Interview de Marc Vergnet : PDG de Vergnet

Marc Vergnet

PDG de Vergnet

«Nous n’avons pas besoin d’être rachetés, les projets engagés nous permettent d’avoir une bonne visibilité en termes de trésorerie et d’activité (Vergnet)»

Publié le 20 Octobre 2009

Vous venez de publier un chiffre d’affaires en progression de 15% par rapport à 2008, en revanche le résultat d’exploitation est encore en recul. Quel commentaire vous inspire ces résultats ? Quels ont été les moteurs de croissance ?
Les chiffres de ce 1er semestre ne sont pas une surprise. Comme prévu, ils sont largement marqués par le passage de la phase de développement à la phase d’industrialisation de notre nouvelle éolienne de 1 MW. Cette phase d’industrialisation, qui a débuté fin 2008, a eu deux impacts comptables sur  le 1er semestre : d’une part nous avons dû supporter l’amortissement des coûts de R&D (liés à la phase de développement), et d’autre part, les dépenses d’industrialisation ne peuvent pas être capitalisées ; elles sont donc comptabilisées en charges. Au total, ces deux impacts comptables représentent 2,6 millions d’euros qui sont venus grevés les résultats du premier semestre.

C’est en quelque sorte un passage obligé en vue de la réalisation du contrat que nous avons signé avec la compagnie d’électricité d’Ethiopie. Je vous rappelle qu’il s’agit d’un contrat majeur qui porte sur la livraison de 120  éoliennes GEV HP en 36 mois. Et ce contrat est entré dans sa phase opérationnelle depuis le 12 octobre. La contrepartie, c’est que nous n’avons aucune vente de GEV HP au 1er semestre. L’essentiel de l’activité est donc essentiellement liée à la vente d’éoliennes de moyenne puissance (GEV MP de 275 KW).

Pouvez-vous nous fournir quelques détails par pôle d’activité ?
Dans l’activité Eau-Solaire, ça se passe toujours bien, nous avons eu un CA sensiblement plus élevé que l’an dernier et même supérieur à celui du pôle Eolien, à 4,8 millions d’euros contre 3,6 millions en 2008.

On constate toujours sur ce pôle une saine croissance et une bonne rentabilité, avec un département Solaire qui se développe très rapidement et qui devrait commencer à contribuer au résultat du pôle Eau-Solaire. Cette activité a démarré il y a moins de deux ans via un partenariat avec BP Solar qui ne souhaitait plus intervenir directement en Afrique. Nous avons donc repris leurs intérêts en Afrique, ce qui nous a permis d’aller vite, et puis nous avons profité de la très bonne image de marque de Vergnet dans le domaine de l’alimentation en eau potable.

Par ailleurs, l’électrification rurale est encore très faible en Afrique. Or des sommes très importantes sont consenties par des bailleurs de fonds et nous disposons non seulement de la crédibilité, mais également de produits intelligents. Autrement dit, nous sommes capables de proposer une gestion intelligente de l’électricité d’origine solaire…

Et le marché Asiatique…
Nous avons de grands espoirs. Nous préparons d’ailleurs avec Vergnet Hydro, une forte prise de position dans cette zone grâce à la mise au point et la fabrication au Sri Lanka d’une nouvelle hydro pompe à un prix très compétitif.

Concernant le pôle Eolien plus spécifiquement, vous avez reçu un acompte de 30 millions d'euros en Ethiopie, pourriez-vous nous détailler ce contrat et plus généralement, revenir sur ce pôle ?
Vergnet est le seul industriel français de l’éolien, nous avons de ce fait connu des débuts difficiles. D’autant plus que j’ai démarré cette activité il y a 20 ans, à l’époque où le nucléaire était omniprésent et exclusif…

Aujourd’hui nous détenons un vrai carnet de commandes qui conforte le succès de nos choix. Pour preuve effectivement, ce contrat en Ethiopie qui doit s’étendre jusqu’en 2012, ou encore celui signé avec le Nigeria en septembre dernier et qui n’attend plus que le paiement de l’acompte pour être lancé.

Par ailleurs, nous constatons que de nouveaux marchés s’ouvrent à nous, comme au Japon, à Taïwan qui est aussi très cyclonique, en Nouvelle Zélande etc., et puis, en dehors de ces marchés export, ce qui m’intéresse de plus en plus, c’est l’Europe, avec l’émergence de ce que nous appelons le Proxwind, c’est-à-dire un marché de proximité, qui consiste à fournir une énergie décentralisée, comme le fait de planter une éolienne dans un champ agricole et qui donne à l’agriculteur de nouvelles ressources pérennes pouvant stabiliser son activité.

La naissance de ce marché éolien de moyenne puissance en Europe est visible dans des pays tels que l'Ecosse et l’Angleterre, qui viennent s'ajouter à l'Italie et à la Lituanie où nous avons déjà pris positions.

Au total, tous ces éléments font que nous avons enfin une vraie visibilité sur notre carnet de commandes, qui nous permet d’asseoir les chiffres de 2010 ainsi que ceux de 2011…

La Commission Européenne a recommandé d’investir 50 milliards d’euros au cours des 10 ans à venir dans les technologies à faible émission de carbone. Les initiatives se multiplient dans le monde, ne craignez-vous pas d’être confronté à une rude concurrence ?
Il y a effectivement un faisceau de volontés internationales visant à favoriser le développement des énergies renouvelables et celui des infrastructures dans les pays africains notamment. C’est le cas en particulier du projet «Initiative Afrique» porté par le Ministre de l’Ecologie, de l'Energie et du Développement durable, Jean-Louis Borloo.

De fait, il y aura en effet les grands de l’éolien en face de nous, mais là où ils iront, nous n’irons pas, et là où nous déciderons d’aller, ils n’iront pas : par exemple, si on veut faire de l’éolien au Maroc sur des sites accessibles, nous n’avons clairement aucune chance. En revanche, nous avons des sites Farwind en Tunisie, pas cycloniques mais très difficiles d’accès, où les autres fabricants ne pourront pas aller… 

Quelles sont vos guidances pour 2009 ? Avez-vous des objectifs chiffrés pour 2010 ?
Concernant la fin 2009, avec le retard de 3 mois pris dans le lancement du contrat éthiopien initialement prévu au 3e trimestre, et conformément aux normes comptables, nous considérons que sa mise en œuvre ne sera pas suffisamment avancée pour que nous puissions commencer à reconnaître de la marge sur la période, De ce fait, l’exercice 2009 sera encore pénalisé en termes de résultats, avec un résultat d’exploitation qui devrait se situer entre -8,5 et -9,5 millions d’euros. Cela étant, l’exercice 2009 se terminera sur une forte croissance de l’activité à hauteur de 29-30 millions d’euros,

Avez-vous eu des propositions de rachat de grands groupes ou de concurrents ?
Pas encore, mais maintenant que nous renouons avec la croissance, nous verrons bien. Ce que l’on peut dire c’est que nous n’avons pas besoin d’être racheté, les projets engagés nous permettent d’avoir une bonne visibilité en termes de trésorerie et d’activité.

Propos recueillis par Nicolas Sandanassamy

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