Interview de Nicolas Chéron : Stratégiste, CMC Markets France

Nicolas Chéron

Stratégiste, CMC Markets France

Nous pourrions avoir une correction de 5 à 10% dans les prochaines semaines sur le CAC 40

Publié le 03 Août 2016

Quelle est votre analyse de l'évolution des marchés depuis le referendum britannique en faveur du "Brexit" ?
Le choc du Brexit a été vite digéré et a laissé place à un rallye boursier au mois de juillet. Cette hausse est liée à l'espoir de nouveaux stimuli monétaires dans les semaines et les mois qui viennent. La Banque d'Angleterre pourrait être la première à sortir du bois le 4 août prochain mais la BCE pourrait également annoncer des mesures en septembre, comme une prolongation de son programme de rachat d'actifs ou une nouvelle baisse des taux.
La volatilité est également retombée en juillet à son plus bas niveau depuis deux ans. Mais ce rallye estival, soutenu par de faibles volumes et par un optimisme exacerbé dans l'action des banques centrales, pourrait toucher à sa fin. La correction a déjà débuté avec le secteur bancaire, dont les résultats des stress tests n'ont pas rassuré les investisseurs. Il suffirait d'un élément exogène, comme de mauvais indicateurs chinois ou américains, pour provoquer une nouvelle glissade généralisée des marchés européens.

Un rebond du CAC 40 est-il possible d'ici la fin de l'année  ?
Techniquement parlant les indices européens évoluent depuis le début de l'année dans un "wave market", une bande d'oscillation horizontale. Sur le CAC 40 c'est la zone 3900 - 4600 points. Le Brexit a permis de tester favorablement la borne basse, les marchés ayant rebondi grâce aux espoirs d'intervention des banques centrales. Mais si l'on trace une ligne sur tous les sommets atteints depuis un an, on voit que la tendance est clairement baissière (-13% pour le CAC 40 depuis août 2015). Suivant cette tendance de long terme il est plus probable que le CAC 40 enfonce son plancher de 3900 points d'ici la fin de l'année, ou au début de 2017, que d'assister à un franchissement du seuil de 4600 points. La baisse du baril de pétrole sous les 40 dollars est un autre signal défavorable pour les marchés.

Comment expliquez-vous la progression des actions américaines à de nouveaux plus hauts historiques ?
La progression des indices américains est soutenue par trois facteurs. D'une part les résultats semestriels du S&P 500 sont un peu moins mauvais que prévu, même s'il s'agit du 7e trimestre consécutif de baisse des chiffres d'affaires et des bénéfices. Ces résultats ne sont pas de nature à remettre en cause la politique monétaire très accommodante de la Fed, qui constitue un second facteur de soutien. Enfin les investisseurs privilégient les actions américaines un peu par défaut, étant donné le manque de confiance dans les autres marchés : le Japon où la croissance piétine, la Chine où la volatilité est trop forte et l'Europe en raison du risque politique et bancaire.

En un mot, vous n'êtes pas très optimiste…
Compte tenu des risques pesant sur les marchés (banques italiennes, Brexit, croissance chinoise etc.) il convient d'être prudent. Après le rallye du mois de juillet nous pourrions avoir une correction de 5 à 10% dans les prochaines semaines. Mais le soutien inconditionnel des banques centrales restera un facteur déterminant à moyen terme.

Propos recueillis par François Schott