Interview de Arnaud Tourlet : Gérant chez HSBC Global Asset Management (France)

Arnaud Tourlet

Gérant chez HSBC Global Asset Management (France)

Nous privilégions les entreprises exposées à la croissance européenne

Publié le 01 Septembre 2015

Quel bilan faites-vous des résultats semestriels publiés par les entreprises du CAC 40 ?
Dans l’ensemble les résultats des entreprises françaises au premier semestre 2015 ont été supérieurs aux attentes. Il y avait un peu d’inquiétude sur le deuxième trimestre en raison de l’environnement économique et politique - ralentissement en Chine, risque de défaut en Grèce- mais cela n’a pas eu d’impact sur l’activité. En revanche la baisse de l’euro et du pétrole s’est vraiment vue dans les comptes. C’est notamment le cas des entreprises qui réalisent une grande partie de leur chiffre d’affaires en zone dollar. Parmi les grandes capitalisations, le secteur de la banque et de l’assurance a réservé de bonnes surprises ainsi que l’aéronautique et la pharmacie. A l’inverse les médias ont souffert d’une reprise plus lente que prévu des dépenses publicitaires de même que le secteur de la construction au sens large.

La récente remontée de l’euro face au dollar va-t-elle peser sur les résultats du second semestre ?

Même à 1,15 dollar l’euro reste plus faible qu’il y a un an. L’effet devise reste donc positif mais il a déjà été intégré dans les anticipations de résultats pour le second semestre.

Dans quelle mesure le ralentissement de l’économie chinoise impacte-t-il les entreprises françaises ?

Le ralentissement de la croissance chinoise n’est pas un élément nouveau pour les entreprises européennes, en particulier industrielles. En France un groupe comme Schneider Electric a revu à la baisse ses prévisions de résultats en raison de ce ralentissement. Le secteur automobile doit quant à lui affronter une concurrence de plus en plus forte des acteurs locaux et des besoins d’équipement plus faibles. Cependant la Chine représente au plus 10 à 15% du chiffre d’affaires des groupes français. Que la croissance y soit à 5% au lieu de 7% n’est pas dramatique en soi. En revanche la chute des matières premières et les difficultés d’un certain nombre d’autres pays (Russie, Brésil) pourraient faire apparaître un problème de demande globale. Pour des groupes très internationalisés comme ceux du CAC 40, c’est un élément à prendre en compte. C’est pourquoi les dirigeants ont adopté un discours assez prudent lors de la présentation des comptes semestriels.

Quelles sont vos attentes pour le second semestre ?

Nous attendons une croissance de 10% des bénéfices des entreprises européennes cette année ainsi qu’en 2016. Le repli récent des marchés actions a permis de ramener les valorisations au niveau de leur moyenne historique, soit un cours moyen de 14 fois les bénéfices attendus pour 2015. Il n’y a donc pas d’excès de valorisation sur les entreprises européennes et nous pensons qu’il faut profiter de la période actuelle pour renforcer cette classe d’actifs.
Nous privilégions les entreprises exposées à la croissance européenne. Dans un contexte international compliqué l’économie européenne continue à bénéficier de vents favorables (baisse de l’euro et du pétrole, politique monétaire expansionniste) et des effets positifs des réformes menées dans certains pays. Nous avons ainsi profité de la récente correction pour renforcer nos lignes dans le secteur bancaire, les télécoms, mais aussi certaines valeurs du BTP et des médias qui avaient déjà baissé dans la foulée de leurs résultats semestriels.

Malgré leurs bons résultats les entreprises françaises ne veulent pas investir. Est-ce un mauvais signal selon vous ?
Effectivement l’investissement ne repart pas, c’est l’encéphalogramme plat. Mais on commence à s’y habituer. Dans la mesure où l’économie mondiale avance beaucoup moins vite que par le passé, les besoins d’investissement sont moins importants. Il y a d’ailleurs encore des surcapacités dans certains secteurs comme l’automobile, le ciment ou le BTP. La bonne nouvelle, c’est que les bilans se sont considérablement renforcés depuis la crise de 2008. Les entreprises françaises et européennes ont mis la priorité sur le désendettement et la baisse des coûts. C’est pourquoi je reste assez optimiste sur leur capacité à faire face aux turbulences actuelles en Chine et ailleurs.

Propos recueillis par François Schott