Interview de Marc Vergnet : et Hervé Peyronnet, PDG et directeur financier de Vergnet

Marc Vergnet

et Hervé Peyronnet, PDG et directeur financier de Vergnet

Nous avons plein de projets dans les tuyaux

Publié le 17 Octobre 2008

Au titre de votre premier semestre 2008, votre chiffre d’affaires recule de 38%, le résultat d’exploitation passe de -0,6 million d’euros à -3,3 millions d’euros et votre résultat net passe de -0,4 million à -2 millions d’euros… Peut-on revenir sur les raisons de ces baisses ?
H.P. : Sur l’Eolien, le premier semestre a été un semestre de transition entre les deux gammes de machines -celle de moyenne puissance de 275 KW et le lancement de celle de 1MW-, ce qui explique une activité en recul par rapport au premier semestre 2007.

M.V. : Nous avions bien conscience que l’effet de gamme allait geler le premier semestre. Nous avions dit que le chiffre d’affaires 2008 serait essentiellement porté par la machine de 1MW, pour laquelle nous avons eu un petit retard dans le développement. Nous avions annoncé ce retard et nous avons tenu le nouveau délai puisque la machine a tourné, comme indiqué ultérieurement, au 1er août et dans de bonnes conditions.

Peut-on faire un point sur l’activité Eau ?
H.P. : Nous avons un petit recul du chiffre d’affaires sur le premier semestre. Mais ce qu’il faut voir, c’est que le semestre précédent a été particulièrement fort vu que nous avons eu une croissance de 30%. Ensuite, sur l’année, le CA n’avait augmenté «que de» 15%.

Vous vous attendiez à un recul de l’activité Eau ?
H.P. :
Il y a eu quelques décalages dans le démarrage de projets, mais cela ne remet absolument pas en cause le développement et la croissance de l’année.

M.V. : Le terme de recul me paraît un peu fort. Il y a eu un glissement de la passation de certains contrats qui ont été passés après et les objectifs qui ont été fixés dans l’Eau seront tenus.

Et dans l’activité Solaire Photovoltaïque, activité naissante, les choses vont plus vite et mieux que nous l’imaginions.

Vergnet vient de signer avec la compagnie nationale éthiopienne d'électricité EEPCo un contrat de 220 millions d’euros portant sur la vente et l'installation de 120 éoliennes GEV HP de 1 MW sur trois ans. Qu’attendez-vous de ce contrat ?
M.V. : C’est d’abord un contrat immensément gratifiant. C’est 15 ans de combat sur le plan technologique. Il faut prendre conscience que cette machine de 1MW n’est pas une machine conventionnelle, c’est vraiment une machine différente, et c’est pour cela que nous avons gagné contre les Chinois et contre les Espagnols. 

Avec ce projet, nous allons alimenter 5 millions d’Ethiopiens en électricité, et cela vaut presque autant que le chiffre d’affaires et le bénéfice.

Notre technologie est parfaitement adaptée, en particulier en termes de maintenance, de raccordements à des réseaux dits «faibles» parce que très fluctuants.

Il y a 15 ans, nous avons fait le pari de la technologie Farwind, faite pour surmonter les obstacles et les spécificités contraignantes de certaines zones (vents moyens à fort, cyclones, chaleurs extrêmes, zones insulaires, semi désertiques, montagneuses, manque important d'infrastructures…).

Ce marché n’est pas un marché de niche, il représente le quart de l’humanité. Ce quart de l’humanité produit actuellement son électricité avec du pétrole et, à cause du pétrole très cher, se retrouve dans des situations difficiles. L’éolien est plus de deux fois moins cher que le pétrole, voire trois fois moins cher dans certains pays.

Ce marché nous offre une visibilité qui va nous permettre, sereinement, une montée en puissance. Nous avons plein de projets dans les tuyaux, qui ne sont pas acquis, mais qui montrent bien que ça se bouscule pour nous.

Peut-on en savoir un peu plus de ce qu’il y a dans les tuyaux ?
M.V. : Pour les choses officielles, nous rendons, le 22 octobre, notre candidature pour le Cap Vert, 28 MW. Avant la fin du mois, nous rendons aussi Tindouf en Algérie. Et au tout début novembre, nous rendons un projet au Nigeria. C’est un petit projet de moins de 10MW dans la province du Nord. 

Qu’en est-il des appels d’offres à Djibouti et du Maroc ?
M.V. : Djibouti a été relancé, nous avons de nouveau soumissionné et c’est toujours en discussion avec la Banque Mondiale. Aux dernières nouvelles, ce projet serait intégré dans un programme plus important de 40MW.

Quant à Tan-Tan au Maroc, projet auquel nous avions soumissionné avec Veolia, n’a pas été relancé pour des raisons techniques liées au dessalement, mais il est toujours dans le tuyau.

En outre, au Yemen, il y a un gros appel d’offres qui va sortir au début d’année prochaine. De même, il y a un appel d’offres qui va sortir au Kenya avant la fin de l’année ou au début d’année prochaine.

Dans le cadre du contrat en Ethiopie, Vergnet a choisi de s'entourer de deux partenaires de référence, dont Areva qui fournira les équipements haute tension. Comment se sont déroulées les discussions avec Areva ? D’autres projets sont-ils à l’étude avec le groupe d’Anne Lauvergeon ?
M.V. : Areva, c’est quand même un gros balaise. C’est un sous-traitant qui a été un plus dans notre soumission. Quand on soumissionne avec un groupe tel que celui-là, on est crédibles en termes d’élévation de tension. En outre, Areva est une référence en Ethiopie.

Chaque fois que nous ferons de la haute tension, nous nous adresserons à Areva s’ils sont raisonnables sur les prix.

Vergnet a décidé de modifier son programme de production prévu pour le quatrième trimestre 2008. En accord avec le client concerné, la production de dix GEV HP qui lui étaient destinées en fin d’année sera affectée en priorité au contrat éthiopien afin de pouvoir augmenter la cadence d’expédition dès le début 2009, date de commencement des travaux. Ces livraisons seront reportées au second semestre 2009. Cette décision impactera donc les objectifs 2008 que le groupe révise entre 28 et 30 millions d’euros pour le chiffre d’affaires (contre 40 à 42 millions prévus) et entre -6 et -5 millions d’euros pour le résultat d’exploitation (contre -4,5 à -3,5 millions d’euros prévus). Comment avez-vous convaincu votre client de patienter encore un peu plus ? Existe-t-il un risque que votre client vous réclame des indemnités de retard ?
M.V. : Avant de prendre cette décision, nous avons eu un échange et notre client nous a assuré que si nous livrions bien l’année prochaine, il n’y aurait pas de pénalités. Les options sont toujours en cours, il n’y a pas eu de remboursement.

En cette période de crise financière et de craintes de récession mondiale, comment Vergnet est impacté ?
M.V. : Je suis forcément partial mais, selon moi, l’énergie c’est un besoin préalable au développement. Dans tous les pays où nous allons, l’énergie est insupportablement coûteuse.

Les grands prêteurs du développement, les financements multilatéraux, les mécanismes de crédit carbone ne lésineront pas sur l’eau et sur l’énergie.

Propos recueillis par Marjorie Encelot