Interview de Jean-Philippe Milon : Interview de Jean-Philippe Milon, directeur général de Quantum Genomic

Jean-Philippe Milon

Interview de Jean-Philippe Milon, directeur général de Quantum Genomic

Notre spécialité : un produit destiné à sauver des vies.

Publié le 22 Octobre 2020

Votre société Quantum Genomics est une « biotech » fondée en 2005. Pouvez-vous nous la présenter en quelques mots ?

Quantum Genomics est une société biopharmaceutique introduite en bourse en 2014. Elle est spécialisée dans le développement d’un produit destiné à sauver des vies : une nouvelle classe de médicaments cardiovasculaires fondée sur le mécanisme d’inhibition de l'aminopeptidase A cérébrale, conçue pour soigner à la fois l’hypertension artérielle compliquée voire résistante et l’insuffisance cardiaque. Quantum Genomics se positionne comme le premier et le seul acteur du secteur capable de traiter ces deux facteurs. Notre produit, le firibastat, est le résultat de la recherche française de l’université Paris-Descartes et du laboratoire INSERM/CNRS. Selon le modèle biotech, notre société se concentre sur le développement pré-clinique et clinique et n’est pas organisée pour la vente du produit. Celui-ci fait donc l’objet, dans la perspective de sa mise en exploitation, de la signature de partenariats.

À quel stade de développement se trouve actuellement votre produit, le firibastat ?

Le firibastat poursuit son parcours d’essais cliniques dans les deux indications déjà mentionnées : la première correspondant à l’hypertension artérielle compliquée voire résistante, et la seconde à l’insuffisance cardiaque. Dans la première indication, l’étude FRESH engagée en juillet 2020 est une étude de phase III. Il s’agit donc de la dernière étape avant que le dossier puisse être instruit par les autorités compétentes, afin d’aboutir à l’autorisation de mise sur le marché. Du côté de la seconde indication, celle de l’insuffisance cardiaque, nous sommes actuellement en phase II B.

Sur son segment de marché, Quantum Genomics fait-il face à des concurrents ?

Un seul autre laboratoire travaille sur cette indication avec une autre molécule. Le firibastat incarne lui une philosophie différente : celle de l’inhibition d’un enzyme au niveau cérébral. Ce qui en fait le seul représentant de cette nouvelle famille thérapeutique, de fait sans concurrent direct. Pour résumer, nous sommes les seuls à chercher à agir au niveau du cerveau pour réguler l’hypertension artérielle. Et c’est cette spécificité qui présente pour nos partenaires un intérêt stratégique évident. Nous adressons donc un marché de niche, celui des patients en échec de traitement qui subissent accidents cardiovasculaires, insuffisances rénales ou autres pathologies, avec des conséquences souvent tragiques.

Pouvez-vous nous expliquer votre stratégie d’accords avec de grandes entreprises multinationales pharmaceutiques ?

Notre premier accord de partenariat a été signé en décembre 2019 avec le brésilien Biolab Sanus Pharmaceutical, dans l’optique du déploiement du firibastat en Amérique Latine. Le 22 septembre dernier, nous avons annoncé la signature d’un deuxième partenariat avec le taïwanais Orient Europharma (OEP Group), un acteur majeur de l’industrie pharmaceutique capable de distribuer le firibastat dans le Sud-Est Asiatique, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Enfin, le troisième accord que venons de signer, cette fois-ci avec le chinois Qilu Pharmaceuticals, nous assure une exploitation en Chine, Macao et Hong-Kong compris. Notre stratégie commerciale est donc simple : chercher à nous associer via des accords de licence exclusive à des experts du domaine cardiovasculaire positionnés comme acteurs majeurs sur leurs marchés spécifiques, et capables d’exploiter et poursuivre au mieux le développement du firibastat.

Après la phase de recherche & développement et celle des études cliniques se profile pour votre entreprise l’étape de l’exploitation commerciale déléguée. Synonyme d’apport en liquidités ?

En effet. Depuis la découverte de la molécule jusqu’à l’autorisation de mise sur le marché, il faut compter en règle générale vingt ans, une période marquée par des investissements importants destinés notamment à réaliser la phase d’essais cliniques. En engageant les accords de licence conclus avec nos partenaires, Quantum Genomics reçoit à chaque fois un paiement initial (ou upfront), des paiements d’étapes (ou milestones) et plus tard des royalties à deux chiffres rémunérant l’entreprise au pro-rata des ventes du produit. La licence confiée à Qilu Pharmaceutical représente ainsi un apport upfront et milestone estimé à 50 millions de dollars. A titre de comparaison, le précédent accord signé avec Orient EuroPharma représente un apport upfront et milestone estimé à 19 millions de dollars.

Quels sont les objectifs à moyen terme poursuivis par Quantum Genomics ?

Nous voulons avant tout continuer de creuser notre sillon. Sans surprise, nous allons concentrer tous nos efforts sur le firibastat pour préparer le début d’une nouvelle histoire, celle qui succède à la phase des études cliniques. Il s’agit, dans sa première indication, d’organiser son déploiement et son exploitation par nos partenaires, dans l’attente de l’autorisation de mise sur le marché que nous espérons recevoir courant 2023. Il nous faudra entretenir la relation avec eux, les accompagner, suivre de près chacun de ces partenariats. En nous investissant notamment dans les protocoles de pharmacovigilance qui visent à repérer les effets secondaires potentiels non notés, et améliorer ainsi le produit. Par ailleurs, dans sa seconde indication cette fois, il reste encore du chemin à parcourir au firibastat pour franchir les étapes d’essais cliniques le séparant encore de sa mise sur le marché.

Quelle suite de développement envisagez-vous autour du firibastat ?

Comme le font les biotech à ce stade de leur activité, ce que nous nous préparons activement à déployer représente la toute première acception de notre médicament. Une étape qui appellera par la suite une poursuite du travail sur l’élaboration de formes améliorées, firibastat étant le tout premier représentant de sa classe. Pour la poursuite de notre développement, nous croyons avant tout à la persévérance dans le travail au quotidien. Nous nous montrons confiants en nos nouveaux partenaires et en la fidélité de notre actionnaire pour nous soutenir dans la préparation cette nouvelle étape. Qui commencera par l’annonce prochaine de nouveaux partenariats de licence.

Aymeric Jeanson