Interview de Marie-Jeanne Missoffe : Responsable de la gestion Actions Croissance chez Mandarine Gestion

Marie-Jeanne Missoffe

Responsable de la gestion Actions Croissance chez Mandarine Gestion

Nous n'avons pas de scénario catastrophe sur la Chine

Publié le 02 Septembre 2015

Quel bilan faites-vous des résultats semestriels publiés par les entreprises du CAC 40 ?
Les résultats des entreprises françaises au premier semestre sont en ligne avec la forte croissance des bénéfices observée dans la zone euro. Parmi les bonnes surprises on peut citer le secteur bancaire dont les revenus et les marges sont en hausse. L’aéronautique (Airbus, Safran) est toujours en forte croissance et bénéficie de la baisse de l’euro. Les télécoms montrent des signes de convalescence, notamment Orange. Enfin les valeurs technologiques (Cap Gemini) bénéficient d’une demande soutenue en France et à l’international.

Y-a-t-il eu des déceptions ?
Les valeurs de consommation l’Oréal et Pernod Ricard ont publié des croissances organiques décevantes liées au ralentissement dans les pays émergents. Dans le luxe (LVMH) a un peu déçu avec une pression sur les marges. Dans le tourisme, Accor a révisé à la baisse ses objectifs avec notamment un investissement dans le digital plus important qu’anticipé. Le secteur des matières premières et du pétrole fortement pénalisés par l’environnement actuel, avaient déjà réduit leurs prévisions et ont des publications un peu meilleures qu’anticipé. Enfin les médias (Publicis, TF1) sont confrontés à une reprise plus lente que prévu des dépenses publicitaires mais améliorent leur rentabilité.

Quelle stratégie adoptez-vous pour le second semestre ?
Nous restons prudents sur les biens de consommation compte tenu du ralentissement de la croissance dans les pays émergents, notamment en Chine. Au premier semestre les groupes français ont bénéficié d’un effet de change favorable lié à la baisse de l’euro face au dollar mais celui-ci risque d’être contrebalancé au second semestre par le recul des devises émergentes. Certains groupes comme Pernod Ricard et l’Oréal font par ailleurs face à une concurrence de plus en plus forte des marques locales. Nous ne sommes pas exposés au secteur des matières premières. En revanche nous avons renforcé notre sensibilité à la croissance européenne, au travers de valeurs comme Orpea (maisons de retraite) ou Teleperformance (centres d’appel). Nous restons optimistes pour les entreprises françaises qui devraient enregistrer une hausse de 17% de leurs bénéfices sur l’ensemble de l’année.

Le ralentissement chinois ne remet-il pas en cause ces prévisions ?
Nous n’avons pas de scénario « catastrophe » sur la Chine. Certaines entreprises ont une très bonne visibilité sur leurs carnets de commande, comme Airbus ou Veolia dont la croissance est tirée par des besoins structurels. Nous restons également confiants pour les équipementiers automobiles (Faurecia, Plastic Omnium) car ils continuent de gagner des parts de marché en Chine et bénéficient de la forte reprise du marché européen. En revanche nous ne sommes pas exposés au sociétés d’équipement ( comme Schneider Electric), directement impactées par le ralentissement de l’activité manufacturière.

Malgré leurs bons résultats les entreprises françaises rechignent toujours à investir. Comment expliquez-vous cette frilosité ?
En tant que gérante de fonds investis dans des valeurs de croissance, je préférerais voir les entreprises investir dans leur outil de production plutôt que de distribuer des dividendes. L’investissement est un moteur essentiel de la croissance et un signe de confiance. Cela dit, certaines entreprises font de la croissance externe, ce qui est une forme d’investissement. Parmi les valeurs
que nous apprécions, Ingenico, Teleperformance ou encore Orpea ont réalisé des acquisitions stratégiques l’année dernière. Ces acquisitions leur ont fait gagner des parts de marché à l’étranger et ont créé de la valeur pour les actionnaires. Dans un contexte de redressement des bénéfices (et du cash flow généré) et de capacité d’endettement à des taux historiquement bas nous continuerons de porter une attention particulière au thème des fusions-acquisitions au cours des prochains mois.

Propos recueillis par François Schott