Arnaud Faller
Directeur Général Délégué en charge des Investissements de CPR Asset Management
Il y aura des meilleurs moments pour revenir sur les marchés actions au cours de l'année
Publié le 02 Juin 2020
Une notable différence est à relever entre les actions prises par les autorités pour répondre à l’actuelle crise économique par rapport celles adoptées pour faire face à la crise de 2008-2009...
Les interventions des autorités monétaires et budgétaires en guise de soutien sous forme notamment de programmes de rachat d’actifs pour les uns et de plans de relance pour les autres ont été beaucoup plus rapides et beaucoup plus fortes.
Cela s’explique par le fait que la visibilité sur l’origine du mal et ses possibles répercussions négatives était meilleure qu’il y a une dizaine d’années. Ainsi, face à l’effondrement économique découlant de la grande crise sanitaire, les Banques centrales et gouvernements ont vite su quoi faire.
En dépit des déficits budgétaires annoncés (20% du PIB aux Etats-Unis par exemple), les taux longs n’aient pas connu de sursaut outre mesure. Quelle lecture en faites-vous ?
Les effets sur les taux longs ont été jusque là limités et devraient continuer à l’être grâce à la mainmise sans précédent des Banques centrales. Certaines semaines la Fed a été amenée à acquérir 375 milliards de dollars de titres du Trésor, davantage qu’en une année par le passé.
En somme, les taux devraient rester capés à leur niveau actuel autour de 0,70% s’agissant des taux longs américaines. En sera-t-il de même pour les taux en Europe ?
Vraisemblablement tel sera le cas. Au-delà du Bund allemand, une vive influence de la BCE a également été observée sur les taux des pays périphériques de la zone euro, comme l’Italie. Le spread entre le taux à dix ans italien et le taux à dix ans allemand fluctue désormais autour de 1,50%.
L’appui des Banques centrales a aussi été plus significatif cette fois-ci sur le crédit que par le passé...
Alors que la BCE intervenait déjà sur le segment des obligations d’entreprises bien notées (dites Investment Grade), la Fed a décidé d’en faire de même de manière directe pour les obligations IG et de manière indirecte, via des ETF, pour les obligations d’entreprises plus spéculatives, à haut rendement (dites High Yield).
La démarche a été tellement bien accueilli par le marché qu’il a suffi que la Fed signale son intention d’acheter pour voir des mouvements se produire.
Ainsi, même s’il faut s’attendre à avoir des défauts, le positionnement de ces deux Banques centrales a énormément limité le risque extrême dans tout le compartiment du crédit.
C’est ce qui explique qu’actuellement, nous soyons très exposés au marché du crédit, notamment aux obligations IG.
La bonne tenue des marchés du crédit favorisée par l’abondante liquidité des Banques centrales a entraîné la bonne résistance des marchés actions… Quels commentaires vous inspire le rebond des grands indices boursiers ?
La progression des marchés actions a peut-être été trop vigoureuse.
En effet, nous ne nous attendons pas à une reprise économique en V. Dit autrement, nous ne pensons pas que nous retrouverons en 2021 les niveaux de PIB et de bénéfices qui prévalaient en 2019. Il faudra probablement patienter jusqu’en 2022 pour cela.
En conséquence, nous sommes d’avis qu’il y aura des meilleurs moments pour revenir sur les marchés actions au cours de l’année. Et nous conservons des munitions pour nous repositionner lorsque nous observerons de meilleures valorisations.
Vous tablez sur d’autres trous d’air ?
C’est ce qui compose notre scénario central. Au moins deux autres phases de repli devraient se dessiner à la fin du mois juin et cet automne. La première correction devrait découler du phénomène de rebalancement de l’allocation stratégique dans les portefeuilles de certains investisseurs institutionnels. Beaucoup ont racheté substantiellement des actions en avril. Ils pourraient vouloir racheter abondamment des taux à la fin du mois de juin.
Le second mouvement baissier pourrait être généré par une période de carence qui pourrait s’installer entre la mise en œuvre des mesures de soutien massives et le déploiement des mesures de relance. La sélection des projets, en particulier dans la santé ou dans la transition énergétique et leur implémentation pourraient requérir plus de temps que prévu et retarder le stimulus attendu.
Pour autant, nous ne tablons pas sur des corrections d’une ampleur équivalente à celle du mois de mars.
Que regard avez-vous sur l’écart type de performances sectorielles relevé sur les marchés actions ?
La dispersion de performances entre secteurs mais aussi entre valeurs d’un même secteur a été très nette et devrait persister. Très clairement, certains secteurs et certaines valeurs spécifiques devraient continuer à être mis à mal alors que d’autres devraient poursuivre leur rallye.
En cela, nous sommes entrés dans une phase moins beta, et plus centrée sur la sélectivité des titres.
Quel positionnement avez-vous sur les valeurs décotées ?
Nous sommes très discriminants. Nous avons surtout des positions tactiques sur certaines sociétés que nous estimons très dépréciées.
Nous ne voyons pas une rotation s’opérer en faveur du segment dans son ensemble avant au moins un an.
Quelle allocation géographique privilégiez-vous ?
Nous étions jusque-là très exposés au marché actions américain en raison de sa capacité à rebondir plus rapidement et de sa forte composante technologique.
Très récemment nous avons pris la décision de revenir très graduellement sur la zone euro, essentiellement sur des valorisations jugées attractives, pour un laps de temps limité.
Qu’en est-il des émergents ?
L’univers des émergents est très hétérogène. Si nous pouvons être inquiets de ce qui se passe en Amérique latine, notamment au Brésil, nous sommes plus confiants sur l’évolution de la situation de l’Asie du sud-est, en particulier en Chine.
Nous sommes davantage sur l’equity émergent que sur la dette émergente.
Quelle allocation avez-vous sur les matières premières ?
Les matières premières pourraient tirer avantage de l’implémentation des plans de relance. Nous sommes davantage positionnés sur les actions liées à ces matières premières que sur les matières premières elles-mêmes.
Nous privilégions les entreprises qui sont en amont d’un cycle de reprise de la construction d’infrastructures.
Quels risques entrevoyez-vous pour les prochains moins ?
Bien entendu, une deuxième vague de la pandémie.
Le bras de fer entre les Etats-Unis et la Chine est une autre préoccupation car il pourrait durer. Donald Trump a en ligne de mire les prochaines élections présidentielles de cette fin d’année et dans cette optique, la Chine apparait comme un bon bouc émissaire. Par ailleurs, Démocrates et Républicains sont alignés sur la fermeté à témoigner à l’égard de Pékin.
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Les interventions des autorités monétaires et budgétaires en guise de soutien sous forme notamment de programmes de rachat d’actifs pour les uns et de plans de relance pour les autres ont été beaucoup plus rapides et beaucoup plus fortes.
Cela s’explique par le fait que la visibilité sur l’origine du mal et ses possibles répercussions négatives était meilleure qu’il y a une dizaine d’années. Ainsi, face à l’effondrement économique découlant de la grande crise sanitaire, les Banques centrales et gouvernements ont vite su quoi faire.
En dépit des déficits budgétaires annoncés (20% du PIB aux Etats-Unis par exemple), les taux longs n’aient pas connu de sursaut outre mesure. Quelle lecture en faites-vous ?
Les effets sur les taux longs ont été jusque là limités et devraient continuer à l’être grâce à la mainmise sans précédent des Banques centrales. Certaines semaines la Fed a été amenée à acquérir 375 milliards de dollars de titres du Trésor, davantage qu’en une année par le passé.
En somme, les taux devraient rester capés à leur niveau actuel autour de 0,70% s’agissant des taux longs américaines. En sera-t-il de même pour les taux en Europe ?
Vraisemblablement tel sera le cas. Au-delà du Bund allemand, une vive influence de la BCE a également été observée sur les taux des pays périphériques de la zone euro, comme l’Italie. Le spread entre le taux à dix ans italien et le taux à dix ans allemand fluctue désormais autour de 1,50%.
L’appui des Banques centrales a aussi été plus significatif cette fois-ci sur le crédit que par le passé...
Alors que la BCE intervenait déjà sur le segment des obligations d’entreprises bien notées (dites Investment Grade), la Fed a décidé d’en faire de même de manière directe pour les obligations IG et de manière indirecte, via des ETF, pour les obligations d’entreprises plus spéculatives, à haut rendement (dites High Yield).
La démarche a été tellement bien accueilli par le marché qu’il a suffi que la Fed signale son intention d’acheter pour voir des mouvements se produire.
Ainsi, même s’il faut s’attendre à avoir des défauts, le positionnement de ces deux Banques centrales a énormément limité le risque extrême dans tout le compartiment du crédit.
C’est ce qui explique qu’actuellement, nous soyons très exposés au marché du crédit, notamment aux obligations IG.
La bonne tenue des marchés du crédit favorisée par l’abondante liquidité des Banques centrales a entraîné la bonne résistance des marchés actions… Quels commentaires vous inspire le rebond des grands indices boursiers ?
La progression des marchés actions a peut-être été trop vigoureuse.
En effet, nous ne nous attendons pas à une reprise économique en V. Dit autrement, nous ne pensons pas que nous retrouverons en 2021 les niveaux de PIB et de bénéfices qui prévalaient en 2019. Il faudra probablement patienter jusqu’en 2022 pour cela.
En conséquence, nous sommes d’avis qu’il y aura des meilleurs moments pour revenir sur les marchés actions au cours de l’année. Et nous conservons des munitions pour nous repositionner lorsque nous observerons de meilleures valorisations.
Vous tablez sur d’autres trous d’air ?
C’est ce qui compose notre scénario central. Au moins deux autres phases de repli devraient se dessiner à la fin du mois juin et cet automne. La première correction devrait découler du phénomène de rebalancement de l’allocation stratégique dans les portefeuilles de certains investisseurs institutionnels. Beaucoup ont racheté substantiellement des actions en avril. Ils pourraient vouloir racheter abondamment des taux à la fin du mois de juin.
Le second mouvement baissier pourrait être généré par une période de carence qui pourrait s’installer entre la mise en œuvre des mesures de soutien massives et le déploiement des mesures de relance. La sélection des projets, en particulier dans la santé ou dans la transition énergétique et leur implémentation pourraient requérir plus de temps que prévu et retarder le stimulus attendu.
Pour autant, nous ne tablons pas sur des corrections d’une ampleur équivalente à celle du mois de mars.
Que regard avez-vous sur l’écart type de performances sectorielles relevé sur les marchés actions ?
La dispersion de performances entre secteurs mais aussi entre valeurs d’un même secteur a été très nette et devrait persister. Très clairement, certains secteurs et certaines valeurs spécifiques devraient continuer à être mis à mal alors que d’autres devraient poursuivre leur rallye.
En cela, nous sommes entrés dans une phase moins beta, et plus centrée sur la sélectivité des titres.
Quel positionnement avez-vous sur les valeurs décotées ?
Nous sommes très discriminants. Nous avons surtout des positions tactiques sur certaines sociétés que nous estimons très dépréciées.
Nous ne voyons pas une rotation s’opérer en faveur du segment dans son ensemble avant au moins un an.
Quelle allocation géographique privilégiez-vous ?
Nous étions jusque-là très exposés au marché actions américain en raison de sa capacité à rebondir plus rapidement et de sa forte composante technologique.
Très récemment nous avons pris la décision de revenir très graduellement sur la zone euro, essentiellement sur des valorisations jugées attractives, pour un laps de temps limité.
Qu’en est-il des émergents ?
L’univers des émergents est très hétérogène. Si nous pouvons être inquiets de ce qui se passe en Amérique latine, notamment au Brésil, nous sommes plus confiants sur l’évolution de la situation de l’Asie du sud-est, en particulier en Chine.
Nous sommes davantage sur l’equity émergent que sur la dette émergente.
Quelle allocation avez-vous sur les matières premières ?
Les matières premières pourraient tirer avantage de l’implémentation des plans de relance. Nous sommes davantage positionnés sur les actions liées à ces matières premières que sur les matières premières elles-mêmes.
Nous privilégions les entreprises qui sont en amont d’un cycle de reprise de la construction d’infrastructures.
Quels risques entrevoyez-vous pour les prochains moins ?
Bien entendu, une deuxième vague de la pandémie.
Le bras de fer entre les Etats-Unis et la Chine est une autre préoccupation car il pourrait durer. Donald Trump a en ligne de mire les prochaines élections présidentielles de cette fin d’année et dans cette optique, la Chine apparait comme un bon bouc émissaire. Par ailleurs, Démocrates et Républicains sont alignés sur la fermeté à témoigner à l’égard de Pékin.
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Imen Hazgui