aigüe à l’instar de celle que l’on a connue en 2008 ?

Nous n’assisterons pas à une nouvelle crise extrême, à l’instar de celle de 2008, pour la simple raison que cette crise est étroitement surveillée par la Fed et qu’une crise qu’on anticipe n’arrive pas.
Le marché immobilier constitue le point central du radar de la Réserve Fédérale américaine. La banque centrale suit de très prêt l’évolution des prix et la déflation aujourd’hui observée n’est pas rassurante. C’est en partie ce qui explique la poursuite de sa politique monétaire non conventionnelle.

Quelle pourrait être l’ampleur des répercussions de ce scandale ?
On comptabilise près de 9 millions de saisies immobilières depuis quatre ans. Il n’est pas dit que nous aurons 9 millions de saisies qui seront contestées. Beaucoup de ménages sont, indépendamment des vices de procédure, dans l’incapacité d’honorer le remboursement des prêts qu’elles ont souscrit pour financier leur bien. De nombreuses maisons ont été détruites à défaut d’être entretenues. Par ailleurs, des ménages ont refait leur vie.
Le vrai problème sera davantage la contestation que pourrait faire d’importants investisseurs comme Pimco.

Certains craignent que le ralentissement des saisies retarde le rétablissement du marché immobilier américain ?
Un ralentissement du rythme des saisies permettra au marché immobilier de s’assainir. Le scandale déclenché aura eu pour effet de conduire les banques à être plus rigoureuses dans leur procédure de saisie. Cela devrait conduire naturellement à une diminution du nombre de saisies.
A l’heure actuelle, ce qui pose difficulté c’est l’état du marché secondaire des maisons qui empêche le marché de la reconstruction de repartir.
Les saisies immobilières viennent alimenter le stock des maisons invendues. Si les saisies sont moins nombreuses, alors le stock devrait mécaniquement être plus faible et cela profitera aux prix sur le marché, l’offre devenant moins abondante par rapport à la demande.

De quelle manière voyez-vous ce marché évoluer ?
Nous avons actuellement un stock de 3,5 millions de maisons. Nous avions à un stock de 4,5 millions de maisons au plus fort de la crise financière, au deuxième trimestre 2008. Il faudrait retomber entre 2 et 2,5 millions de maisons pour retrouver un niveau normalisé de stock.
Cela permettrait de construire un million de maisons par an. Aujourd’hui 500 000 maisons sont mises en chantier. Nous étions avant la crise à un niveau de 1,5 millions de maisons.

Nous sommes face à deux années de vache maigre et surtout d’assainissement. Nous ne voyons pas de reprise fin 2012.

Le facteur démographique constituerait cependant un élément positif ?

21% des ‘young adults’, agés entre 18 et 34 ans habitent encore chez leurs parents. Ce taux était de 18,5% avant la crise. Si le marché de l’emploi poursuit son redémarrage, ce sont autant de personnes susceptibles d’acquérir un bien immobilier mais Il faudrait alors garder des taux d’intérêt bas. Ils sont à 4,30 pour 15 ans.



Propos recueillis par Imen Hazgui