Interview de Antoine Lissowski : Directeur financier de CNP Assurances

Antoine Lissowski

Directeur financier de CNP Assurances

Nous espérons une croissance du résultat net courant d’au moins 10%

Publié le 15 Mars 2008

Le groupe CNP Assurances affiche de très bons résultats pour l’année 2007. Quels enseignements retirez-vous de ces performances?
Nos résultats traduisent la robustesse de notre modèle de développement. L’activité est très équilibrée : les trois quarts en France, un quart à l’étranger, des activités épargne qui représentent un tiers du résultat, mais également des activités de prévoyance, de retraite et des activités de compte propre
 Nous avons un résultat net courant de 1,12 milliards euros avant plus values et frais du portefeuille de trading, en progression de 20% par rapport à l’année dernière.
Nous avons une bonne résistance due aux encours que nous gérons.

Ceci est le fruit d’activités soutenues, de produits en croissance et d’une très bonne maîtrise de nos coûts qui ont augmenté seulement d’un peu plus de 4%. L’ensemble de cela amène un effet de levier significatif pour nos actionnaires.

La dégradation de la conjoncture économique est-elle de nature à atténuer le dynamisme du groupe cette année ?
Le dynamisme d’un groupe suppose sa capacité à progresser, à produire plus de résultats.
Il y a lieu de distinguer le court terme du long terme. Il est évident que si une crise importante venait à se développer sur les prochaines années, la société, à l’instar des autres sociétés du marché, en subirait des conséquences négatives sur le long terme.

Cependant, l’évolution du chiffre d’affaires sur le court terme n’a pas de conséquence considérable sur notre capacité à produire du résultat. Celui-ci dépend beaucoup des encours que nous gérons déjà.

Sur l’ensemble des produits, ce que nous appelons le PNA en assurance de 2007, seulement 3% proviennent des nouvelles collectes d’épargne sur la France, marché où l’activité n’a pas été très dynamique, puisque la CNP a connu une baisse de 3%.

Quelles sont vos prévisions pour l’exercice 2008 ?
Nous n’avons pas l’habitude de donner des prévisions de résultat. Néanmoins, nous pouvons dire que nous espérons une croissance du résultat net courant d’au moins 10%.
La structure de nos activités et de notre compte de résultat nous permettent ainsi de projeter un tel objectif, sauf évolution très négative du marché financier ou du marché de l’assurance.

Quelle a été la conséquence de la crise des subprimes sur les résultats de votre groupe ?
Nous n’avons pas été affectés par la crise des subprimes. L’impact par des investissements indirects a été inférieur à 10 millions d’euros. Si nous considérons l’ensemble de la titrisation, les CDO, ABS…, l’impact pour CNP Assurances avant impôt était de 47 millions d’euros, un chiffre très modeste par rapport à l’ensemble des acteurs financiers, ce qui traduit une politique d’investissement très prudente, concentrée sur le long terme et sélective.
Nous n’achetons en pratique que les produits que nous comprenons parfaitement et que nous estimons pouvoir produire des résultats sur longue période sans risque.


Sur le front des acquisitions, de quelle marge de manœuvre financière disposez-vous ? Vers quelles zones géographiques tournez-vous votre regard ?
Notre plan stratégique prévoit un programme d’investissement supérieur à 2 milliards d’euros jusqu’à 2012 et qui devrait être réparti entre trois grandes zones géographiques : le sud de l’Europe (Italie, Espagne, Portugal), l’Europe du centre et de l’est où nous avons déjà des activités notamment d’assurance emprunteur via plusieurs réseaux, l’Amérique latine ; nous avons à ce jour une importante implantation au Brésil (notre part de marché y est supérieur à 5%), et en Argentine.

Des rumeurs circulent de manière insistante autour d’un intérêt d’Axa et de Groupama pour CNP Assurances. Avez-vous fait l’objet d’une approche directe de la part d’un de vos concurrents ? Peut-on considérer que le dossier est sur la table ? Quelle serait la réaction de vos principaux actionnaires si éventuellement l’offre était sur le marché ?
CNP Assurances est détenu par un actionnariat organisé autour d’un pacte qui représente plus de 75% des titres avec quatre principaux actionnaires, Caisse des dépôts, Caisse d’épargne, le groupe La Poste ainsi que l’Etat français.

Les dirigeants ne sont pas approchés en tant que tel, seuls les actionnaires peuvent l’être.
A ce stade, nos grands actionnaires ont très clairement pris position pour indiquer que leur participation au sein de la CNP n’est pas à vendre.

Par ailleurs, je fais observer que les différents groupes qui se sont montrés intéressés pour racheter CNP Assurances publiquement, ont pris la précaution de préciser «si le dossier était ouvert», or le dossier n’est pas ouvert pour le moment.

La CNP est actionnaire de la Société Générale. Quel regard portez-vous sur l'affaire Kerviel ? Quel est le montant de votre investissement dans leur augmentation de capital ?
La Société Générale exerce des métiers délicats qui présentent des risques opérationnels ou des risques de fraude importants.

Toutes les sociétés de la sphère financière, la Société Générale entre autres, travaillent sur une matière sensible, l’argent, qui suscite beaucoup de convoitise. Il faut alors que les acteurs soient très conscients des risques qu’ils doivent contrôler.

Notre participation au sein de la Société Générale date de longtemps. Elle est de l’ordre de 1,1%. Nous avons naturellement, parce que cela nous paraissait être une bonne affaire, suivi l’augmentation de capital de la banque. Nous avons même souscrit davantage que ce à quoi nos droits de souscription nous donnaient accès parce que nous avons entièrement confiance dans le modèle économique de cette institution.

C’est donc un investissement ancien et très profitable pour CNP Assurances.

Malgré la récente poussée spéculative, votre titre accuse un repli de 20% depuis le début de l’année et son prix demeure inférieur à la valeur intrinsèque du groupe. Comment l’expliquez-vous ? De quelle manière voyez-vous évoluer la situation ?
Il y a beaucoup de titres qui ont décroché depuis quelques mois en raison de la crise des subprimes, puis de la crise de liquidités.

Il y a un soupçon général sur la bourse et plus particulièrement sur la sphère financière. Même si les assureurs en général et CNP Assurances en particulier sont peu touchés par les effets de cette crise, cette suspicion pèse sur leur cours.

Ceci est accentué par le fait que notre système comptable, la manière dont nous reportons est quelquefois difficile à comprendre pour ceux qui ne sont pas familiers avec le modèle économique de l’assurance, en particulier en raison de normes comptables compliquées à digérer.

Le marché ne savait donc pas très bien quel était l’impact de cette crise sur nos activités.

Nous avons clarifié les choses s’agissant de la situation de notre bilan, nous avons précisé nos perspectives. Tout cela devrait logiquement amener les marché à se dire que la valeur intrinsèque, valeur minimale de portefeuille actifs et passifs de CNP Assurances, qui se situe à plus de 77 euros par action, devrait constituer un plancher au-delà duquel on devrait ajouter la valeur des affaires futures de l’entreprise. Avec 20% du marché français de l’assurance vie, nous avons encore des perspectives très importantes. 
 
Un dernier mot pour vos actionnaires ?
Nous sommes heureux d’avoir pu leur montrer que nous avons su mériter leur confiance. Nos actionnaires souhaitent avoir de la croissance et de la sécurité. C’est ce que nous leur avons apporté. Notre engagement est de poursuivre dans cette logique pour l’avenir de leur investissement. 

Propos recueillis par Imen Hazgui

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