Interview de Pierre Schang :  Gérant en charge du fonds Tocqueville PME et de fonds dédiés au sein de la franchise

Pierre Schang

Gérant en charge du fonds Tocqueville PME et de fonds dédiés au sein de la franchise "petites et moyennes capitalisations" de Tocqueville Finance.

Vers un rattrapage des petites et moyennes valeurs européennes en 2020?

Publié le 20 Décembre 2019

Quel regard peut-on porter sur l’évolution des small caps françaises depuis le début de l’année ?
En 2019, le Cac small dividendes nets réinvestis enregistre une performance de +15% contre +30% pour le Cac 40 dividendes nets réinvestis. Pour comprendre cette sous-performance il faut remonter à mai 2018, mois à partir duquel les fonds actions européens ont commencé à décollecter. Or, dans les phases de décollecte, les small caps ont tendance à sous-performer en raison de leur moindre liquidité. Cette décollecte trouve une partie de son explication dans la crainte d’un ralentissement macro-économique et la résurgence du risque politique. Depuis mai 2018, les flux sortants sur les fonds PEA PME se situent entre 900 millions et 1 milliard d’euros sur une enveloppe qui pesait 5 milliards d’euros. Cependant, après 18 mois consécutifs de décollecte, une collecte positive a été observée en octobre dernier.

En quoi consiste la composition actuelle de votre fonds ?

Le fonds compte 67 lignes actuellement. La colonne vertébrale du portefeuille, environ 50% du fonds, est positionnée sur des sociétés, souvent disruptives, en capacité de devenir des « leader » de demain et à même de croître de manière régulière et significative dans la durée. Environ 30% des encours est exposé à des titres opportunistes susceptibles de fonctionner en bourse pendant un laps de temps donné mais pas forcément sur le long terme, comme Instone Real Estate en Allemagne par exemple. Enfin, 20% du portefeuille est constitué de valeurs tactiques pour profiter de phénomènes de marché (comme des fortes chutes temporaires par exemple).

Pouvez-vous nous donner des exemples de mouvements opérés depuis le début de l’année ?
Depuis le début de l’année, nous avons été conduits à alléger/vendre Robertet ou Generix dont les cours de bourse ont significativement progressé depuis le début de l’année. Dans le même temps, nous avons renforcé des valeurs qui n’ont pas performé autant que l’on espérait comme Claranova ou SES Imagotag et des thématiques qui nous paraissent être prometteuses pour l’avenir comme l’économie verte par exemple avec récemment l’annonce d’un plan de relance « vert » en Allemagne. Dans cette logique nous avons acheté des valeurs comme 2G Energy ou Aves One.


Dans ces conditions, avez-vous été amenés à ajuster certains points de votre process d’investissement ?

Nous avons toujours été très réactifs. Cela étant, nous investissons majoritairement sur des sociétés peu dépendantes de l’environnement macroéconomique et qui ont un management d’exception. La première ligne qui représente 4,5% des encours du portefeuille est Solutions 30. La société est impliquée dans le déploiement de la fibre en Europe, l’installation des compteurs intelligents de gaz et d’électricité dans les foyers et la mise en place de prises dans les parkings pour les véhicules électriques. Ces mégatrends immunes au cycle ne sont pas de nature à s’arrêter subitement. Nous avons un focus permanent sur la liquidité. Nous veillons à maintenir une discipline nous permettant de liquider 60% du portefeuille en cinq jours. Même si la décollecte s’est estompée, nous ne relâchons pas notre attention sur ce sujet.

Attardons-nous maintenant sur 2020. Pensez-vous que la décollecte devrait perdurer ?

Nous sommes prudents pour 2020. Notre scénario central table sur une phase de prise de profits sur les marchés dans le courant du premier trimestre 2020 puis des marchés s’inscrivant dans un large canal latéral. Nous privilégions un portefeuille équilibré entre valeurs défensives à croissance visible et dossiers cycliques. Les valeurs moyennes pourraient arrêter de sous performer les grandes valeurs grâce à l’affaiblissement du mouvement de décollecte. 2020 sera également une année au cours de laquelle nous gagnerons sans doute en visibilité sur le potentiel de collecte des nouveaux Plan Epargne Retraite (PER) pour lesquels un avantage fiscal est octroyé si 10% de la collecte est investi sur des fonds éligibles au PEA PME. Pour l’instant, notre prévision sur ce sujet table sur une collecte annuelle comprise entre 500 millions et 1 milliard d’euros pendant 10 ans à partir de 2021 pour les fonds PEA PME. L’impact de cette collecte sur les petites valeurs françaises pourrait être substantielle compte tenu de l’étroitesse du segment. L’encours total des fonds PEA PME avoisine effectivement les 4 milliards d’euros actuellement !




Imen Hazgui