Interview de Frank Maccary : Directeur relations investisseurs, Alcatel-Lucent

Frank Maccary

Directeur relations investisseurs, Alcatel-Lucent

Les choix stratégiques pris il y a deux ans sont aujourd'hui validés par les clients

Publié le 14 Décembre 2010

L’activité d’Alcatel-Lucent semble être repartie, le chiffre d’affaires du troisième trimestre est en hausse, et vos prévisions sont optimistes, comment expliquez-vous cela ?
Alcatel-Lucent a fait des choix stratégiques il y a deux ans, et a accéléré ses programmes de R&D autour du très haut débit, sans fil et filaire, du «tout IP» et des applications logicielles. Ces choix sont validés par les clients aujourd’hui pour créer des solutions globales de bout en bout. Les opérateurs ont besoin de revoir l’architecture de leurs réseaux pour répondre à l’explosion du trafic de données, notamment sur mobile. Ces mêmes opérateurs sont demandeurs d’infrastructures harmonisées «tout IP». Il s’agit d’économiser sur le coût opérationnel de la gestion du réseau qui ressemble aujourd’hui à un patchwork de technologies. Je rappelle que les opérateurs ont investi ces dernières années sur des nouvelles technologies pour la mise en place des réseaux mobiles ou de l’accès internet qui ont été additionnées les unes aux autres. Alcatel-Lucent a investi plus tardivement le segment IP que certains acteurs historiques mais se positionne aujourd’hui parmi les premiers mondiaux. Ainsi, sur l’IP de périphérie de réseau, segment qui est en forte croissance aujourd’hui, nous avons 20% de part de marché dans le monde.

Autre relais de croissance, le haut débit mobile de 4è génération où Alcatel-Lucent est bien positionné aujourd’hui. Deux des plus gros opérateurs du monde ont choisi Alcatel-Lucent pour déployer leur réseau 4G (LTE), les américains Verizon et AT&T. Sprint a également annoncé avoir choisi Alcatel-Lucent pour son programme de refonte de réseau innovant à très haut débit. Et Alcatel-Lucent est engagé dans de nombreuses expérimentations en LTE et notamment avec SFR, Bouygues Télécom et France Télécom. Enfin, les

Le gros relais de croissance pour nous, c’est l’augmentation du trafic de données quelque soit la zone géographique

opérateurs continuent d’investir dans le très haut débit fixe dans le VDSL, l’optique.

Qu’est ce qui a changé dans l’organisation d’Alcatel-Lucent ?
L’arrivée de Philippe Camus à la présidence, et de Ben Verwaayen à la direction générale a été le point de départ d’un programme de transformation de notre entreprise sur trois ans. Il s’agit d’harmoniser les processus et les plateformes informatiques, rationaliser notre portefeuille produit et redéfinir notre stratégie. Le comité de direction a également beaucoup changé. Nous avons travaillé à casser les silos entre lignes de produits, entre départements, nous avons créé des synergies entre les différentes technologies pour apporter aux clients des solutions globales. Nous avons ainsi encouragé l’équipe R&D optique à parler davantage avec l’équipe R&D IP, et ainsi de suite. Nous avons anticipé les besoins des opérateurs de remodeler l’architecture de leur réseau et nous nous sommes organisés pour répondre au mieux à leurs besoins.

L’international constitue également un relais de croissance pour Alcatel-Lucent...
Le gros relais de croissance pour nous, c’est l’augmentation du trafic de données quelque soit la zone géographique. Aujourd’hui, pour pouvoir profiter de la 3D, de la haute définition ou du cloud computing, il faut déployer des infrastructures avec des capacités importantes. Ce sont ces besoins en haut

Il ne suffit pas d’afficher les prix les plus bas sur les appels d’offres, il faut être être capable d’apporter des solutions de bout en bout

débit et large capacité, qui vont porter notre activité et plus globalement dynamiser l’investissement. Et cela est vrai partout dans le monde.

Comment est-ce qu’Alcatel-Lucent tire profit de la croissance chinoise malgré l’émergence d’acteurs conséquents comme Huawei ?

Nous sommes installés en Chine depuis le début des années 1980 via la joint-venture Alcatel-Lucent Shanghai Bell (ASB) dont nous détenons 50% plus une action du capital. Nous avons une légitimité historique par rapport à nos concurrents, sur ce marché. D’autant que nous sommes présents sur tous les segments du réseau, contrairement à de nombreux autres acteurs historiques européens. Face aux acteurs locaux, il faut sortir des idées reçues, nous ne sommes pas les moins bien positionnés. Avec notre joint-venture, Alcatel-Lucent a des usines en Chine et les ouvriers sont chinois, c’est essentiel en terme de structures de coûts. J’ajoute que nous avons un savoir-faire dans les problématiques d’harmonisation des différentes technologies. Cela ne suffit pas d’afficher les prix les plus bas sur les appels d’offres. Il faut être pertinent pour nos clients et être capable d’apporter des solutions de bout en bout répondant à leur problématique concrète de modèle économique. Cela peut paraître marketing, mais c’est très concret pour les opérateurs.

Propos recueillis par Nabil Bourassi