Interview de Frédéric Gauvard : directeur des relations investisseurs d'Arkema

Frédéric Gauvard

directeur des relations investisseurs d'Arkema

Un pétrole à 150/200 dollars le baril nous amènerait à avoir une adaptation plus forte

Publié le 16 Mai 2008

Malgré un environnement peu favorable, Arkema améliore ses résultats (RN courant en hausse de près de 30%, notamment). Quels ont été les moteurs de cette croissance ? Quels mécanismes sont venus compenser la hausse des matières premières ?
Effectivement, nos résultas sont en très forte progression, avec +19% d’Ebitda et un résultat net courant à 67 millions d'euros.

Nous avons dû faire face à  un environnement plus complexe que celui que nous avions prévu. Par contre, nous sommes en ligne avec ce que nous avions annoncé, c’est-à-dire que la transformation en profondeur d’Arkema, (projets de croissance, réduction des frais fixes, gestion du portefeuille…) permet d’améliorer les résultats et devrait  générer sur l’année 80 millions d’euros d’Ebitda.

Et puis en parallèle, face à l’augmentation des prix des matières premières et de l’énergie, nous avons effectué une forte augmentation de nos prix de vente de 6%. Globalement, nous pouvons dire que la hausse des prix a compensé la hausse des matières premières et de l’énergie.

Au regard de la concurrence, cette hausse de 6% est-elle supérieure ou inférieure à vos concurrents ?
C’est un peu difficile de se comparer à la concurrence parce que chaque chimiste à des lignes de produits spécifiques.

Nous pouvons toutefois dire que nous sommes dans le haut de la fourchette sachant que tous  n’ont pas réussi, à compenser intégralement la hausse des matières premières et de l’énergie.

Il faut cependant faire attention à ne pas séparer la hausse des matières premières des évolutions des autres facteurs de l’environnement économique . La hausse des matières premières est un aspect, mais il y aussi l’impact de l’euro/dollar et le ralentissement de la croissance aux Etats-Unis. Tout cela crée un environnement qui est plus complexe que l’année dernière.

La hausse des prix compense-t-elle l’augmentation des prix des matières premières et celle de l’euro/dollar ?
Les augmentations de prix ne servent pas à compenser la faiblesse du dollar. Sur l’euro/dollar, nous avons indiqué que l’impact de la conversion était négatif, de l’ordre de 10 millions d’euros.

Par contre, la hausse de nos prix  de vente de 6% compense globalement l’augmentation des coûts des matières premières et de l’énergie.

Quels sont vos mécanismes de protection contre l’effet de change ?
Nous ne nous couvrons pas contre l’effet de change. La seule couverture que nous avons consiste à continuer a nous développer dans des zones dollar.

Allez-vous procéder à une nouvelle augmentation de vos prix ?
Il est vrai que l’accélération de la hausse des matières premières –qui elle n’est pas nouvelle puisqu’elle a commencé il y a deux ans- nous amène à avoir des discussions de hausses de prix avec nos clients plus souvent.

C’est quelque chose qui est maintenant intégré par l’ensemble de nos Business Unit.
Ces hausses sont plus réactives que par le passé.

Comment se passe votre plan de restructuration 2006-2010 ?
Il est en ligne avec notre objectif de réduction de nos frais fixes de 500 millions d’euros. Nous les avons réduit de 230 millions à fin 2007. Nous attendons une baisse d’une centaine de millions de plus cette année.

De nouvelles acquisitions sont elles au goût du jour ? Quelles activités ont vos préférences ?
Nous avons dit qu’une partie l’amélioration de la marge de l’Ebitda à horizon 2010 proviendrait de la gestion de portefeuille.

Nous avons réalisé toutes nos cessions –il était important pour nous de commencer par céder les activités non stratégiques.

Nous avons réalisé nos premières acquisitions, dont la société Coatex, et nous regardons d’autres cibles, toujours dans les mêmes domaines. Nous sommes plutôt sur des métiers en aval à forte valeur ajoutée et qui s’intègrent parfaitement dans notre portefeuille.

Notre but, n’est pas de rajouter des lignes de produits qui n’ont pas de cohérence avec notre portefeuille

Nous avons les moyens pour financer nos acquisitions. Nous disposons d’une ligne de crédit syndiquée à hauteur de 1,1 milliard d’euros et aujourd’hui, notre dette est de 579 millions d’euros.

Nous avons comme objectif d’acheter entre 400 et 500 millions d'euros de chiffre d’affaires dans les trois prochaines années.

Avez-vous des zones géographiques qui vous intéressent plus que d’autres ?
Nous regardons plus la partie activité que la partie zone géographique, mais évidemment si vous avez une société avec une activité aval et qui a une bonne implantation en Asie, c’est un plus évident.

Pour votre objectif de marge d’Ebitda en 2008 sur quelles hypothèses de valeur du dollar et sur quelles hypothèses de valeur matières premières vous êtes-vous basés ?
Comme tous les éléments de l’environnement sont imbriqués et complexes, nous n’avons pas de modèle simple de sensibilité..

Le plus important pour nous c’est  que dans un environnement plus compliqué que celui que nous avions prévu, nous maintenons aujourd’hui notre objectif de 10% de marge d’Ebitda pour l’année 2008.

Cet objectif est conforté par nos excellents résultats du premier trimestre supérieurs à ceux attendus par le marché.

Nous sommes prêts à nous adapter et à réagir si jamais l’environnement devait se durcir.

Un pétrole à 150-200 dollars le baril d’ici 6 mois à 2 ans comme le laisse entendre Goldman Sachs remettrait-il en cause vos objectifs à court/moyen terme ?
Cela nous amènerait à avoir une adaptation plus forte, comme par exemple développer plus vite une base de production en dollar, réaligner un certain nombre de portefeuilles d’activités, ou réduire plus fortement les frais fixes, etc.

En fonction de chaque ligne de métier, la réponse peut être différente, mais nous restons confiants sur notre capacité à nous adapter en permanence.

Propos recueillis par Marjorie Encelot