Interview de Nicolas Dufourcq : Directeur général adjoint en charge des finances au sein du groupe Capgemini

Nicolas Dufourcq

Directeur général adjoint en charge des finances au sein du groupe Capgemini

95% du capital de Capgemini est du flottant, quiconque souhaite faire une offre sur le groupe à un prix significatif pourrait le faire

Publié le 29 Février 2008

Capgemini vient de dévoiler un chiffre d’affaires annuel de 8,703 milliards, en hausse de 13%. Quels ont été les principaux moteurs de votre croissance ?
L’année 2007 est une des plus belles années de croissance du groupe. Nous avons observé cette croissance dans l’ensemble du secteur partout dans le monde.

Certains pays, comme la Scandinavie, ont affiché des résultats exceptionnels (près de 25% de croissance). Par ailleurs, nous avons connu une notable progression aux Etats-Unis (environ 10%) et dans certains pays de l’Union européenne (Espagne, Italie, Portugal). 

Votre activité a progressé aux Etats-Unis durant cette période. Comment expliquez-vous cette résistance ? La possible entrée en récession de l’économie américaine aura-t-elle un impact sur vos résultats 2008 ?
L’outsourcing aux Etats-Unis  représente 40% du chiffre d’affaires. Notre croissance dans ce pays au cours de l’année dernière a été portée aux trois quarts par nos contrats aux entreprises. Ce sont de grands contrats pluriannuels qui affichent près de 20% de hausse des revenus.

Si le retournement du marché est possible, nous n’en ressentons pas les effets pour le moment. Les activités théoriquement les premières touchées se portent bien.

Nous nous préparons cependant à un scénario plus délicat qui se déclencherait probablement au second semestre. Nous sommes prêts à prendre les dispositions nécessaires pour préserver notre taux de marge.

Quelles sont vos prévisions pour l’exercice en cours ?
Nous avons en terme de marge une discipline totale de résultats, 8,5% quelque soit la météo économique. 
S’agissant de la croissance des revenus, nous proposons une fourchette allant de 2 à 5%.

Standard & Poor’s a décidé de relever la note à long terme de Capgemini de la catégorie «spéculative» à celle d’«investissement». Comment interprétez-vous cette décision favorable ?
Cette décision était attendue. Capgemini est une entreprise qui dégage beaucoup de cash depuis longtemps. Nous étions jusqu’à présent maintenus à la catégorie spéculative en raison du passé du groupe quelque peu troublé. En 2002/2003, Capgemini était faiblement profitable, voir négatif et consommait une masse importante de cash.
Il a fallu plusieurs années afin de démontrer que l’entreprise avait changé. En 2008, les quatre années passées ont été payées de retour.

Au niveau capitalistique, de nombreuses rumeurs ont circulé autour d’une OPA sur Capgemini. Les noms de Wipro et Infosys ont notamment circulé.
Quelle crédibilité doit-on accorder à ces spéculations ?

Une crédibilité très faible. Ces rumeurs sont systématiquement démenties par les entreprises en question. Nous informons nous même la presse indienne du caractère mensonger de ces rumeurs car elles ont un impact négatif sur nos clients.
Je ne pense pas du tout qu’une entreprise indienne ait envie d’acheter le groupe à ce stade.

Comment réagira le conseil d'administration de Capgemini face à une offre non sollicitée ?
95% du capital de Capgemini est du flottant. Quiconque souhaite faire une offre sur le groupe à un prix significatif pourrait le faire. Encore faut il pouvoir intégrer l’entreprise proprement et ne pas détruire de la valeur par la suite.

Envisagez-vous de procéder vous-même à des acquisitions ? De quelle marge de manœuvre financière disposez-vous et vers quelles zones géographiques se portent vos regards ?
Nous démarrons l’année avec 900 millions d’euros de cash. Nous ne souhaitons pas faire d’opérations très significatives coûteuses en intégration à l’instar de l’acquisition de Kambay au début de l’année 2007.
Nous ferons donc des opérations plus petites. Nous saisirons les opportunités qui se présenteront en nous efforçant de ne pas nous tromper sur la cible.

L’Allemagne et la  Hollande nous intéressent particulièrement. Par ailleurs, nous souhaitons renforcer notre présence aux Etats-Unis dans le domaine du conseil en stratégie.

Quel regard portez-vous sur les pays émergents ?
Nous sommes assez peu positionnés dans les pays émergents. Si nous avons près de 17 000 salariés en Inde, nous travaillons très peu pour le pays en lui-même.
La Chine constitue pour le moment le seul véritable axe de développement du groupe. La croissance dans ce pays est relativement coûteuse dans la mesure où nous ne sommes pas en équilibre.
 
Sur le plan boursier, le titre Capgemini affiche une décote de 20% depuis le début de l’année et de 40% par rapport à son plus haut de 2007. Comment interprétez-vous ce repli ? Quelles seront les mesures qui permettront de redonner du tonus à votre action ?
Le marché n’aime pas le secteur. Une grande partie des investisseurs sont sortis de la technologie, des services informatiques considérés comme cycliques et dangereux.

Le groupe est beaucoup moins cyclique qu’auparavant. Près de 60% de nos revenus sont récurrents. Notre fonds business est très important. Le Capgemini d’aujourd’hui n’a rien à voir avec le  Capgemini de 2000.

Il nous faut délivrer encore plus de résultats et faire comprendre le fonctionnement de notre entreprise. Les programmes de rachats massifs d’actions ne me semblent pas très efficaces. Ces derniers n’ont pas la vertu de faire monter le cours de bourse.

Le mot de la fin pour vos actionnaires.
Gardez vos titres car ils rapporteront.

Propos recueillis par Imen Hazgui

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